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02 Feb

Invictus

Publié par platinoch  - Catégories :  #Films Politiques-Historiques

« Le passé c’est le passé. Nous regardons vers l’avenir. »

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En 1994, l'élection de Nelson Mandela consacre la fin de l'Apartheid, mais l'Afrique du Sud reste une nation profondément divisée sur le plan racial et économique.

Pour unifier le pays et donner à chaque citoyen un motif de fierté, Mandela mise sur le sport, et fait cause commune avec le capitaine de la modeste équipe de rugby sud-africaine. Leur pari : se présenter au Championnat du Monde 1995...

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« Le pardon libère l’âme. Il la délivre de ses peurs. »

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Avec une moyenne d’un film par an, le vieux Clint Eastwood prouve qu’il n’a rien perdu de son inspiration et de son envie de faire du cinémaSurtout, au fil de ses films, celui-ci fait montre d’un humanisme insoupçonné, à l’opposée de l’icône virile, machiste et conservatrice qu’il fut dans les années 70 et 80. Qu’il s’agisse de replacer l’homme et ses souffrances au cœur de l’absurdité de la guerre (son diptyque sur la bataille d’Iwo Jima), de faire preuve de compassion en ayant recours à l’euthanasie (« Million Dollar Baby ») ou d’appeler à la tolérance et brocardant racisme et communautarisme (« Gran Torino »), Eastwood dégage en vieillissant une sérénité absolue, comme s’il avait exorcisé ses vieux démons. Il signe avec « Invictus », son trentième long métrage, un improbable et inattendu portrait de Nelson Mandela, œuvrant à la réconciliation de son pays par le biais de la coupe du monde de rugby 1995. Son premier biopic s’inspire d’un livre de John Carlin (« Playing the ennemy : Nelson Mandela and the game that made a nation »), relatant la relation entre Mandela et le capitaine des futurs champions du monde de rugby sud-africains, François Pienaar.

« Merci aux dieux, quels qu’ils soient, pour mon âme indomptable. Je suis le maitre de mon destin. Je suis le capitaine de mon âme. »

La politique est faite de symboles. Le stratège politique Nelson Mandela, alors tout juste élu premier président noir de l’Afrique du Sud post-apartheid, en sait quelque chose. Car en dépit des évènements, les mentalités restent souvent difficiles à changer. Pas facile en effet d’oublier des décennies de haines, de rancœurs, de racisme, d’injustices et de violences qui ont opposé et déchiré les populations blanches et noires. Par soucis de cohésion sociale, il lui fallait donc à tout prix trouver un évènement fédérateur qui puisse susciter la naissance d’un sentiment d’unité nationale. Ce sera la coupe du monde de rugby, organisée en 1995 par les sud-africains. Le pari était risqué, le rugby (sport des « colons » anglais et très largement universitaire) étant considéré par les populations noires comme le sport des blancsLa première partie du film de Eastwood, concernant la prise de fonctions de Mandela et le détournement de l'évènement sportif à des fins politiques s’avère ainsi des plus intéressante, d’autant qu’elle est ponctuée d’anecdotes et de saynètes plutôt cocasses (la rivalité des gardes du corps noirs et blancs notamment). Et puis peu à peu, le film délaisse Mandela au profit de la compétition elle-même. Et si on doit reconnaître qu’Eastwood filme plutôt bien les matches en plaçant sa caméra au cœur de la mêlée (encore qu’il abuse jusqu’à l’écœurement des ralentis pour la finale !), son film s’embourbe cependant assez vite dans un torrent de poncifs et de bons sentiments frôlant bien souvent le ridicule. A l’image de cet enfant noir porté sur les épaules d’un policier blanc pour fêter la victoire des sud-africains. Ou de celle des joueurs de l’équipe nationale, tous blancs et racistes, fraternisant lors d’une séance d’entraînement avec les enfants d’un township. Grotesques, ces images le sont véritablement. Car à ce jour, le racisme et les tensions entre blancs et noirs existent toujours. Les inégalités persistent également. Sans vouloir juger les intentions du réalisateur, sa fable (très) naïve et trop simpliste vire donc malgré elle dans une forme de malhonnêteté intellectuelle. Après une décennie sans fausse note marquée par l’enchainement des succès, Clint Eastwood ne parvient pas ici à transformer l’essai. Dommage, car le sujet était ambitieux et potentiellement passionnant.

