Mister Scarface
Un grand merci à Éléphant Films pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le blu-ray du film « Mister Scarface » de Fernando Di Leo.
« Les jeunes vous êtes toujours trop pressés : pressés de gagner de l’argent, de le claquer et de mourir ! »
Ric souhaite venger la mort de son père qui a été tué par Manzani « Scarface ». Ce dernier dirige de nombreuses activités illégales au sein de la ville. Pour réussir sa vengeance, il s'associe avec Tony, un malfrat travaillant pour un autre parrain de la ville, Luigi Cerchio. Ensemble, ils tentent de déclencher une guerre entre les deux chefs maffieux.
« Mes hommes ne se font jamais arnaquer. Parce que ceux qui se font arnaquer… Ne sont pas mes hommes ! »
En cette fin des années 70, Fernando Di Leo est une figure bien établie du cinéma bis italien : d’abord scénariste (il participe aux grandes heures du western spaghetti en participant à l’écriture de « Pour une poignée de dollars », « Et pour quelques dollars de plus » ou encore « Navajo Joe »), il s’impose ensuite en tant que réalisateur comme l’un des maitres du poliziottescho – ce néo-polar un peu violent et démagogique qui connut son heure de gloire durant les années de plomb – dont il signera quelques pépites emblématiques (« Milan calibre 9 », « L’empire du crime », « Le boss »). S’il a quelque peu mis de côté son travail de scénariste au service d’autres réalisateurs, l’année 1976 est une année faste qui marque son retour aux affaires : il écrit ainsi les scénarios de « Jeunes, désespérés, violents » et de « Deux flics à abattre » que réaliseront respectivement Romolo Guerrieri et Ruggero Deodato, et réalise lui-même « Mister Scarface ». Un film important en ce qu’il s’agit de l’un des tous derniers poliziottescho du cinéaste (le genre commence alors à s’essouffler et à amorcer son déclin) qui tournera encore une poignée de drames de mœurs (« Avoir vingt ans », « Pover’ammore ») avant de raccrocher définitivement en 1985.
« Ne mise pas sur lui, l’autre est trop intelligent »
Manzani, alias « Scarface », a bâti son empire et son pouvoir sur sa violence, sa cruauté et son caractère impitoyable. A l’image de cette – géniale, n’ayons pas peur des mots – scène d’ouverture d’une violence redoutable durant laquelle il assassine un ancien complice sous le regard médusé du jeune fils de celui-ci. Mais la vengeance est un plat qui se mange froid… Vingt ans plus tard, Manzani règne sans partage sur les activités criminelles de la ville (du vol à la tir en passant par les jeux ou le racket), écrasant sans vergogne toutes les bandes rivales qui ne lui prêteraient pas allégeance. Une mécanique bien huilée que rien ne semblerait pouvoir enrayer. A moins que deux jeunes recrues audacieuses et talentueuses, ayant en commun d’avoir été humiliées par le maitre des lieux, ne décident de rebattre les cartes. Sur le papier, rien de forcément très nouveau : Di Leo recycle la trame de ses premiers succès (« Milan calibre 9 », « L’empire du crime ») en reprenant le thème de l’homme de main sans grade qui tente, seul, d’affronter et de faire tomber de l’intérieur toute la pyramide mafieuse, de sa base jusqu’à sa tête. Mais cette fois, il l’aborde sous l’angle volontiers plus léger du buddy movie. Et de fait, si le scénario de cette folle croisade vengeresse est assez peu crédible, le scénariste/réalisateur a suffisamment de bouteille pour nous concocter un film explosif (et particulièrement jouissif), tant au travers de ses personnages souvent hauts en couleur (mention spéciale au personnage de taupe homosexuelle interprétée par l’excellent Vittorio Caprioli) que sur un déroulé au cours duquel on assiste à la destruction très méthodique de l’organisation. Ce qui donne lieu à de formidables moments de bravoure, tels que l’assassinat du chef de la salle de jeux ou, surtout, le règlement de compte final dans l’usine désaffecté qui se pare d’une teinte profondément westernienne. Si Harry Baer et Al Cliver forment un duo étonnamment accrocheur, tout juste regrettera-t-on de voir si peu à l’écran le grand Jack Palace et son sourire carnassier alors même que son nom figure en haut du casting du film. Un Di Leo tardif, qui n’en demeure pas moins un très bon cru.
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Le blu-ray : Le film est présenté dans un nouveau Master restauré en Haute-Défintion et proposé en version originale italienne ainsi qu’en version internationale anglaise (toutes deux 2.0). Des sous-titres français sont également disponibles.
Côté bonus, le film est accompagné d’une présentation par Gérald Duchaussoy et Romain Vandestichele (2023, 19 min.) et d’une Bande-annonce internationale.
Édité par Éléphant Films, « Mister Scarface » en édition DVD single ainsi qu’en boitier futurpak limité comprenant le blu-ray + le DVD + le livret « Les Années de plomb - Volume 1 » rédigé par Alain Petit (24 pages) depuis le 22 août 2023.
Le site Internet d’Éléphant Films est ici. Sa page Facebook est ici.
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