Mise à mort du cerf sacré
Un grand merci à France Télévisions Distribution pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le DVD du film « Mise à mort du cerf sacré » de Yorgos Lanthimos.
« Tu as tué un membre de ma famille alors tu dois en tuer un de la tienne. Je ne peux pas te dire qui, c’est à toi de décider. Mais si tu ne le fais pas, ils mourront tous. »
Steven, brillant chirurgien, est marié à Anna, ophtalmologue respectée. Ils vivent heureux avec leurs deux enfants Kim, 14 ans et Bob, 12 ans. Depuis quelques temps, Steven a pris sous son aile Martin, un jeune garçon qui a perdu son père. Mais ce dernier s’immisce progressivement au sein de la famille et devient de plus en plus menaçant, jusqu’à conduire Steven à un impensable sacrifice.
« Je n’en veux pas à ton père pour ce qu’il a fait. Je le plains. »
Après avoir connu son heure de gloire entre les années 50 et les années 70 sous la houlette de quelques réalisateurs chevronnés (Michael Cacoyannis, Theo Angelopoulos ou encore Jules Dassin), le Cinéma grec avait quelque peu disparut de nos écrans. Jusqu’aux années 2000 et l’émergence d’une nouvelle et jeune génération de cinéastes dont le plus en vue reste certainement Yorgos Lanthimos. Fort d’un redoutable sens esthétique de la mise en scène, le cinéaste aura su développer en plus de quinze ans une œuvre singulière, à la fois expérimentale et philosophique, tout en cultivant un goût assumé pour l’étrange. Habitué des grands festivals internationaux, il est remarqué en 2009 pour le dérangeant « Canine » (Prix Un certain regard au Festival de Cannes) avant d’accéder à une forme de reconnaissance internationale en 2013 avec « The lobster » (Prix du Jury du Festival de Cannes). Son nouveau film, « Mise à mort du cerf sacré », dont l’étrange titre renvoie à la mythologie grecque, a lui obtenu le Prix du scénario, ex-æquo avec « A beautiful day » de Lynne Ramsay.
« Tu m’as donné la vie. Toi seul peut la reprendre »
Œil pour œil, dent pour dent. En s’inspirant du mythe d’Iphigénie, Yorgos Lanthimos imagine une tragédie en forme de drame moral centré sur les thèmes de la mort et de la vengeance. Ou comment obtenir une forme de réparation à la mort d’un proche quand justice n’est pas rendue. Parce que le père du jeune Martin est mort sur sa table d’opération sans que l’on sache vraiment s’il y est pour quelque chose, Steven prend sous son aile le mystérieux adolescent. Mais très vite, leur étrange relation va échapper au contrôle de Steven et Martin va peu à peu faire peser une menace sur la famille Murphy. Dans une ambiance éthérée et glaciale, Lanthimos esquisse un thriller d’épouvante aux accents surnaturels. Sans qu’on ne sache jamais si Martin est l’incarnation du mal ou la manifestation de la conscience de Steven, il le mettra face à un inextricable dilemme moral : sacrifier sciemment l’un des siens pour sauver les autres ou voir toute sa petite famille mourir à petit feu, les uns après les autres. Dans tous les cas, Steven ne pourra que subir. Le prix à payer en quelque sorte pour sa culpabilité. Une nouvelle fois, le cinéaste grec surprend ici par son audace, qu’il s’agisse de cet univers mélangeant habilement réalité et surnaturel et ce récit à la fois dérangeant et oppressant. Mais si l’ensemble est magnifiquement exécuté (esthétisme exacerbé des mouvements de caméra) et interprété par un remarquable trio d’acteurs (Colin Farrell, Nicole Kidman et le jeune Barry Keoghan), ce thriller vénéneux parait parfois un peu artificiel et trop propre pour totalement convaincre. Un étrange objet cinématographique, aussi beau formellement que déroutant.
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Le DVD : Le film est présenté en version originale anglaise (5.1 et 2.0). Des sous-titres français sont également disponibles.
Côté bonus, le film est accompagné de trois interviews de Yorgos Lanthimos, Colin Farrell et Nicole Kidman (54 min. au total).
Edité par France Télévisions Distribution, « Mise à mort du cerf sacré » est disponible en DVD ainsi qu’en blu-ray depuis le 14 mars 2018.
Le site Internet de France Télévisions Distribution est ici. Sa page Facebook est ici.
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