Les cendres du temps - Redux
« Quand le vent tombe, létendard se fige, mais le cur de lhomme continue de sagiter »
Le mystérieux Ouyang Feng vit seul dans le désert de L'Ouest depuis que la femme qu'il aimait l'a quitté. Seul îlot de vie au milieu du désert, son auberge voit passer toutes sortes de voyageurs. Car Feng est un homme recherché pour ses talents dintermédiaires. Se définissant lui même comme détenteur des solutions à tous les problèmes, il engage des tueurs à gages experts en arts martiaux pour exécuter des contrats. Son cur meurtri l'a rendu cynique et sans pitié, mais ses rencontres avec amis, clients et futurs ennemis vont lui faire prendre conscience de sa solitude.
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« Il faut parfois quitter un être pour comprendre quon laime »
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Sorti une première fois en 1994, « Les cendres du temps » est le quatrième long métrage signé du grand réalisateur hongkongais Wong Kar-Faï. Inspiré du best-seller du romancier hongkongais Louis Cha « La légende du héros chasseur daigles », le film a la particularité dêtre la seule incartade de Wong Kar-Waï dans le genre très populaire en Asie du film de sabre. Premier film produit par la société de production du réalisateur, son tournage aura été pour le moins chaotique. Outres les conditions naturelles difficiles (tournage en plein désert), le tournage se sera étalé sur près de deux ans. Projet ambitieux réunissant tout le gratin du cinéma hongkongais des années 90, le film, bien quhonoré dans de nombreux festivals, sera un échec en salles. Quatorze ans après, Wong Kar-Waï nous propose donc une version définitive, forte dun nouveau montage. Loccasion de retrouver le regretté Leslie Cheung, tête daffiche de ce film, qui a connu les honneurs avec « Adieu ma concubine », Palme dOr à Cannes en 1993. A noter que « Les cendres du temps Redux » a été présenté en séance spéciale lors du Festival de Cannes 2008.
« Je tai toujours aimé, mais en secret. Ce que lon obtient pas nen devient que plus désirable »
Considéré (trop) souvent comme un cinéaste prodige, Wong Kar-Waï sest construit une uvre atypique et bien souvent déroutante. Après avoir connu une série de succès critiques et publics (« In the mood for love », « 2046 ») et une expérience américaine (« My blueberry nights », probablement son film le plus accessible), on pouvait légitimement être surpris de voir ressortir sur nos écrans une version remontée dun film vieux de près de quinze ans qui sétait soldé lors de sa sortie initiale par un échec. Et pour cause : malgré ce nouveau montage, « Les cendres du temps » reste un film totalement vaporeux et abscons. Car avec son scénario tenant sur un timbre poste et son récit très décousu, le film se perd en une soporifique histoire damour contrariée, à laquelle se mêle un obscur conte de sabre, vaguement inspiré de « La horde sauvage » de Peckinpah. Mélange étonnant, le film alterne nostalgie romantique et contemplative dun héros sentimentalement désabusé et des scènes de combats pour le coup visuellement assez laides. Découpés en segments correspondants aux saisons, le film nous offre donc cinq récits différents, durant lesquels le héros va faire des rencontres de personnages dont les histoires particulières lui permettront de se remémorer sa propre histoire. A ce jeu, seul le deuxième segment, celui du guerrier aveugle, savère vraiment émouvant, les autres étant souvent aussi incompréhensibles quennuyeux. Alors bien sûr, on reste envouté par le travail visuel du réalisateur, dont la beauté formelle reste la marque de fabrique. Les décors, aussi irréels et désolés que grandioses jouent un rôle prépondérant dans le film, magnifiés par lenvoutante musique et par une photographie magnifique dont découle une belle sensualité. Côté comédiens, malgré limpressionnant casting du film qui regroupe beaucoup de grands noms du cinéma hongkongais, on reste assez déçu par le niveau densemble (en particulier par Maggie Cheung et par le regretté Leslie Cheung). A lexception notable de Tony Leung Chui Wai qui se montre une nouvelle fois impeccable, apportant une subtile note de fragilité à son personnage. Mais ce remarquable écrin ne demeure au final quune boite vide : malgré sa beauté formelle évidente, « Les cendres du temps » savère être un film beaucoup trop abscons qui ne suscite que lennui.
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