Crimes à Oxford
« Le philosophe a délimité le champs de la pensée. Avec cette énigme : « Connaissons-nous la vérité » ? »
Martin, un jeune étudiant en mathématiques, vient étudier à Oxford. Passionné de logique et de philosophie, il rêve que le professeur Seldom, célèbre mathématicien soutenant que la vérité nexiste pas, lencadre dans ses recherches. Malheureusement pour lui, le professeur, désormais entièrement voué à ses conférences et à ses livres, nest pas accessible. Pourtant, grâce au hasard, les deux hommes vont se retrouver réunis sur les lieux de lassassinat de la logeuse de Martin, une amie de longue date du professeur. Rapidement, dautres meurtres ont lieu dans la ville, le criminel laissant derrière lui comme indices les éléments dune énigme complexe. Voyant là loccasion de se rapprocher de celui quil admire tant, Martin décide daider Seldom à mener cette enquête et à résoudre cette énigme
« Aucune vérité absolue ne peut être démontrée sans mathématiques : la philosophie est donc morte »
Adaptation cinématographique du roman « Mathématique du crime » signé de largentin Guillermo Martinez et publié en 2003, « Crimes à Oxford » est le premier film en langue anglaise pour le réalisateur espagnol Alex De La Iglesia. Connu jusquici comme étant un spécialiste des films fantastico-gores teintés dhumour noir (on lui doit notamment « Le jour de la bête » et « Le crime farpait »), De La Iglesia change ici totalement de registre et sessaye aux genres du polar et du thriller. Un projet pour lequel le réalisateur na pas choisi la facilité, tant les thèmes du film, tournant autour des mathématiques et de la vérité absolue et démontrée, semblent peu glamours. Une gageure en soi, donc, dont le casting international semblait apporter une certaine crédibilité. A noter que Michael Caine et Jeremy Irons ont été longtemps pressentis pour le rôle du professeur Seldom, avant que celui-ci ne revienne à John Hurt. Pour la petite histoire, bien que le film soit censé se dérouler dans la ville dOxford, lessentiel du tournage a eu lieu dans la région de Londres, léquipe du film tournant à Oxford durant à peine huit jours.
« Le crime parfait nest pas un crime sans coupable, mais un crime attribué au mauvais coupable »
Bande-annonce et promotion efficaces, casting alléchant, ce « Crimes à Oxford » avait tout pour attiser la curiosité et sannonçait comme lun des films à voir du moment. Les premières minutes du film confortent dailleurs plutôt le spectateur dans cette impression, De La Iglesia arrivant à instaurer dentrée une ambiance assez mystérieuse et teintée dhumour dans ces décors trop vieillots, sages et trop bien rangés pour être honnêtes (tout le passage sur linstallation du héros dans la ville). Pourtant, très vite, le film se noie en dinterminables conversations de philosophie totalement absconses sur limportance du sens de la vie et de la vérité, ainsi que sur les théorèmes de mathématiques logiques, censés faire échos aux crimes. Ajoutons à cela des partis pris incompréhensibles, comme le fait que les meurtres soient perpétrés sur des personnages jusqualors inconnus, et le récit se retrouve frappé de plein fouet du syndrome « Agatha Christie », à savoir quil propose une énigme façon cluedo très convenue et prévisible, inutilement complexe et lourdingue, manquant cruellement de punch, le tout pour en arriver à dénouement incroyablement simpliste et prévisible, digne dun éléphant accouchant dune souris. Ce constat est dautant plus dommage que le réalisateur réussit par ailleurs à construire toute une matrice de fausses pistes, brouillant assez bien les cartes et les idées des spectateurs. Mais là aussi le bât blesse, De La Iglesia étant incapable de mener de front lensemble de ces pistes, la plupart étant abandonnée en cours de route et sans explications (létudiant russe disparaît finalement de la circulation sans quon en sache plus). Tiré par les cheveux, télescopé dans ses rebondissements, boursoufflé, le scénario du film, inutilement complexe et un poil pénible, demeure beaucoup trop maladroit pour convaincre et constitue le défaut principal du film.
« Il ny a quune vérité absolue : tout est faux »
Derrière, De La Iglesia assure lessentiel côté mise en scène, jouant parfaitement des décors vieillots et cosys de la vieille Angleterre pour distiller une ambiance à la fois mystérieuse et un peu pesante, parfaitement adaptée au récit. Ses mouvements de caméra parfois nerveux et ses cadrages serrés finissant de construire cette ambiance. Mais le grand point fort du film, cest surtout ses interprètes. Très bien dirigés, ils sauvent à eux seuls le film de lennui total. John Hurt trouve ici un rôle taillé sur mesure de vieux professeur cynique et sans illusions, doté de quelques reparties qui vont comme un gant au jeu très théâtral de ce grand comédien. Face à lui, le lumineux et enthousiaste Elijah Wood, apporte toute sa fraicheur et sa candeur à son personnage, qui contrebalance parfaitement celui de Hurt. La sublime Leonor Watling vient compléter laffiche, apportant son charme vénéneux et sensuel. A noter également, dans un rôle beaucoup plus secondaire, la belle prestation inquiétante de Dominique Pinon. Dommage cependant que les réalisateurs ne sachent pas exploiter son extraordinaire palette, se bornant à lui proposer uniquement des rôles de salaud de service, toujours inquiétants, sur la seule base de sa « gueule » hors norme. Si la performance des comédiens permet dassurer lessentiel et de sauver le film, De La Iglesia, pour sa première expérience en anglais, réalise cependant un film décevant et inégal. Tarabiscoté, prévisible et lourdingue, le scénario ne parvient non seulement jamais à convaincre, mais peine également à retenir lattention. Très moyen et assez dispensable !
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