L'invasion des profanateurs
Un grand merci à Rimini éditions pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le DVD du film « L’invasion des profanateurs » de Philip Kaufman.
« Ne serait-ce pas un cas de paranoïa ou d’hystérie collective ? »
De mystérieuses particules venues de l’espace arrivent sur Terre. A San Francisco, la scientifique Elizabeth Driscoll, employée au Ministère de la Santé, cueille une fleur étrange et tente en vain de l’identifier. Elle se confie à son collègue Matthew Bennell. Dans les jours qui suivent, comme si l’Humanité était victime d’une épidémie inconnue, de plus en plus de personnes affirment ne plus reconnaître leurs proches. Matthew Bennell et ses amis ne veulent pas croire aux rumeurs les plus farfelues qui se développent. Jusqu’à être témoins eux-mêmes de phénomènes aussi étranges qu’inquiétants...
« J’habite ici depuis toujours mais aujourd’hui j’ai senti que quelque chose avait changé. Comme si la ville entière s’était transformée du jour au lendemain. C’est effrayant. »
Après de brillantes études d’histoire à Chicago puis à Harvard, Philip Kaufman se destinait à devenir professeur. Mais à l’orée des années 60, il part pour San Francisco où il découvre les mouvements de la contre-culture. En Californie, il exerce divers petits boulots, se lie d’amitié avec Henry Miller, et s’intéresse à l’art sous toutes ses formes. Après un long périple à travers l’Europe jusqu’en Israël, il revient en Amérique bien décidé à devenir cinéaste. Il réalise ainsi son premier long-métrage en 1964, « Goldstein », qui obtient le Prix de la Nouvelle critique au Festival de Cannes. S’en suit alors une carrière de près de quarante ans, ponctuée de quelques grands films tels que « La légende Jesse James » (1972), « L’étoffe des héros » (1983), « L’insoutenable légèreté de l’être » (1988), « Henry et June » (1990) ou encore le polar « Soleil levant » (1993). En parallèle à ses activités de réalisateur, Kaufman mènera également une fructueuse carrière de scénariste, écrivant notamment les scénarios de « Josey Wales hors-la-loi » (Eastwood, 1976) et de deux épisodes d’Indiana Jones, « Les aventuriers de l’arche perdue » et « Indiana Jones et la dernière croisade » (Spielberg, 1981 et 1989). En 1978, il s’essaye à la science-fiction horrifique en signant « L’invasion des profanateurs », adaptation du célèbre roman éponyme de Jack Finney publié en 1955 et qui avait déjà donné lieu à une première adaptation cinématographique, « L’invasion des profanateurs de sépultures » (Siegel, 1956). Récompensé au Festival d’Avoriaz, le film donnera lieu à deux remakes : « Body snatchers » (Ferrara, 1993) et « Invasion » (Hischbiegel, 2007).
« Je veux dormir. Je ne peux plus restée éveillée »
« L’invasion des profanateurs » est ainsi un film de science-fiction à tendance horrifique imaginant une invasion extraterrestre procédant par la substitution progressives des êtres humains par des clones dénués de tout sentiment - et donc de toute humanité - ventant les mérites d’un monde de paix car débarrassé de toutes passions. Sans l’ombre d’un doute, le film de Siegel en 1956 se servait de ce postulat comme d’une métaphore pour dénoncer la menace d’une invasion communiste sournoise de l’Amérique, par le biais d’agents infiltrés au sein de la population et par la propagation pernicieuse de toute une idéologie (antireligieuse notamment). Force est de constater qu’en 1978, l’heure n’est plus tellement à la peur du « rouge ». Pour Kaufman, le danger est plutôt d’ordres scientifique et environnemental. Il pointe ainsi avec le film les périls sanitaires (le camion à ordures qui crache sans cesse ses épaisses volutes de poussière, les cuisines des restaurants infestées de rats, qui témoignent de la pollution ambiante) et les expérimentations scientifiques (les laboratoires, les serres, le clone raté du chien au visage d’homme), désormais seule véritable menace pour l’avenir de l’Humanité. Mais « L’invasion des profanateurs » est aussi - et avant tout - un formidable survival paranoïaque au rythme échevelé, qui voit croitre de façon constante le sentiment d’oppression à mesure que le piège urbain se referme sur ses personnages. Par petites touches, relevant souvent du détail (les corps recouverts de matières filandreuses, les bruits d’insectes produits par les pseudos zombies), le cinéaste ajoute à son récit une dimension horrifique qui n’était pas dans la version de 1956. De même, son choix de placer son récit sous un angle volontairement pessimiste (notamment en transformant radicalement la fin) donne à son film une dimension beaucoup plus marquante et surtout tout à fait traumatisante. Comme s’il n’y avait au final plus aucun espoir de d’inverser le cours des évènements et que l’Humanité était contrainte de s’éteindre. A l’image du caméo de Kevin McCarthy, héros de la version de 1956 et qui se fait ici broyer par la foule sans réussir cette fois à prévenir les survivants. C’est d’ailleurs là la dimension (im)morale du film que de nous rappeler - à travers ces êtres déshumanisés mais d’apparence humaine - que l’homme est un loup pour l’homme et qu’à ce titre l’Humanité, à ses actes, sera seule responsable de sa propre perte. « L’invasion des profanateurs » est ainsi un classique immédiat. Un must absolu du genre.
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Le DVD : Le film est présenté dans un nouveau master HD, en version originale américaine (2.0) ainsi qu’en version française (2.0). Des sous-titres français sont également proposés.
Côté bonus, le film est accompagné de trois modules : « Au coeur de l’invasion » : interview de Brooke Adams (9 min. - VOST), « Comment j’ai appris à ne plus m’en faire et aimer les cosses » : interviews de Véronica Cartwright, Donald Sutherland, Philip Kaufman, W.D. Richter, Michael Chapman (15 min. - VOST), « Une invasion signée Jack Kinney » : intervention de Pascal Montéville, enseignant en Sciences Politiques à School Year Abroad de Rennes (25 min. - VF). Un livret exclusif « Invasion(s) » rédigé par Pascal Montéville, enseignant en Sciences Politiques à School Year Abroad de Rennes (12 pages), est également inclus.
Edité par Rimini Editions, « L’invasion des profanateurs » est disponible en DVD ainsi qu’en blu-ray depuis le 25 avril 2017.
La page Facebook de Rimini Editions est ici.
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