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17 Dec

A la croisée des mondes: la boussole d'or

Publié par platinoch  - Catégories :  #Science-Fiction-Heroïc Fantasy

« Le Magisterium est essentiel. Il dit aux gens quoi faire et quoi penser »

 

Quelque part existe un monde parallèle ressemblant au notre. Un monde où les humains vivent avec leur « daemon », animal de compagnie avec lequel ils ne font qu’un et qui est une représentation de leur conscience et de leur esprit. C’est dans ce monde que vit Lyra, jeune orpheline de 12 ans, placée dans un pensionnat par son oncle, scientifique et explorateur, l’intrépide Lord Asriel. Rebelle et insoumise, la fillette mène une vie de garçon manqué, loin des rumeurs et des manœuvres politiques du Magisterium, sorte d’organisation gouvernementale autoritaire et fascisante, qui resserre son emprise sur la société, et dont on dit qu’il fait enlever des enfants à de sombres fins scientifiques. Mais alors qu’elle est confiée malgré elle à la mystérieuse et dangereuse Miss Coulter, Lyra apprend la disparition de son meilleur ami, Roger. S’échappant de sa prison dorée, Lyra décide donc de partir à la recherche de son ami…

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« Le sage sait qu’il faut mieux ignorer certaines choses. Il est des sujets dont on ne parle pas »

 

Fort du succès de la trilogie du « Seigneur des anneaux » (Jackson – 2001), qui avait relancé l’intérêt cinématographique pour le genre de l’heroïc fantasy, s’est développé en parallèle un sous-genre, celui de l’heroïc fantasy pour enfants. Inspirés principalement de la littérature d’aventures enfantine, ces films bénéficient souvent de budgets et de moyens techniques colossaux tant le potentiel public est important, et ont fini par écraser totalement le genre. En attestent les succès des sagas en cours « Harry Potter », « Narnia », et des autres films plus ou moins réussis et rentables tels que « Stardust » (Vaughn – 2007), « Les portes du temps » (Cunningham – 2007), « Eragon » (Fangmeier – 2006), ou encore « Les secrets de Terabithia » (Csupo – 2007). Cette nouvelle franchise est une adaptation de la saga littéraire multiprimée de Philip Pullman, « Les royaumes du nord », dont les différents romans qui la composent sont parus entre 1995 et 2000. Le projet de cette adaptation a été lancé par le réalisateur Chris Weitz ("American Pie", "Pour un garçon"), fan de la première heure de ces romans, et qui a signé également l’adaptation scénaristique, travail qu’il a réalisé dans le grand nord Norvégien où il a voulu s’imprégner au maximum du paysage qui deviendra le décor principal du film. Si le film annonce le début d’une trilogie, les épisodes suivants ne seront mis en chantier qu’en cas de succès de ce premier volet. En effet, produit par la même équipe que la saga du « Seigneur des anneaux », ce film bénéficie d’un budget pharaonique de 180 millions de dollars, soit deux fois le budget du premier volet de la saga de Peter Jackson « La communauté de l’anneau » (doté « seulement » de 93 millions de dollars de budget). De quoi faire de ce « A la croisée des mondes : la boussole d’or » le blockbuster des fêtes de fin d’année.

 

« Tu rejoins toi aussi ce combat perdu d’avance ? »

 

