Bon voyage
Un grand merci à ARP Sélection pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le blu-ray du film « Bon voyage » de Jean-Paul Rappeneau.
« Je vous remercie d’apporter un peu de gaité pendant ses heures graves. On n’oublie tout avec vous ! »
En juin 1940, à l’hôtel Splendide de Bordeaux sont réunis ministres, journalistes, grands bourgeois, demi-mondaines et espions de tous bords. Frédéric, qui se retrouve en prison pour avoir couvert Viviane, star du cinéma dont il est épris, profite du trouble généré par l’arrivée des allemands dans la capitale pour se faire la belle. Comme des milliers de parisiens, il prend la route pour fuir l’occupation. Le jeune homme devra choisir entre la célèbre actrice et une étudiante passionnée, entre les politiques et les voyous, entre l’insouciance et l’âge adulte.
« Pars avec moi. On peut encore partir loin tous les deux. Partir là où on veut. »
Pour tout cinéphile qui se respecte, le nom de Jean-Paul Rappeneau est définitivement lié à une certaine idée du cinéma d’aventures populaire français. Débutant dans les années 50 comme assistant de grands réalisateurs tels que Raymond Bernard ou Edouard Molinaro, il s’impose dès le début des années 60 comme l’un des scénaristes les plus en vue de sa génération, écrivant ainsi pour Yves Robert (« Signé Arsène Lupin ») ou Louis Malle (« Zazie dans le métro »). Mais c’est surtout sa collaboration avec son compère Philippe De Broca, pour lequel il écrit les cultissimes « L’homme de Rio » et « Le magnifique », qui lui permet d’obtenir la reconnaissance et d’accéder à la célébrité. Fort de ces succès, il passe lui-même à la réalisation au cours de cette même décennie, avec une prédilection pour les comédies d’aventures historiques et/ou en costumes (« La vie de château », « Les mariés de l’an II »). Disparaissant un temps des écrans après le succès du « Sauvage » (1975), il consacre la décennie des 90’s à adapter des classiques de la littérature française : « Le hussard sur le toit » et « Cyrano de Bergerac » qui à l’honneur de concourir aux Oscars. En 2003, il revient avec « Bon voyage », qui demeure son septième et avant-dernier film à ce jour (il a depuis réalisé « Belles familles » en 2015). Coécrit avec Patrick Modiano, le film devait initialement être porté par Sophie Marceau, Audrey Tautou et Ruppert Everett, finalement remplacés par Isabelle Adjani, Virginie Ledoyen et Peter Coyote. Nommé onze fois aux Oscars, le film fut récompensé de deux statuettes (Meilleurs décors et Meilleur espoir masculin pour Grégori Derangère).
« Tu finis toujours par jeter tout le monde. Tu veux qu’on t’aime mais toi tu n’aimes personne. Même pas toi. Tu finiras seule devant ta glace. »
En 1966 avec « La vie de château », Jean-Paul Rappeneau se jouait de l’occupation et de l’imminence du débarquement de Normandie en imaginant un vaudeville aussi fantasque que drôle. Un décalage tout en légèreté qui allait devenir sa marque de fabrique. Près de quarante ans plus tard, il revient à la seconde guerre mondiale. Ou plutôt à ses prémices. De l’imminence de la guerre à la déroute française de 1940, qui conduira le gouvernement accompagné du « Tout Paris » à Bordeaux. Une nouvelle fois, Rappeneau évite la leçon d’Histoire austère et sentencieuse et se sert du contexte de l’exode pour imaginer une folle échappée belle, dans laquelle se croisent dans le désordre ambiant une star de cinéma érotomane, un ministre blasé et opportuniste, un écrivain raté, un repris de justice en cavale ou encore éminent scientifique et sa jeune assistante, bien décidés à soustraire les stratégiques réserves d’eau lourde aux envahisseurs allemands. Autant de destins tourmentés par l’urgence des évènements qui se retrouvent inextricablement liés malgré eux par le hasard des circonstances. Comme à son habitude, le réalisateur fait fi des convenances et de la dramaturgie inhérente au contexte historique de son sujet pour donner lieu à une aventure chorale dans laquelle les enjeux les plus capitaux (chute d’un pays, de la liberté...) ne sauraient entacher le vent de légèreté qui souffle sur le récit. Avec un regard malicieux (mais pas dupe pour autant), Rappeneau filme ainsi le badinage auquel ses personnages prennent le temps de se livrer, de même que leurs contradictions, annonciatrices - pour certains du moins - de leur future compromission. La fresque, enjouée, doit également beaucoup à son casting quatre étoiles, à commencer par Isabelle Adjani, géniale en sosie de Viviane Romance, bien entourée par un Gérard Depardieu tout en retenu ou un Yvan Attal convaincant en voyou débrouillard. Seul Grégori Dérangère parait un peu falot. Mais qu’importe, le cinéaste déroule et signe une fable alerte. Et même s’il met un point d’honneur à ne jamais juger ses personnages, il nous invite à prendre les chemins de traverse, rappelant qu’il n’y a pas de plus grand bonheur que l’audace et la liberté.
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Le blu-ray : Le film est proposé dans une version remastérisée 4k, en version originale française (5.1). Des sous-titres optionnels anglais et français pour malentendants.
Côté bonus, le film est accompagné du commentaire audio de Jean-Paul Rappeneau, de « La double vie de Jean-Paul Rappeneau » : making of, de Bande-annonce et teasers, d’une interview des sept comédiens et de « Petit voyage dans le numérique » commenté par Jean-Paul Rappeneau.
Edité par ARP Sélection, « Bon voyage » est disponible en combo DVD + blu-ray depuis le 1er mars 2017.
Le site Internet de ARP Sélection est ici. Sa page Facebook est ici.
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