  



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C
j'en pleurerai presque snif
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L
Malgré une tendance à tomber dans le too much des bon sentiments, et certaines scènes qui frôlent ( ? ) le ridicule, et qui m'ont bien fait marrer ( notamment les bruitages des scènes de rugby au ralenti !!! ) Invictus à tout ce qu’il faut là où il faut : Divertissant, émouvant, humaniste, superbement interprété, fluide, avec une jolie morale… Bref, efficace comme divertissement. Personnellement, je n'en attendais rien, donc j'ai plutôt été agréablement surprise.<br /> Amicalement,<br /> Delphine.
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C
Pour andika : il ne faut pas confondre la critique cinématographique et l'analyse historique. Les bons sentiments ne font pas les bons films. La nécessité du pardon : oui. Le film est mauvais : oui, aussi.<br /> Je serais plus dur que Platinoch sur la façon dont le rugby est filmé, il l'est très mal comme je le détaille sur mon blog.<br /> Et pour être précis, l'histoire de la Coupe du Monde est revue à l'avantage de l'Af Sud (les essais refusés à la France, les All blacks qui tombent tous mystérieusement malades avant la finale, etc... certains blogs rappelle en détail la vérité de l'histoire sportive).
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T
Je n'irai pas voir ce film ...
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P
Je partage ton avis sur ce qui est de l'importance du pardon ainsi que sur la capacité de Mandela a éviter une guerre civile ou l'éclatement de son pays. <br /> Pour autant, il ne faut pas non plus se voiler la face. En 1995, même après une victoire en coupe du monde, aucun policier blanc ne s'est mis à porter sur ses épaules des enfants noirs. Les joueurs de l'équipe de rugby sont également montrés lors d'une séance de fraternisation avec les enfants d'un township alors que Chester Williams (seul joueur noir de l'équipe) a toujours dit qu'il avait été marginalisé au sein du groupe ou beaucoup ne lui adressaient même pas la parole...<br /> Si la coupe du monde a pu fédérer blancs et noirs autour de la même idée d'une nation, elle n'a pas balayé le racisme pour autant. La situation a certainement un peu évolué depuis pour autant, les ghettos n'ont jamais vraiment disparus, les noirs étant toujours les plus pauvres pendant que les blancs tiennent l'économie. En soi, ce que je reproche à Eastwood, c'est son discours trop simpliste, manquant cruellement de nuances. <br /> Sur la forme, j'avoue aussi que la - trop longue - finale entièrement filmée au ralenti, m'a un peu gavé également.
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A
Bons sentiments justifiés!Bon si je me réfère à la première partie de ton texte, je constate que tu n'es pas passé à côté du film, néanmoins, tu reproche l'abondance de bon seniments? Mais laisse moi te poser une question. Est ce que l'Afsud a basculé dans la guerre civile? Est ce que l'Afsud a reccommencé de quelque manière que ce soit à être un pays rasciste? Non je ne le pense pas! <br /> Ce pays s'est formé sur des torrents de bons sentiments, avec en premier lieu le pardon, qui était l'œuvre des comités de réconciliation! combien de tortionnaires n'ont pas été condamné après l'apartheid... beaucoup malheureusement, mais les bons sentiments, c'est un sacrifice à faire pour avoir une avenir un peu moin obscur...
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B
Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil... c'est oublié en effet la réalité des choses et des gens. Cette fable va l'encontre du message de respect et de tolérance des uns envers les autres. C'en est tellement ridicule que ça gache toute la portée du film, qui a plus d'une demi heure de trop également. Film des plus que moyens. Vraiment dommage...
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Le site sans prétention d'un cinéphile atteint de cinéphagie, qui rend compte autant que possible des films qu'il a vu!