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31 May

La disparue de Deauville

Publié par platinoch  - Catégories :  #Films noirs-Policiers-Thrillers

« Pensez-vous qu’on puisse mourir d’amour, lieutenant ? »

 

Cinq années se sont écoulées depuis la première réalisation de Sophie Marceau, « Parlez-moi d’amour », en 2002. « La disparue de Deauville », son deuxième passage derrière la caméra, était donc attendue depuis un petit moment déjà. Tourné semble-t-il dans un certain anonymat médiatique, à moins que l’équipe ai préféré garder le projet plutôt secret, c’est avec surprise qu’on nous a annoncé la sortie de ce film comme étant un « polar Hitchcockien ». Car le moins que l’on puisse dire, c’est que Sophie Marceau rebondit de plus en plus là où ne l’attend pas. Il faut dire qu’après une série d’échecs cuisants (« Belphégor », « Je reste ! », « A ce soir »), aussi bien publics que critiques, elle n’avait pas d’autres choix que de tenter de nouveau de surprendre son public. Et la voilà donc qui se lance dans l’univers du polar et du thriller. Avec un projet aussi inattendu en guise de seconde réalisation, et en plus une critique à l’unisson négative, il était certain que je devais me faire une opinion par moi-même !!! Impressions.

 

L’Histoire :

 

Normandie. Jacques, un flic dépressif et insomniaque, proche de la folie, termine sa nuit de boulot. Une femme, au look mystérieux des égéries cinématographiques des années 40-50, l’attend dans sa voiture pour lui demander d’enquêter personnellement sur la disparition d’un homme. Ce dernier étant le propriétaire d’un palace à Deauville, Jacques finit par voir que les renseignements donnés par sa mystérieuse inconnue se révèlent exacts, et mènent à la mort dans la région d’une actrice célèbre, en 1970, qui ressemble traits pour traits à ladite inconnue. Guidé par sa conviction mais lâché par sa hiérarchie, et considéré comme dépressif à côté de ses pompes par ses collègues qui ne croient pas du tout en son histoire d’inconnue, Jacques doit donc jouer seul contre tous pour mener à bien une enquête, définitivement pleine de rebondissements…

 

« Je me demande qui était cette femme…Elle ressemblait à ces femmes d’autrefois »

 

Dès les premières minutes du film, on se rend compte de l’évidence de la référence aux films hitchcockiens. Sophie Marceau en a repris la plupart des codes, notamment pour l’atmosphère, très froide et impersonnelle, tant du palace de Deauville que pour ses prises de bord de mer en plein hiver et pour les scènes dans la ville du Havre, une des plus froide qui soit (désolé pour nos amis havrais qui seraient de passage sur ce blog, je n’ai rien contre Le Havre…mais c’est vrai !). Il en va de même dans le choix de l’éclairage, dont la dominante est assez sombre, que dans la construction du personnage principal, finalement assez anti-héros, bourré de fêlures, et franchement solitaire. Enfin, la référence se sent surtout dans les rebondissements de l’histoire, autour des secrets de familles cachés, où les personnages ne sont jamais vraiment ceux qu’ils veulent nous faire croire.

 

Le seul vrai problème de ce film, c’est que n’est pas Hitchcock qui veut, et qu’il ne suffit pas de reprendre ses codes pour réussir. Tout est sûrement une question de proportions. Le film de Marceau pèche par excès. En effet, son histoire est extrêmement décousue, les enjeux de l’enquête tellement compliqués pour finalement accoucher d’une souris, que le spectateur est vite largué. D’autant qu’en voulant créer une atmosphère froide, assez peu bavarde, pour laisser la place au mystère, le film en devient profondément bancal et jamais réellement captivant. La construction des personnages ne me semble pas à ce titre vraiment aboutie non plus : le héros, tellement dépressif et à la limite de la folie n’est pas crédible dans son rôle de flic, Sophie Marceau, en belle inconnue, plane comme une présence improbable, et les seconds rôles ne sont qu’anecdotiques puisqu’ils ne sont jamais vraiment fouillés ni existants. Ce qui est très dommageable puisque ce sont eux qui portent les rebondissements et les dénouements. Enfin, ses choix scénaristiques sont discutables, la vraie-fausse disparition du vieux propriétaire du palace n’est pas très originale, d’autant que sans tellement créer d’enjeux autour de cette disparition, elle n’en est jamais captivante, et les rebondissements, tous improbables, des secrets familiaux, en passant par la double vie des uns et les dérives incestueuses des autres, ne parviennent jamais à entraîner le spectateur dans un climat angoissant.

