Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
23 Nov

Marty

Publié par platinoch  - Catégories :  #Comédies romantiques

« Quand est-ce que tu te maries, Marty ? Tous tes frères et sœurs, pourtant plus jeunes, sont déjà mariés et ont des enfants. Tu devrais avoir honte ! »

 

Marty, la trentaine, est boucher à New York. Contrairement à toute sa fratrie, qui a réussie à se caser sans attendre, Marty le célibataire, vit toujours, comme à l’italienne, avec sa mère. Une mère qui lui reproche également de ne toujours pas être marié. Pourtant, on ne peut pas reprocher à Marty, qui part en virée avec ses amis tous les samedi soirs, de ne pas chercher la femme de sa vie. Mais malgré son caractère doux et tendre, il sait que son physique ingrat ne plaide pas en sa faveur. Mais un samedi soir à priori comme les autres, alors qu’il semblait préférer rester cafarder chez lui après avoir essuyé un énième refus d’une fille par téléphone, il se laisse convaincre d’aller au bal du Stardust. Sans le savoir, il y fera la rencontre d’une jeune femme sensible et fragile, Clara, qui semble avoir les mêmes problèmes que lui…

.

 

« On me serine tout le temps à grands coups de « quand est-ce que tu te maries ? ». Comme si c’était moi qui refusait. Je sais bien que je n’ai rien de ce qui plait aux filles, je me suis fait une raison »

 

Bien qu’assez méconnu du grand public et assez largement oublié aujourd’hui, « Marty » de Delbert Mann, a été un véritable phénomène lors de sa sortie en 1955. Film a petit budget (350.000 $ à l’époque, soit un budget cinq fois moindre par exemple que celui de « Tant qu’il y aura des hommes » gros succès produit deux ans plus tôt, et qui bénéficiait d’un budget important mais pas colossal), sans véritable tête d’affiche lors de sa sortie, le film a néanmoins trouvé son public et surtout fait une énorme moisson de récompenses. Nommé 8 fois aux Oscars de l’année 1955, « Marty » repart avec 4 statuettes (Meilleur acteur pour Ernst Borgnine, Meilleur réalisateur, Meilleur film et Meilleur scénario), et obtient plusieurs prix dans différents festivals, dont la toujours très convoitée Palme d’Or du Festival de Cannes. Pour la petite histoire, « Marty » est l’adaptation sur grand écran d’un premier film réalisé pour la télévision. A ce titre, le réalisateur du film, Delbert Mann (décédé le 11 novembre dernier), aura surtout un été réalisateur pour la télévision,  « Marty » étant l’une de ces rares incursions pour le grand écran.

   

 

« On dit que j’ai bon cœur mais on a pas bon cœur par hasard. Je m’y connais en souffrance, c’est pour ça que je vous comprends et que me sens bien avec vous »

 

Ce qui est assez surprenant avec ce « Marty », c’est qu’il se détache foncièrement de la plupart des productions du genre de l’époque. Loin des comédies romantiques burlesques avec le bellâtre Cary Grant, et à des années lumières des films romantiques grandiloquents portés par des acteurs et des actrices toujours plus beaux et belles, « Marty » affiche ouvertement sa volonté d’authenticité, qui a du souffler comme un vent de fraîcheur sur la production cinématographique de l’époque. Car loin de tous les clichés, le film est centré sur un personnage assez laid et lourdaud, un homme simple, du peuple, antihéros par excellence puisqu’il n’arrive pas à séduire les femmes, qui finira par tomber amoureux d’une jeune femme toute aussi simple et éloignée des standards de beauté de l’époque que lui. Petite chronique douce-amère sur la difficulté de trouver l’amour, le film brasse un nombre important de sujets et de réflexions, comme la difficulté de s’assumer, d’assumer ses choix malgré les pressions sociales qui n’ont pour finalité que d’éloigner du bonheur pour défendre des intérêts égoïstes (Marty subit les pressions de sa mère et de son meilleur ami qui dénigrent Clara et le poussent à ne pas donner suite à des fins égoïstes, sa mère ayant peur d’être mise à la porte par le nouveau couple, et Angie craint de ne plus avoir son ami pour faire les 400 coups), ou  encore nous offre une critique d’une société basée sur les apparences (Marty n’attire par les femmes alors que c’est un homme qui a « bon cœur », doux, tendre et attentionné, de même pour Clara). Dans tous les cas, et même s’il y a un véritable fond mélancolique dans ce film, le scénario trouve toujours un bon compromis dans la tonalité, avec suffisamment d’humour pour dédramatiser la chose et pour renforcer le sentiment d’empathie envers le maladroit Marty.

