Tout le monde aime Jeanne
Un grand merci à Diaphana pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le DVD du film « Tout le monde aime Jeanne » de Céline Deveaux.
« En tout cas, t’es pas décevante par rapport à tout ce que j’avais envisagé que tu puisses devenir à l’époque »
Tout le monde a toujours aimé Jeanne. Aujourd’hui, elle se déteste. Surendettée, elle doit se rendre à Lisbonne et mettre en vente l’appartement de sa mère disparue un an auparavant. À l’aéroport elle tombe sur Jean, un ancien camarade de lycée fantasque et quelque peu envahissant.
« Tu veux venir à la plage avec nous ou tu préfères faire ta dépression toute seule ? »
Repérée dès sa sortie de l’Ecole Nationale Supérieure des Arts Décoratifs et son court-métrage de fin d’études, « Vie et mort de l’illustre Grigori Efimovitch Raspoutine » (2013), récompensé dans de nombreux festivals, Céline Devaux fait depuis lors partie de ces jeunes réalisateurs prometteurs à suivre de près. Et force est de constater qu’elle a su se construire, au fil des années et de ses courts-métrages, une jolie réputation ponctuée d’un César du Meilleur court-métrage d’animation (« Le repas dominical » en 2016) et d’un Prix du Meilleur court-métrage à la Mostra de Venise (« Gros chagrin » en 2017). De quoi lui permettre, fort logiquement, de franchir un palier en accédant à des projets plus ambitieux. C’est ainsi qu’elle signe « Tout le monde aime Jeanne », son premier-long métrage qui tranche avec ses précédentes réalisations en ce qu’il ne s’agit pas d’un film d’animation mais en prises de vue réelles. A noter que le film a été présenté à la Semaine Internationale de la Critique au Festival de Cannes 2022 en séance spéciale.
« C’est encore pire d’être angoissé dans un endroit qui est beau »
On ne peut malheureusement pas être et avoir été : ancienne adolescente solaire et aimée de tous, Jeanne se rêvait en Marie Curie des temps modernes, prête à sauver les océans de par le génie de ses inventions. Mais alors qu’elle rêvait à son Prix Nobel, son robot avaleur de déchets s’est noyé dès sa première mise à l’eau, entrainant avec lui le naufrage de Jeanne et de tous ses espoirs de succès. Ruinée et bouleversée, elle profite donc de cet accident de parcours pour partir à Lisbonne mettre en vente l’appartement de sa défunte mère qui s’est donnée la mort quelques mois plus tôt. Un retour aux sources dans la ville de son enfance, qui doit lui permettre de remettre de l’ordre dans sa vie en affrontant les difficultés qu’elle a trop longtemps enterré sous le tapis (le deuil, la dépression, l’échec sentimental et professionnel). Avec « Tout le monde aime Jeanne », la réalisatrice Céline Deveaux nous invite ainsi à une sorte de tragicomédie intimiste et introspective, dans laquelle les tourments intérieurs de l’héroïne sont illustrés par le dialogue qu’elle mène avec une petite créature animée qui représente sa conscience. Une construction hybride très originale mais qui, à dire vrai, s’avère également assez déroutante au départ. Et ce d’autant plus que l’ambiance assez éthérée du film et le caractère peu avenant de l’héroïne font peser sur la première demi-heure une forme de malaise, qui se dissipe progressivement, à mesure que les éléments relatifs au trouble intérieur de l’héroïne se mettent en place et qu’elle accepte son état dépressif. L’immixtion dans sa vie d’un ancien camarade de classe fantasque contribuera à la sortir de sa torpeur. Porté par un joli duo très complémentaire formé par Blanche Gardin et Laurent Lafitte, « Tout le monde aime Jeanne » se révèle être au final une dramédie douce-amère, émouvante et sincère, et ce en dépit d’un scénario parfois un peu maladroit qui ne parvient pas toujours à éviter certains poncifs (la longue scène de destruction des assiettes, symbole cathartique un peu facile d’une forme de libération). Un premier film plutôt touchant et prometteur.
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Le DVD : Le film est présenté en version originale française (5.1 et 2.0) ainsi qu’en audiodescription. Des sous-titres français pour malentendants sont également disponibles.
Côté bonus, le film est accompagné d’un Commentaire audio de Céline Devaux, Sylvie Pialat et Gabrielle Stemmer, de 3 courts métrages d’animation de Céline Devaux (« Vie et mort de l’illustre Grigori Efimovitch Raspoutine » (2013, 10 min.), « Le Repas dominical » (2016, 14 min.) et « Gros chagrin » (2017, 15 min.)), d’un Entretien croisé entre Céline Devaux et Flavien Berger (15 min.), d’un module « Présentation et création du Petit Fantôme » (7 min.) ainsi que d’une Bande-annonce.
Édité par Diaphana, « Tout le monde aime Jeanne » est disponible en DVD ainsi qu’en blu-ray (exclusivité FNAC) depuis le 17 janvier 2023.
Le site Internet de Diaphana est ici. Sa page Facebook est ici.
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