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07 Sep

Le metteur en scène de mariages

Publié par platinoch  - Catégories :  #Inclassables

« En Italie, ce sont les morts qui commandent »

 

Désabusé après avoir assisté au mariage de sa fille avec un catholique conservateur, Franco Elica, metteur en scène connu et respecté, se retrouve du jour au lendemain en Sicile, dans une petite ville de bord de mer. Après avoir sympathisé rapidement sur la plage avec un metteur en scène de mariage qui l’admire, Elica va croiser les chemins de plusieurs personnages énigmatiques, dont Smamma, un de ses confrères réalisateur qui se fait passer pour mort pour que son film reçoive les honneurs qu’il n’aurait pas eu s’il était vivant, et surtout le Prince Gravina, figure locale de l’ancienne aristocratie ruinée. Ce dernier, austère et inquiétant, lui demande de mettre en scène le mariage (de raison) de sa fille, la jolie Bona. Mais dès qu’il la voit, Elica en tombe tout de suite amoureux et cherche par tous les moyens à empêcher son mariage…

 

« Le Maître, ne l’appelez pas « Monsieur ». Vous verrez, il est très méfiant avec les femmes… »

 

L’œuvre de Marco Bellocchio a toujours été sujette à controverse. Grand provocateur devant l’éternel, il aura su attaquer les valeurs de la société italienne (Catholicisme, famille, politique, morale), qu’une grande partie de ses confrères réalisateurs auront au contraire défendu avec ardeur comme étant des valeurs essentielles. On retiendra ainsi de sa filmographie des films qui auront marqué leur époque en défrayant la chronique, comme « Au nom du père » (1971), « Le saut dans le vide » (1979), et surtout « Le diable au corps » (1986), dont le « pompino » de Maruscka Detmers aura fait couler beaucoup d’encre. Depuis lors, le cinéaste italien, bien que toujours prolifique, semble en proie à une longue traversée du désert médiatique, ses films ne bénéficiant pas d’une grande exposition, chez nous du moins. Son dernier film en date, « Le metteur en scène de mariages », inspiré d’un classique de la littérature italienne (« Les fiancés » de Manzoni), arrive ainsi sur nos écrans dans la plus grande indifférence, et ce malgré la présence de Sergio Castellitto et de Samy Frey au casting.

 

« Elica n’est qu’un petit parmi les grands en Italie. Il est tout juste bon à être metteur en scène de mariages »

 

Si ses films n’ont jamais été réellement grand public, le visionnage du dernier Bellochio laisse quand même sceptique quant à la nature même de l’œuvre. Ce  « Metteur en scène de mariages » est-il simplement un ovni cinématographique de plus réservé à une élite, ou bel et bien une vaste fumisterie ? Car Bellochio signe ici un film déroutant, tant par sa forme que son fond. Le scénario, jamais linéaire, ouvre ainsi une série de pistes, que l’auteur croit bon de ne jamais refermer. Ainsi, l’histoire part dans tous les sens, entre réflexion sur la création (évoquée par la rencontre avec le réalisateur qui se fait passer pour mort pour que son film obtienne les honneurs, ainsi que par les séquences de films que Elica se fait dans sa tête et qu’il finit toujours par détruire), réflexion sur les mœurs (avec la place de la religion dans la société et les mariages arrangés), onirisme pur (outre les séquences que Elica monte dans sa tête, certaines scènes apparaissent finalement comme des rêves du héros, telles que la chute finale), ou encore romantisme, dans cette histoire d’amour contrariée et improbable qui pousse le personnage central à tout faire pour éviter le mariage de celle dont il est tombé amoureux. Mais de toutes ces nombreuses pistes, aucune ne prend le dessus sur un synopsis confus, et surtout aucune n’aboutit à rien, laissant le spectateur s’enfoncer dans un film nébuleux et elliptique duquel il ne ressort strictement rien.

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« Le mariage est la fin de l’amour. Mariage et funérailles, il n’y a pas beaucoup de différences »

 

Sergio Castellitto. Films sans FrontièresIl sera bien évidemment aisé de faire des corrélations entre ce personnage qui se cherche et qui se pose des questions sur la création et sur la reconnaissance de son art, et Bellochio lui-même, qui semble en perte de vitesse depuis quelques années. Mais cette interrogation nombriliste est desservie par une mise en scène beaucoup trop elliptique et labyrinthique, qui en oublie de laisser leur place aux émotions. Ainsi, dans une mise en scène glaciale et impersonnelle, le personnage central évolue au milieu de personnages mystérieux dont on ne saura au final rien de plus, et à la recherche d’un Graal protéiforme qui ne sera jamais réellement défini. On appréciera néanmoins le cadre du film, une petite citée sicilienne, qui sera la seule chose de positive à garder en tête. Car tout au long de cette heure quarante, le spectateur ne sera jamais captivé par un film qui cherche délibérément à le perdre au beau milieu de nulle part.

 

« Nous sommes finis car incapables de vivre et donc de mettre en images le monde d’aujourd’hui »

 

Sergio Castellitto. Films sans FrontièresPorté par un duo d’acteurs clinquant, l’interprétation est on ne peut plus inégale. Si Castellitto livre une nouvelle fois une interprétation d’une grande justesse et d’une grande sobriété, c’est du grand Samy Frey que viendra la déception. Son personnage énigmatique et tellement mal défini ne lui donnera jamais l’occasion de lui donner réellement vie. Autour, les seconds rôles sont tous dans une sorte d’excès qui sonne d’autant plus faux que ce film est inepte. A ce titre, la fade Donatella Finocchiaro reste un choix discutable quant au désir interdit qu’elle représente. Pour un film en forme d’introspection, Bellochio nous livre sa réalisation la plus absconse qui soit. Entre minimalisme et surréalisme, il développe un film qui tel un labyrinthe ouvre tout un tas de pistes et de portes dont lui seul possède la clé. Peut-être certaines personnes y trouveront leur bonheur ou une fulgurance digne d’un génie. Pour les autres, dont je fais partie, ce film ne restera que néant pendant une heure quarante.



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B
Bon, ben, heu, bof ! On attendra un moment de vide pour s'essayer une heure quarante. Ou pas !
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