                  

 

« Je ne suis pas né d’hier, le Réveillon approche et je sais que je ne peux servir que de pis-aller »

 

Côté mise en scène, « Marty » est de facture très classique. Le noir est blanc est assez soigné compte tenu de l’éclairage si spécifique qui laisse à penser que le film a été largement tourné en studio. Delbert Mann privilégie ici une certaine authenticité et une volonté d’efficacité à toute recherche d’artifices clinquants. Pour autant, on est touché par la grâce de certaines scènes, comme le travelling plongeant allant chercher l’intimité du couple Marty/Clara perdu au milieu des autres couples sur la piste de danse. Malgré cela, le film souffre aussi de quelques petits défauts, à commencer par le rythme du film, pas toujours très homogène, qui laisse de ce fait place à quelques petites longueurs. Mais le vrai point fort du film, c’est indéniablement son casting. Oscarisé pour son interprétation, Ernst Borgnine, « gueule » de cinéma et éternel méchant, trouve ici l’un de ses meilleurs rôles, imposant une sensibilité, une tendresse, et une maladresse attachante à son personnage, en opposition à son physique puissant d’homme trapu à la carrure de buffle. Pour la petite histoire, c’est Burt Lancaster qui en tant que producteur du film, a imposé Borgnine, avec qui il venait de tourner coup sur coup dans « Vera Cruz » de Aldrich et « Tant qu’il y aura des hommes » de Zinnemann, dans le rôle principal. A ses côtés, Betsy Blair, également nommée pour l’Oscar de la meilleur actrice, impose sa sensibilité à fleur de peau et sa grâce à un personnage difficile. A noter également les jolies performances de Joe Mantell (nommé à l’Oscar du meilleur second rôle), et des vétérantes Esther Minciotti et Augusta Ciolli.

                                          

                             

« Tu ne l’aimes pas. Ma mère ne l’aimes pas. C’est peut-être une tocarde, mais moi je suis laid. Par contre, je sais qu’hier, c’était vraiment bien, et si ça continue d’être bien, je me mettrais à genoux et je lui demanderais sa main »

 

Un petit peu surestimé peut-être avec le recul des années (méritait-il réellement une Palme d’Or à Cannes ?), « Marty » n’en demeure pas moins une sympathique et rafraîchissante comédie romantique. Scénario intelligent, dialogues faisant mouche, on déplorera tout juste quelques longueurs à ce film. Un film qui doit également beaucoup au généralissime Ernst Borgnine, qui, loin des rôles de méchants auxquels il était habitué, dévoila ici une autre facette de son talent, faite de sensibilité et de tendresse. A noter qu’il est devenu cette année le premier acteur Oscarisé dans un rôle principal à atteindre les 90 ans. Un film à voir.

 



Commenter cet article
H
Un super film !<br /> A voir et a revoir !
Répondre
B
Très belle critique pour un très beau film, sur un sujet qui reste toujours d'actualité depuis la préhistoire jusqu'à la fin des temps. D'autant plus que le traitement du sujet est fait avec beaucoup de réalisme que les romantismes fleur bleue qui ne correspondent jamais à la vérité.
Répondre

Archives

À propos

Le site sans prétention d'un cinéphile atteint de cinéphagie, qui rend compte autant que possible des films qu'il a vu!