J'irai dormir à Hollywood
« Quand rien nest prévu, tout est possible »
Il s'appelle Antoine de Maximy et a décidé de conquérir les Etats-Unis : ses routes à pertes de vue, ses paysages grandioses, ses mythes en cinémascope, ses villes immenses, ses communautés, ses stars hollywoodiennes, ses anonymes...
D'Est en Ouest, notre voyageur filmeur prend la route. A pied, en stop, en taxi, en bus, à vélo et même... en corbillard ! New York, Miami, Nouvelle-Orléans, Las Vegas... En ligne de mire : Hollywood, où il espère se faire inviter chez une star pour la nuit !
Au hasard du chemin, il va croiser des hommes et des femmes, chacun révèlera sans fausse pudeur, une part de lui-même. Tous ces portraits dessinent un visage aussi touchant que surprenant des Etats-Unis.
Le premier film de cinéma réalisé, filmé et interprété par une seule et unique personne !
« Des gens sympas il y en a partout. Il suffit de les trouver »
Féru de cinéma et de voyages, Antoine de Maximy nous propose depuis 2004 les carnets de ses aventures loufoques aux quatre coins du monde dans lémission au format court (52 minutes par épisodes) « Jirai dormir chez vous », diffusée par Canal+. Seul aux commandes, équipé de son drôle de matériel (trois caméras et deux micros attachés à son corps !), de Maximy part ainsi à la rencontre des gens avec son ton profondément décalé et loufoque. Pour loccasion de ladaptation de son émission fétiche en format long, Antoine de Maximy est donc parti seul, sans équipe de tournage, sillonner les Etats-Unis dest en ouest durant trois mois, avec lobjectif affiché de se faire inviter à dormir par une star hollywoodienne. Un drôle de voyage condensé en une centaine de minutes. Une gageur quand on sait que le documentariste a ramené plus de 300 heures de film !
« La pauvreté devrait pas exister dans ce pays, qui est à ce quon dit le plus riche du monde »
Pays de limage par excellence, avec notamment lusine à rêves hollywoodiennes qui inondent le monde de ses productions aseptisées ventant le modèle de lAmerican way of life, les Etats-Unis semblaient être le terrain de jeu parfait pour notre aventurier Antoine de Maximy. Et ce dautant plus que le 11 Septembre et la campagne anti-française développée en réponse au refus de la France de suivre les Etats-Unis en Irak étant passés par là, le parcours de notre héros sannonçait beaucoup plus mouvementé et difficile que prévu. Si on est tout dabord surpris par ce format à mi-chemin entre documentaire et téléréalité (il y a un peu de la « Carte au Trésor » dans cette manière de se filmer en action avec des caméras vissées au corps), ce « Jirai dormir à Hollywood », road movie motivé par lenvie daller à la rencontre des quidams, fait immanquablement penser au film « Borat ». A ceci près que le faux reportage kazakh était extrêmement scénarisé et autant corrosif que politiquement correct, alors que le film de de Maximy semble clairement plus intuitif et spontané. Il nempêche, avec son accent à couper à couteau et la « naïveté » avec laquelle il aborde les gens, le documentariste a tout du parfait « Candide » chez les cow-boys. Une attitude à priori toujours avenante qui lui permet de rencontrer tout un tas de personnes très diverses, quelles soient accueillantes (les cajuns) ou pas (les amish), excentriques (les vieux contorsionnistes), menaçantes (les blacks du ghetto de la Nouvelle-Orléans), racistes (lengueulade dans le bus, le type bourré à la Nouvelle-Orléans), ou marginales ( les Navajos, le type assez flippant dans le désert). Tous à leur manière représentent une facette de lAmérique, pays de toutes les richesses, de toutes les grandeurs, de tous les excès. Tous représentent surtout une facette de la misère et de la précarité qui pullule à lombre de lopulence de Wall Street, du show-biz strass et paillètes, et de lAmerican way of life. Car au final, derrière son côté gentil et fantaisiste, le documentaire de de Maximy dresse un portrait peu reluisant et assez violent de lAmérique, société particulièrement cruelle (le type qui se retrouve sdf du jour au lendemain, le type paumé dans le désert) et raciste (les indiens quon maintient dans la plus grande misère et la plus grande marginalité, les blacks ghettoïsés de La Nouvelle-Orléans), phénomènes probablement accentués avec le traumatisme post 11/09 et la paranoïa allant de pair (le type qui tient le discours islamophobe). Si ce portrait au vitriol savère assez prenant, on pourra néanmoins sinterroger sur la pertinence de lensemble, car au final de Maximy pointe dans les grandes lignes des choses que nous savions déjà (inégalités, racisme). Un sentiment de perplexité renforcé par la personnalité du documentariste « héros » de ce film, dont le culot et le côté toujours un peu « bienheureux » finissent pas agacer. Bilan mitigé donc pour ce « Jirai dormir à Hollywood », parcours initiatique sympathique, documentaire plus corrosif quil ny paraît, mais à la démonstration un peu (trop ?) facile. Sympathique mais pas indispensable.
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