Malheureusement, « A la croisée des mondes : la boussole d’or » prouve qu’un budget phénoménal ne suffit pas pour faire un grand film. Loin de là. La faute en premier lieu à un scénario manquant cruellement d’originalité. Entre l’horripilante gamine intrépide, orpheline en pensionnat (« Harry Potter », « Narnia »), la maléfique magicienne (issue tout droit de « Harry Potter », « Stardust » ou de « Narnia »), la véritable nature des parents de Lyra (« Star Wars »), l’ours roi qui a été banni de son trône (comme Aragorn, du « Seigneur des anneaux »), ou le pirate des airs (« Stardust »), tout ici semble déjà archi vu et rabâché. Du coup, ce n’est pas cette trame de fond des enfants qu’on enlève pour pratiquer des expériences sur eux (« La cité des enfants perdus »), ni cette guerre larvée entre Magisterium et minorités résistantes et rebelles (« Le seigneur des anneaux », « Star Wars », « Harry Potter »), ni l’usage grotesque, peu expliqué et peu spectaculaire de la boussole d’or, qui apportent un peu de piment à cette histoire. Sans compter cette fin tronquée, appelant dans le meilleur des cas une suite, qui n’arrange rien à l’affaire. Tout juste ces éléments sont-ils bons à prouver que Pullman et Weitz ont des références, et qu’ils ont su platement les recoller les unes aux autres pour créer de toutes pièces une histoire en forme d’énorme plagiat sans intérêt et sans saveur. Et également sans maîtrise du rythme, le film souffrant de grands passages à vide, et ses deux heures semblant ainsi parfaitement interminables.

 

« J’aurais honte de faire preuve de moins de courage que la petite. Je ne veux plus vivre dans la honte »

 

Si le fond de ce film sonne particulièrement creux, sa forme est quelque peu décevante également, surtout compte tenu de son budget phénoménal. Bien sûr, on reconnaîtra la qualité des animations de l’ensemble, les animaux (daemons) étant particulièrement réussis. A un degré moindre, les ours semblent quand même tout droit sortis d’une pub pour coca-cola datant d’il y a quelques années. La photographie est aussi un grand point de satisfaction de ce film. Cependant, d’autres effets semblent un peu cheap, comme la bataille finale, où le nombre de figurants a été réduit au minimum syndical, ou encore les scènes de visions via la boussole, dont la laideur n’est pas sans rappeler les ennuyeux délires shamaniques du « Blueberry » de Kounen. Côté interprétation, on reste là aussi sur notre fin. La jeune héroïne Dakota Blue Richards, à l’instar du daemon de Miss Coutler, fait figure de petit singe savant insupportable. A ses côtés, malgré les nombreuses stars qui composent le casting, c’est la Berezina. A l’exception d’un Daniel Craig énigmatique et sobre (hélas, il n’apparaît que dix minutes à l’écran), les autres comédiens sont dans les choux : Nicole Kidman en fait des caisses dans le battement de cils machiavélique, et son cabotinage vite insupportable ne trouve d’égal que la monocorde voix de Ian McKellen (Gandalf dans le « Seigneur des anneaux ») qui prête ses cordes vocales à l’ours. Le fade Sam Elliott souffre quant à lui de la comparaison avec le personnage similaire et déjanté de pirate de l’air interprété par De Niro dans le récent « Stardust ». Enfin, Eva Green se fait massacrée par l’horrible réalisation de Weitz (et pour la rendre laide, il faut vraiment y aller de bon coeur!). On regrettera également que les apparitions de Christopher Lee et Simon McBurney se limitent à de l’anecdotique. Sans doute leurs personnages seront amenés à être développés dans une éventuelle suite.

 

« On réglera tout. Qu’ils essaient seulement de nous en empêcher »

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 Au final, « A la croisée des mondes : la boussole d’or » est le prototype même du film raté et inutile. Raté parce qu’il ne captive jamais les spectateurs, tant par l’inertie et le peu d’intérêt de son intrigue, que par les aberrants oublis scénaristiques (qu’est-ce que la poussière ?) que se permet le réalisateur pourtant menacé de ne pas voir se réaliser sa trilogie. Inutile parce que le film ne propose rien de nouveau, ne réinvente pas un genre déjà usé jusqu’à la corde ces dernières années. Tout juste se contente-t-il de reprendre en moins bien ce que les autres ont déjà fait avant. Si on ajoute à cela la calamiteuse interprétation générale, ne reste que la qualité visuelle de l’ensemble pour sauver le film. Un joli écrin en forme de coquille vide pour l’un des plus mauvais films de l’année.

