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24 May

Les chansons d’amour

Publié par platinoch  - Catégories :  #Films musicaux

« As-tu déjà aimé pour la beauté du geste ? »

 

On connaît Christophe Honoré. On connaît le petit prodige du cinéma français à la réalisation inspirée. Et on sait également qu’il est capable du pire (l’odieux « Ma mère »), comme du meilleur (le très réussi « Dans Paris », belle surprise de l’automne dernier). Pour la première fois en compétition officielle à Cannes cette année, il présente son cinquième long métrage, « Les chansons d’amour ». Si le titre n’est pas trop accrocheur, en revanche, le film laisse une grande place aux chansons (toutes originales), interprétées par les acteurs eux-mêmes. Même si à priori je ne suis pas fan de ce genre de films, ceux-ci sont tellement rares en France que ma curiosité me poussait à aller le voir. Me voilà donc ce mercredi, jour de sa sortie nationale, vers 16h30 à l’UGC Odéon. Je ne savais pas encore à quelle sauce j’allais être mangé, ni que j’allais assister à l’un des plus gros gâchis de l’année. Explications.

 

Tout d’abord, je dois vous resituer l’histoire. On est dans Paris, Ismaël travaille dans un journal avec Alice, et est amoureux de Julie. Mais malgré les apparences, il s’agit bien d’un ménage à trois. Construit à la manière d’une pièce de théâtre, en trois actes, la première partie tend à nous exposer les tensions qui naissent dans ce couple hors normes. Jusqu’à la mort brutale de Julie. La seconde partie nous montre comment les protagonistes vivent ce deuil, souvent intérieurement, ainsi que leurs souffrances et le difficile retour à la vie. Enfin, la dernière partie s’attache à nous montrer la renaissance d’Ismaël, qui se laisse séduire par un jeune lycéen. Le tout pimenté de chansons d’amour.

 

« Content de voir que tu le vis bien Ismaël, ça nous porte tous »

 

Avant d’aller plus loin, je dois reconnaître une chose à Christophe Honoré : c’est un excellent réalisateur. Il m’en avait déjà convaincu avec son excellent « Dans Paris », et ce film n’a fait que confirmer ce que j’en pensais. Il a un sens du cadrage exceptionnel, choisit des mouvements de caméra qui semblent instinctifs et qui offrent une vraie fluidité dans l’image. Il filme avec une certaine vérité les êtres qu’il observe. En cela, il y a quelque chose de proche du cinéma de la « Nouvelle Vague » chez lui.

 

Maintenant, on a beau avoir du talent pour la mise en image d’un film, cela ne suffit pas pour faire des bons films. Il faudrait pour cela qu’il s’appuie sur un scénario solide, et non sordide, une histoire qui tienne un peu la route et dans laquelle on pourrait se reconnaître un petit peu, condition sans laquelle on ne peut être touché émotionnellement par le film. Car en cherchant des situations extrêmes et quelque peu irréalistes, par provocation ou par goût, il scie tout seul la branche sur laquelle il s’est assis. Du ménage à trois avec deux filles jusqu’à la résurrection du héros dans les bras d’un autre homme, on passe d’une situation extrême à une autre, grand écart assez improbable, qui finit par perdre et dérouter le spectateur. Et c’est vraiment dommage, car Honoré arrive parfaitement à filmer une certaine vérité dans l’expression des sentiments humains. Mais ses dérives scénaristiques laissent échapper trop fortement des relents puants de parisianisme où la culture bobo (dans ce qu’elle a de pire à offrir, stéréotypée, sans nuances, bloquée sur un système de pensée très branché et intello, et qui a force d’invraisemblances défendues sans pondération en devient agaçante). Sans parler des références constantes à un Paris toujours très intello et riche qui est en dehors de la réalité (le lycéen qui vit seul avec son frère dans un gigantesque appartement haussmanien, les déclamations en pleine rue d’Aragon et les bouquins classés intellos qu’ils lisent tous). Surréaliste.

 

« Aime-moi moins fort, mais aime-moi longtemps »

 

 Et c’est vraiment dommage car les chansons originales d’Alex Beaupain, sans être d’authentiques chefs d’œuvre, apportent un peu de légèreté à l’ensemble et s’incèrent parfaitement dans le film.

 

L’interprétation est, quant à elle, beaucoup plus inégale. Chiara Mastroianni est certainement celle qui nous émeut le plus, parfaitement juste dans toute sa douleur contenue. Mais son personnage n’est pas assez fouillé et franchement bancal. A force de conviction et de talent, elle finit par réussir à le porter à bout de bras. L’autre surprise vient de la jeune Clotilde Hesme, inconnue jusque là et qui là encore arrive à faire vivre un personnage assez ingrat et pas assez fouillé. Les revenants et trop rares Jean-Marie Winling et Brigitte Roüan jouent juste mais apparaissent finalement assez peu. La déception vient certainement de Ludivine Sagnier, qui semble passer totalement à travers. Ceci dit son personnage meurt après vingt minutes de film pour ne plus apparaître que de loin le temps d’une chanson. Le jeune Grégoire Leprince-Rinquet ne sera pas la révélation du film. Il joue aussi mal qu’il chante. Reste le cas Louis Garrel. Je ne peux pas dire qu’il joue mal, loin de là même. Mais il y a dans sa présence quelque chose de très dérangeant je trouve. Un côté assez pédant qu’il met trop en valeur, comme lorsqu’il cabotine à mort dans sa scène de grimaces à la table de sa belle-famille.

 

Pour conclure, Honoré nous livre un film très personnel, probablement le plus gros ovni et le plus gros gâchis cinématographique de l’année. Car le pire c’est que son film avait du potentiel. Cette histoire d’amour arraché par la mort aurait du nous bouleverser. D’autant que la mise en scène fluide et aérienne et les fameuses « chansons d’amour » étaient à la hauteur pour mener à bien le projet. Mais des choix scénaristiques incohérents et incompréhensifs et des personnages mals dessinés finissent par plomber définitivement le film. Comme si Honoré se tirait tout seul une balle dans le pied. Vraiment dommage. On mettra une étoile (sur les quatre autorisées) car sa mise en scène est toujours aussi belle, et que la musique n’était pas désagréable non plus, mais ça ne vaut pas plus.



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T
Je te conseille de regarder "les amants réguliers" et tu verras que la belle clothilde n'est pas si inconnue que ça.
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F
Oh oh oh !!! Voilà un vilain article !!! (rires)<br /> C'est bizarre, j'en pense tout le contraire... Je l'ai vu 4 fois, et j'ai marché à tous les coups. Je n'attends plus que la sortie DVD, pour me replonger dedans encore et encore...
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B
Voilà de la critique digne d'un professionnel. N'ayant pas vu le film, et aucune envie d'aller le voir, J'admire tous les efforts pour défendre le réalisateur et son film malgré tous les aspects négatifs sans ommettre les qualités. C'est une analyses que j'aimerais pouvoir lire plus souvent dans la presse. Pasionné, aérien, sans conssession, honnete et impartial. Super !
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Le site sans prétention d'un cinéphile atteint de cinéphagie, qui rend compte autant que possible des films qu'il a vu!