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02 Dec

Journal d'une femme de chambre

Publié par Platinoch  - Catégories :  #Drames

Un grand merci à Sidonis Calysta pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le DVD du film « Journal d’une femme de chambre » de Jean Renoir.

 

Journal_d_une_femme_de_chambre

« Il ne faut jamais courber l’échine. On n’arrive à rien comme ça. »

 

Célestine, une femme de chambre, est engagée dans le château des Lanlaire, en Normandie. Elle va découvrir une maison et une famille pleines de secrets et de zones d’ombre. Les Lanlaire ne vivent que pour leur fils Georges, gravement malade. Georges s’éprend de Célestine, mais Joseph, le valet de chambre, également amoureux de la jeune femme, essaie de contrecarrer ses plans.

 

« Un jour j’arriverai à mettre la main sur un homme riche. J’aurai une grande maison. Désormais c’est moi qui ferai marcher les hommes. L’amour n’est pas pour Célestine. »

 

Journal_d_une_femme_de_chambre_Paulette_Goddard

Œuvrant dans l’industrie cinématographique depuis les années 20, Jean Renoir gagne ses galons de cinéaste sous l’ère du muet avant de s’imposer comme l’une des grandes figures du cinéma françaisau cours des années 30, période particulièrement faste pour lui et au cours de laquelle il signe sans doute ses plus grands succès critiques et publics (« Boudu sauvé des eaux », « La grande illusion »). Compagnon de route du Parti communiste français, son cinéma prend alors une dimension politique en prenant fait et cause pour les combats des classes populaires (« Le crime de Monsieur Lange », « Les bas-fonds », « La vie est à nous ») et en dénonçant une certaine déliquescence morale de la bourgeoise (« La règle du jeu »),lui conférant de fait une aura particulière en cette période troublée et clivante du Front Populaire. Mais l’arrivée de la guerre, suivie de l’invasion de la France, va marquer un coup de frein dans la carrière du cinéaste qui, de façon assez controversée, finira par prendre la route de l’exil vers l’Amérique où il ne tournera que cinq films, souvent considérés (à tort) comme mineurs. En 1945, tout juste auréolé d’une nomination à l’Oscar du meilleur réalisateur pour « L’homme du sud », il accepte la sollicitation de Paulette Goddard, alors au sommet de sa carrière, de la diriger dans « Journal d’une femme de chambre », qu’elle souhaite également co-produire.

 

« J’ai toujours été honnête. Chaque fois qu’un homme posait ses yeux sur moi, j’ai toujours essayé de lire ses intentions dans son regard. Et chaque fois j’ai été meurtrie. »

 

Journal_d_une_femme_de_chambre_Jean_Renoir

Auteur résolument libertaire et longtemps considéré – à tort – comme subversif, Octave Mirbeau n’aura eu de cesse de dénoncer dans ses écrits toutes les formes d’exploitation humaines, à commencer par les rapports de domination de classes. Un thème que l’on trouve au cœur du « Journal d’une femme de chambre », son roman le plus célèbre. Mais c’est à une très libre (pour ne pas dire infidèle) adaptation que se livre ici Jean Renoir, qui expurge en grande partie le récit de sa noirceur. Certes, les rêves d’émancipation et d’ascension sociale de l’héroïne sont au cœur du récit. Certes encore, la bourgeoisie y est (en partie du moins) brocardée pour la façon méprisante (et parfois même humiliante) dont elle traite son personnel de maison. Mais le cinéaste traite le tout dans une ambiance assez badine (les scènes où le vieux capitaine s’amuse crapuleusement à peloter les servantes qui passent dans son jardin) qui donnent à l’ensemble une tonalité beaucoup plus claire que celle du roman. Surtout, il modifie la fin dans les grandes largeurs, sacrifiant la noirceur du personnage de Célestine au profit d’une improbable romance avec le fils cynique de ses employeurs. Si le film y trouve un sous-texte féministe qui lui fait gagner en modernité, les lecteurs du roman seront néanmoins très surpris – pour ne pas dire perturbé – par cette adaptation. Il n’en reste pas moins la virtuosité de la mise en scène de Renoir, qui signe sans doute là son film le plus personnel de sa période américaine, et le charme ravageur de la belle Paulette Goddard, qui illumine chaque plan de sa présence.

 

Journal_d_une_femme_de_chambre_Hurd_Hatfield

 

**

Le DVD : Le film est présenté en version restaurée dans un Master Haute-Définition et proposé en version originale américaine (2.0) ainsi qu’en version française (2.0). Des sous-titres français sont également disponibles.

 

Côté bonus, le film est accompagné de deux présentations respectivement signées Jean-François Rauger (37 min.) et Bertrand Tavernier (40 min.) dont il s’agit de l’une de ses toutes dernières apparitions, ainsi que de « Jean Renoir en Amérique » de David Thompson (57 min.). Le digibook comprends également un livre de 80 pages,« Jean Renoir en Amérique », rédigé par le critique Pascal Mérigeau, auteur de plusieurs ouvrages, dont un dédié à Jean Renoir.

 

Édité par Sidonis Calysta, « Journal d’une femme de chambre » est disponible en édition collector digibook blu-ray + DVD depuis le 24 août 2021.

 

Journal_d_une_femme_de_chambre_Sidonis_Calysta

 

Le site Internet de Sidonis Calysta est ici. Sa page Facebook est ici.

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