     



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S
Evidemment, au-delà d'être un film merdique, ce film est une adaptation honteuse de l'oeuvre de Pullman. Ils ont tronqué la fin, américanisé le propos, walt disneyisé le tout pour rendre cela grand public et mièvre. Bref, c'est une des belles daubes de l'année 2007.
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P
Je confirme: ils ont poussé le vice jusqu'à faire l'impasse sur ce passage. ATTENTION SPOILER: le film se termine par la libération de Roger par Lyra et ses amis les gitans, et la dernière scène voit Lyra et Roger repartir avec le bateau volant de Lee Scoresby...<br /> <br /> Peut-être ont-ils décidé de ne pas faire correspondre l'histoire à un tome entier de Pullman, et ce pour des raisons commerciales (n'étant pas sûr que le film serait rentable, et qu'ils feraient les suites, peut-être y'a-t-il une logique à faire finir ce volet sur une sorte de "happy end"). Mais de manière générale, la tonalité du film étant résolument adaptée pour les enfants, les producteurs prendront-ils le risque de mettre une telle scène dans le prochain épisode?<br /> <br /> Dommage de ne pas respecter la trame du livre original, d'autant qu'avec ce que tu nous en dis, il semble évident que la trilogie de Pullman ne corresponde pas à la mièvrerie de ce film.
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A
J'avoue que j'ai été un peu dure dans mon commentaire, mais c'est vrai quand critiquant "la trame" ça revenait à critiquer le récit du livre... Je suppose que le film doit vraiment être mauvais, et n'a pas su mettre en valeur l'idée originale du Pullman, et c'est bien dommage. Du coup, si Le Seigneur des Anneaux avait donné envie aux fans du films de lire le livre, là, ce serait un désastre si des gamins de 6 ans lisaient A la croisée des mondes, car ils ne sont pas du tout de leur âge. Il faudrait avoir bien 12 ans pour commencer à pouvoir les lire. Al'inverse, des gens que ça pourrait intéresser ne les liront pas, par dégoût du film...<br /> Je le louerai peut-être pour voir l'étendu des dégats lorsqu'il sortira en DVD, mais je pense que je ne l'achèterai pas... Voit-on que Lord Asriel tue Roger à la fin du film ? Ou leur censure est allée jusqu'à "cacher" ce détail très important dans le roman ? puisque la décharge d'énergie de sa mort (en étant séparé de son daemon) ouvre un passage vers un monde parallèle et permet d'enchaîner sur la suite de l'histoire...
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P
Je ne crois pas avoir "éclaboussé l'oeuvre de Pullman avec le venin de mon ignorance et de mes préjugés", en avouant volontiers ne pas avoir lu le livre. Je n'ai jamais non plus émis de doute quant à sa qualité littéraire.<br /> <br /> Pour autant, je livre des faits qui me semblent subjectivement implacables, à savoir que ce film est une énorme plantade, calibré en effet pour un public d'enfants ou de fans attardés des films d'Harry Potter. <br /> <br /> Pour répondre à ta remarque, l'héroïne n'est jamais en effet montrée en train de fumer, ni de faire quoi que ce soit de franchement réprhensible d'ailleurs, si ce n'est de se cacher dans un placard et écouter une conversation secrète. Définitivement, je crois que Weitz est passé à côté de son film...
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A