 

« -    Trente six ans que mon père vit avec une morte. Vous comprenez ça, vous ? 

-         Oui. »

 

Du point de vue de la forme, on pourra également critiquer les choix de mise en scène de Sophie Marceau. Elle ne parvient jamais vraiment à imposer un style qui lui serait propre, se contentant par moments d’opter pour des effets de caméra assez cheaps, comme ses espèces de ralentis saccadés qui ne sont pas du meilleur effet. A sa décharge, le jeu des acteurs n’est pas non plus tellement au rendez-vous. On a connu Christophe Lambert plus inspiré, même s’il ne s’en sort pas si mal, compte tenu de son personnage très caricatural. Du côté des (plutôt) bonnes performances, on pourra également citer Simon Abkarian en collègue compréhensif, ainsi que Judith Magre, Laure Duthilleul, et Marie-Christine Barrault dans des petits rôles. A l’inverse, Nicolas Briançon, manque de sensibilité et de finesse dans son jeu alors qu’une partie du dénouement pèse sur lui. De même Marilou Berry et Robert Hossein sont en deçà de leur niveau habituel. Mais finalement la plus grosse déception vient peut-être de Sophie Marceau elle-même. Si sa beauté crève une nouvelle fois l’écran, en revanche, son jeu ne convainc jamais réellement. Son look très années 40-50 est en décalage avec la star de la fin des années 60 qu’elle est censée interpréter. Elle manque également d’évanescence et de charisme pour jouer ce personnage de femme fatale mystérieuse qu’elle a écrit pour elle-même, se contentant de mettre en avant sa beauté naturelle.

 

Au final, cette « Disparue de Deauville » apparaît comme un film un brin brouillon, et franchement bancal. L’idée de faire un film de genre, un vrai film noir, était pourtant une bonne idée. Son scénario aurait même pu être pas si mal si elle avait éviter les pièges des rebondissements familiaux excessifs  digne des sagas de TF1. On regrettera notamment le manque de lisibilité dans les enjeux de l’enquête, ainsi que le manque de profondeur dans le traitement des personnages. En outre, pour un thriller, ce film manque cruellement de tensions, et plus que tout, les apparitions de cette femme mystérieuse, dont on ne sait pas par moments si elle est réelle ou de l’ordre du fantasme, ne sont jamais accompagnées de cette ambiance d’évanescence ou d’onirisme qui aurait dû donner une atmosphère singulière à ce film.

Néanmoins, elle livre un film plutôt honnête, durant lequel on ne s’ennuie pas. On peut même souligner que quelques scènes très réussies comme celle où Christophe Lambert se perd dans la voilure des rideaux à la poursuite de l’apparition de cette femme.

Sans être réellement un navet, cette deuxième réalisation de Sophie Marceau laisse quand même un grand goût d’inachevé.



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B
Un peu excessive la critique ? Pour ma part, je ne diris pas que c'est une daube. Il est vrai qu'il manque un petit quelque chose pour que ce soit totalement réussi. Pour autant, loin de s'ennuyer, on se laisse guider dans cette histoire loufoque, parfois même in ri de bon coeur, notemment avec la course poursuite en smart. Il y a un petit côté Rouletabille dans l'ambiance et dans le côté surréaliste des personnages et des situation. Plutôt Podalidèssien qu'hitchockien, voir un mélange des deux, ou tuit simplement marceauien ?
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