Courrier diplomatique
Un grand merci à ESC Conseils pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le DVD du film « Courrier diplomatique » de Henry Hathaway.
« Faut-il être bête pour faire le métier que je fais ! »
Mike Kells est un fonctionnaire en charge de l’acheminement de documents diplomatiques. Il se rend à Trieste pour venger la mort d’un ami, assassiné par un espion russe. Il y retrouve Joan, une femme qu’il a bien connue et qui pourrait l’aider à récupérer un microfilm que la victime avait sur lui au moment de sa mort : il contiendrait un plan échafaudé par les russes en vue d’envahir la Yougoslavie. Mike, qui n’a rien d’un espion, va être entraîné dans une aventure aux multiples rebondissements…
« Si c’est une américaine, qu’elle se rende utile à un compatriote ! »
Cinéaste prolifique et éclectique, l’américain Henry Hathaway fut l’une des figures majeures de l’âge d’or hollywoodien des années 30 à 50. Cet excellent technicien, notamment réputé pour accepter à peu près toutes les commandes des studios, réalisa ainsi pas moins d’une soixantaine de films en quarante ans de carrière. Parmi eux, des drames (« Peter Ibbetson », « Le plus grand cirque du monde »), des films d’aventures en costumes (« Prince Vaillant », « La rose noire »), quelques comédies (« La marine est dans le lac ») et surtout beaucoup de westerns (« L’attaque de la malle-poste », « Le jardin du diable », « Cent dollars pour un shérif ») et de films noirs (« Niagara », « Le carrefour de la mort », « Le fond de la bouteille »), ces deux genres de prédilections. En 1951, le réalisateur alors au sommet de sa carrière réalise pas moins de quatre films : « 14 heures », « L’attaque de la malle-poste », « Le renard du désert » et « Courrier diplomatique ». Ce dernier est une adaptation du roman « Sinistres rendez-vous » de Peter Cheyney, l’un des maitres du roman d’espionnage britannique, qui inspira également beaucoup de cinéastes français (« Alphaville » de Godard, « Brelan d’as » de Henri Verneuil).
« Que voulez-vous faire avec une fille qui a réponse à tout ? »
Avec « Courrier diplomatique », Hathaway renoue avec le cinéma d’espionnage. Un genre qu’il connait plutôt bien pour s’y être frotté pendant les années de guerre (« La maison sur la 92ème rue », « 13 rue Madeleine ») et qui, dans ce contexte de guerre froide et de chasse aux sorcières, a de nouveau le vent en poupe (« Berlin express » de Tourneur, « Chasse à l’homme » et « Les bourreaux meurent aussi » de Lang, « L’homme de Berlin » de Reed ou encore « L’affaire Ciceron » de Mankiewicz). Le cinéaste nous convie pour cette occasion à un voyage aux quatre coins d’une Europe encore marquée par la guerre (Paris, l’Autriche, Trieste) et où occidentaux et soviétiques demeurent à couteaux tirés. Reste qu’avec son intrigue absconse, ses rebondissements rocambolesques et son second degré omniprésent, ce « Courrier diplomatique » semble lorgner assez ouvertement du côté des films d’espionnage de Hitchcock (« Les 39 marches », « La cinquième colonne », « Quatre de l’espionnage », « Agent secret ») auquel il emprunte même l’idée du fameux « McGuffin » (en l’occurrence, le document secret sur lequel le héros tente en permanence de mettre la main et qui n’est qu’un prétexte à toute cette histoire). Bien sûr, derrière la légèreté apparente, il flotte sur le film un puissant parfum d’anticommunisme. Mais comme souvent chez Hathaway, la menace ne vient pas de là où l’attend et finalement, c’est de l’intérieur que viendra l’ennemi le machiavélique. Un moyen de nous rappeler que, dans cette période de paranoïa collective, l’ennemi est - potentiellement - partout. Pour le reste, ce « Courrier diplomatique » s’avère être un film très efficace et très agréable, bénéficiant de dialogues particulièrement savoureux, d’un rythme très maitrisé et d’une interprétation de grande qualité, notamment grâce aux excellents seconds rôles (Patricia Neal, Karl Malden). On s’amusera également à apercevoir les apparitions des débutants Charles Bronson et Lee Marvin.
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Le DVD : Le film est présenté en version restaurée HD, en version originale américaine et en version française. Des sous-titres optionnels français sont également disponibles. Côté bonus, il est accompagné de « Courrier diplomatique : espion malgré lui » (5 min.), présentation du film par Jean-François Rouger, Directeur de la programmation à la Cinémathèque Française.
Edité par ESC Conseils, « Courrier diplomatique » est disponible en DVD depuis le 6 juillet 2016.
Le film fait partie de la Collection « Hollywood Legends Premium », qui compte également les titres « Le fleuve sauvage » et « Panique dans la rue » d’Elia Kazan, « 14 heures » de Henry Hathaway, « La maison de bambou » de Samuel Fuller, « L’homme qui n’a jamais existé » de Ronald Neam ou encore « Le voyage fantastique » de Henry Koster, tous édités avec de nouveaux masters HD.
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