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30 Jul

Le jardin des Finzi Contini

Publié par platinoch  - Catégories :  #Films Politiques-Historiques

« - Comment serais-je vieille ? Comme Mama Josette ?

   - Qui vivra verra »

 

Inspiré du roman de Giorgio Bassani, « Le jardin des Finzi Contini » est un film italien, réalisé en 1970 par le grand Vittorio de Sica. Grand acteur et surtout grand réalisateur italien, à qui l’on doit notamment le mythique « Voleur de bicyclette », ce « Jardin des Finzi Contini » a la réputation d’être l’une de ses meilleures réalisations. L’ours d’or du festival de Berlin en 1971 et l’Oscar du meilleur film étranger 1972 sont d’ailleurs là pour attester du succès critique de ce film. Sa réédition cet été, en copies neuves et restaurées, était donc l’occasion de me faire ma propre opinion sur ce film grave traitant des amours de jeunesse et de la déportation des juifs italiens. Avec trente-sept ans de retard, retour sur un film sensible et difficile.

 

« On a pas été persécuté en premier, mais on a rien fait quand notre tour est venu »

L’histoire :

 

Ferrare, Italie, 1938. La jeunesse dorée vit dans l’insouciance la plus totale, malgré la guerre qui s’annonce à grands pas, au même titre que les restrictions et les lois raciales. Ainsi, comme les club de tennis local vient d’être interdit aux juifs, une partie des jeunes habitués se retrouvent dans chez les Finzi Contini, vieille famille juive richissime, propriétaire d’un gigantesque et magnifique parc avec un terrain de tennis. Entre idylles naissantes, désirs des uns pour les autres, et insouciance de la jeunesse, un petit groupe de jeunes adultes s’y retrouve de plus en plus souvent, à l’abri derrière ses murs de la vie et de ses incertitudes. Pour Giorgio, c’est aussi l’occasion de passer du temps avec son amie d’enfance et ôte, Micol, dont il est éperdument amoureux. Malheureusement pour lui, il ne semble pas y avoir réciprocité dans les sentiments…

 

« Que te dire de plus ? Je n’ai pas réussi à te convaincre de me laisser t’aimer. Je ne vaux pas grand chose. S’il devait t’arriver quelque chose, se sera de ma faute… »

 

Ce « Jardin des Finzi Contini » surprend réellement les spectateurs et ce à plusieurs degrés. Ce qui frappe en premier lieu c’est la relative légèreté du récit, qui s’attache d’abord aux destins de deux individus et qui devient de plus en plus grave au fur et à mesure que le film avance et qu’il s'élargit au destin de l’Italie et de sa population juive. Ainsi, on est surpris par les premiers émois de Georgio pour la belle Micol qui semblent tout à fait niais et mièvres. Mais ce procédé permet de mettre en avant la jeunesse et l’insouciance des protagonistes comme pour mieux faire ressortir la cruauté du monde qui les entoure et qui doit inéluctablement les conduire à leur perte.

 

La deuxième surprise réside dans la mise en scène. De Sica oppose systématiquement les scènes dans le fameux jardin à celles se déroulant à l’extérieur. Pour les scènes dans le jardin, il y a ainsi un gros travail sur la photographie et les couleurs. Les personnages sont particulièrement mis en valeur dans une lumière abondante et irréelle, exaltant leur beauté et leur jeunesse. Dans un climat d’un calme olympien, le réalisateur les filme avec beaucoup de sensualité, comme pour mieux faire ressortir les désirs latents des uns pour les autres.

Ces scènes s’opposent fortement avec celles qui se déroulent en dehors du jardin, où la foule y est nombreuse et oppressante, où les couleurs sont ternes, et où règne un climat lourd d’insécurité et de tensions ramenant à la réalité d’une période incertaine et violente.

 

Enfin, le film est surprenant par la non-linéarité de son récit. Entre flashbacks et temps présents, De Sica impose également des grosses ellipses, qui rendent souvent l’histoire un peu confuse, mais qui créent une unité de temps qui lui est propre et qui devient vite ensorcelante. On ne retiendra pas forcément la qualité de l’interprétation qui de manière générale est assez décevante, Dominique Sanda en tête, si ce n’est celle de Lino Copolicchio dans le rôle principal. On retiendra en revanche quelques images fortes, comme l’enterrement du jeune frère de Micol, et la procession juive qui se dirige en plein bombardement vers le cimetière juif de la ville, avec, une fois le cortège disparu dans le cimetière, un gros plan sur l’étoile de David qui orne le mur, annonciateur d’une cataclysme imminente. Bouleversant.

 

« Pour comprendre comment ce monde marche, il faut mourir au moins une fois. Mieux vaut mourir jeune, ça laisse le temps de ressusciter »

 

Ce film a le mérite d’évoquer une page d’histoire assez méconnue de l’Italie Fasciste. Entre humiliations et privations successives et progressives, De Sica happe ses spectateurs progressivement les menant avec une légèreté qui semble déplacée vers un final que l’on sait inéluctable et qui en paraît d’autant plus cruel et douloureux. On pourra lui reprocher une certaine lenteur dans son récit et des passages trop elliptiques qui déroutent un peu trop l’attention des spectateurs. Néanmoins, De Sica signe ici un grand film, poignant et bouleversant.



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B
Je me souviens l'avoir vu il y a très longtemps et qu'il m'avait laissé une impression de malaise. J'étais sans doute trop jeune pour mieux appréhender ce film. Au travers de ton blog, il s'avère nécessaire que j'aile le revoir avec un regard plus neuf.
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