Je n'ai pas vu le film, donc je ne pourrai pas parler de sa réalisation, par contre une chose est certaine : La trilogie en livre est Fantastique ! Et contrairement à ce que semble être le film CE N'EST PAS DU TOUT POUR LES ENFANTS ! Psychologiquement, il y a beaucoup de choses insupportables pour les enfants dans les romans qui du reste, ne leur sont de toute façon pas adressés... Alors qu'ils aient raté le film en voulant le SIMPLIFIER à la Walt Disney ou autre en fait certainement un "ratage cinématographique" mais la trame et les motivations et caractères des personnages des Bouquins sont loin d'être des "clichés" et si vous y voyez des rapports avec d'autres choses, ils sont utilisé de manière originale et unique. <br /> Je suppose que dans le film on ne voit pas "Lyra FUMER UNE CLOPE" et oui dans le bouquin c'est une sale gosse et elle passe son temps à mentir, à faire des coups en douce, et les adultes sont souvent des êtres attirés par le pouvoir, sans scrupule ni sentiment, et des personnages qu'on croyaient bons trahissent pour leur "opinion personnelle" ou se vendent au plus offrant, alors non, ce n'est pas pour les enfants, les héros sont juste des enfants confrontés aux "saletés" du monde des adultes. Avant de critiquer prenez une semaine de votre vie pour lire cette trilogie fantastique, au lieu d'éclabousser les oeuvres de Philip Pullman du venin de votre ignorance de vos préjugés. Merci.
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P
Pour ma part je suis tout a fait d'accord avec les uns et les autres. Je m'explique : le film est terriblement mauvais, comme souvent lorsqu'il s'agit d'adaptation d'un livre. Mais effectivement en le critiquant il ne faudrait pas dénigrer les romans qui eux sont puissants. Exemple regardez les Harry Potter ça n'a quand même rien à voir avec les romans de JK, même si c'est moins mauvais que ce film ci. Bref pour ceux qui n'ont fait que voir le film, critiquez tant que vous voulez mais ne dénigrez pas Pullman je vous prie. Et enfin, s'il vous plait, si vous êtes amateurs du genre, lisez les bouquins, pour moi il dépassent HP et ce n'est pas peu dire!! Et effectivemnt on y a une réflexion et une critique de l'Eglise intéréssantes pour le moins.<br /> Vive Pullman et tant pis pour le cinéma!
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M
J'aime beaucoup tes comparaisons avec les différents films. Il est vrai que A la croisée des mondes ne réinvente pas du tout le genre et que les "grands" acteurs sont presque des figurants (que vient faire Christopher Lee pendant 2 minutes, lui a t-on coupé son rôle au montage ? Sans aucun doute). La jeune actrice est totalement énervante et tout semble trop facile. Il n'y a pas vraiment de suspense, tout est fait pour que les enfants se régalent (oh, y'a que les méchants qui meurent, to bad) sans penser qu'il y a aussi des plus grands dans la salle. En tout cas, c'est une déception, avec tout le tapage médiatique et tout le reste... Aucun film ne semble pouvoir égaler le seigneur des anneaux ! Le pire, c'est que ce film va marché il qu'il y aura des suites... A savoir si elles, elles marcheront...
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B
Pour ma part, face au bleu sombre du film, face à l'ineptie totale du film, je me suis proprement et sombrement endormi. Rarement, puissante léthargie s'est emparée de moi au cinéma. Cest dire ce que ça m'évoque mais Ô combiens révélateur.
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S
J'ai lu le livre et en effet le film est une adaptation ratée, laissant de côté tout ce que le livre avait d'original et de philospophique pour en faire en effet un banal film d'heroic fantasy enfantin et bâclé. Une grosse déception.
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P
Sur un plan uniquement cinématographique, en faisant abstraction des livres qui les ont inspirés, difficile quand même de ne pas comparer ces films d'héroic fantasy qui se ressemblent en bien des points, tant dans la forme que dans le fond. La saga littéraire originale a été multiprimée, et sans l'avoir lu, je ne doute pas de ses qualités. Maintenant, peut-être l'adaptation ciné n'est-elle pas à la hauteur du livre, car on ne peut pas franchement parler de reflexion philosophique dans ce film, qui se limite à la désormais simpliste et traditionnelle opposition manichéenne entre un Bien et un Mal...
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