03 Apr

Temps sans pitié

Publié par Platinoch - Catégories : #Films noirs-Policiers-Thrillers, #Drames

Un grand merci à Carlotta Films pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le blu-ray du film « Temps sans pitié » de Joseph Losey.

« Je ne te pardonnerai pas cette fois de m’avoir abandonné »

À sa sortie de cure de désintoxication, David Graham apprend la condamnation à mort de son fils Alec pour le meurtre de sa petite amie. Il ne reste plus que vingt-quatre heures avant que la sentence soit appliquée. Persuadé de son innocence, David débarque à Londres pour mener l’enquête et découvrir l’identité du véritable assassin. Au cours de cette journée cauchemardesque, il va aussi devoir lutter contre ses propres démons.

« Tout le monde cache des secrets »

En ce milieu des années 50, Joseph Losey est un cinéaste déchu. Totalement déclassé. Pourtant, cet ancien metteur en scène de théâtre révélé à Broadway au cours des années 30 grâce à ses pièces « engagées » avait signé des débuts remarqués et prometteurs à Hollywood. A l’image de ses films « Le garçon aux cheveux verts » (1948), « Le rôdeur » (1951) ou encore « M » (remake américain du classique de Lang, 1951). Mais en 1952, il est rattrapé par la Commission des activités anti-américaines de Sénateur McCarthy qui lui reproches ses sympathies gauchistes et sa proximité avec le Parti communiste américain. Refusant de témoigner, il se retrouve aussitôt blacklisté et contraint de partir en Europe pour pouvoir continuer de travailler. Mais que ce soit en Italie (« Un homme à détruire », 1952) ou en Angleterre (« La bête s’éveille », 1954 ou « L’étrangère intime » en 1956), ses débuts européens se révèlent difficiles. Il faut en effet attendre 1957 et son film « Temps sans pitié » pour que s’amorce son retour au premier plan.

« Je veux que mon fils vive et je ne vous laisserai pas le tuer »

Adaptation d’une pièce d’Emlyn Williams, « Temps sans pitié » est le récit d’une course contre la montre. Celle d’un homme, alcoolique et usé, déterminé à prouver l’innocence de son fils qui, condamné pour meurtre, doit être exécuté sous vingt-quatre heures. Une mission d’autant plus délicate (pour ne pas dire impossible) qu’il doit reprendre l’enquête à zéro, le tout en luttant contre ses addictions et ses propres démons. Pour le spectateur, le suspense ne résidera pas tant dans l’identité du tueur (révélée dès la séquence d’ouverture du film) que dans la réussite de l’entreprise du père. Pour le cinéaste en revanche, tout l’intérêt de ce film réside principalement dans la question de l’erreur judiciaire (voire même de l’injustice) qu’il connait trop bien pour l’avoir lui-même éprouvé. Une injustice qui n’aura d’égale que la détermination résolue de ce père – magistralement interprété par Michael Redgrave dont les émotions passent par son seul regard – prêt à tout pour sauver son fils et dont la rédemption passera par un geste sacrificiel. En creux, le cinéaste dresse un portrait au vitriol de cette bourgeoisie corrompue pour illustrer un vibrant plaidoyer contre la peine de mort. Un film au sous-texte plutôt fort mais qui souffre d’un scénario un peu trop bavard et dont les rebondissements semblent parfois un peu simplistes (les personnages qui finissent par avouer la vérité au héros in extremis après avoir toujours refusé de la dire y compris devant la justice). Un Losey plutôt mineur mais qui annonce le début de deux décennies de plénitude artistique, ponctuées de films importants (« The servant », « Accident », « Boom », « Cérémonie secrète », « Le messager », « Monsieur Klein »).

Le blu-ray : Le film est présenté dans un nouveau Master restauré 2K et présenté en version originale anglaise (1.0). Des sous-titres français sont également disponibles.

Côté bonus, le film est accompagné de « Une époque sans pitié » : entretien avec Michel Ciment, directeur de la publication de la revue Positif et auteur du « Livre de Losey » (12 min.) ainsi que d’une Bande-annonce.

Édité par Carlotta Films, « Temps sans pitié » est disponible en DVD ainsi qu’en blu-ray depuis le 15 février 2022.

Le site Internet de Carlotta Films est ici. Sa page Facebook est ici.