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« Si tu peux voir le futur, tu peux le changer »
Sorti au printemps 2007, le dernier Lee Tamahori, réalisateur de « Meurs un autre jour », avait de quoi mettre leau à la bouche. Et pour cause, sattaquer à ladaptation cinématographique de lun des auteurs de science-fiction les plus reconnus avec en tête de casting lun des acteurs hollywoodiens les plus doués de sa génération, le projet avait de la gueule. Seulement voilà, nadapte pas Philip K. Dick qui veut. Inspiré (très librement) de sa nouvelle « Lhomme doré », le film met en scène le destin dun homme, Chris Johnson, qui peut voir les évènements le concernant qui vont se passer deux minutes plus tard. Résidant Las Vegas, le lieu de tous les excès, Johnson met son pouvoir au service de petites combines minables (numéro de magie et arnaque au poker) pour vivre tranquillement sa petite vie moyenne. Mais voilà, un complot terroriste à la bombe atomique menace la sécurité américaine et le FBI lui met la main dessus pour mettre son pouvoir à leur service et arrêter les terroristes avant quils ne puissent mettre leur plan à exécution. Lhistoire se corse lorsque Johnson, qui refuse dans un premier temps de coopérer prend la tangente avec une jeune femme dont il est amoureux et quil vient de rencontrer. Une folle course poursuite sengage donc
« Si je fais ce que vous me demandez, vous mattacherez sur cette chaise pour toujours »
On connaissait le goût de Lee Tamahori pour les gros films dactions, avec effets spéciaux, courses poursuites, grosses pétarades et autres scènes réjouissantes de combats. Dans labsolu, son univers ne semblait pas forcément compatible avec lunivers plus subtil de Philip K. Dick. Et très vite les soupçons dincompatibilité se confirment. Car si le film partait plutôt bien, avec une scène bien léchée dévasion du casino où lami Johnson sest fait repéré pour triche au poker, et quelques bonnes notes dhumour, en particulier la scène où il aborde le personnage interprété par la belle Jessica Biel, les gros dérapages arrivent à la vitesse des bolides qui se poursuivent à lécran, et très vite le film part en roue libre, dans tous les sens, sans plus personne au volant.
« Jai vu bien au-delà de ce que javais jamais vu »
Ce « Next » souffre dabord (et principalement) dun scénario qui tient finalement sur un timbre poste. En effet, le coup de la menace terroriste tombe comme un cheveu sur la soupe, les terroristes eux-mêmes ne nous sont jamais présentés (on sait juste quils sont français ?!), et Tamahori prend bien soin de ne jamais nous présenter ni leurs motivations, ni leurs revendications. Il en fait de même avec la romance qui naît entre les deux protagonistes principaux : là encore, il ne sembarrasse pas ni de poncifs ni de détails, les deux personnages se trouvent, se séduisent en un temps record, et saiment comme un vieux couple aussitôt la première nuit passée ensemble. Enfin, aucun personnage à lexception du héros nest franchement bien construit ni cerné, ils sont tous très stéréotypés, la palme pour le chef de lopération côté FBI.
La deuxième tuile du film, cest la réalisation. Certes Tamahori cherche à donner du rythme à son film, et à multiplier les effets visuels à grands renforts deffets spéciaux. Le problème, cest quil ne les utilise pas à bon escient. En effet, ceux-ci paraissent déjà un peu cheap et ringards par rapport à ce qui nous est donné de voir dans dautres grosses productions du moment ("Spider-man" par exemple), et surtout labus de ces derniers ne comble pas le vide sidéral du scénario. Au contraire, cela plombe encore plus le film. Citons en vrac lavalanche de voitures qui poursuivent Nicolas Cage, la voiture qui se mange le train en marche au passage à niveau, la multiplication de Nicolas Cage comme autant de pistes mentales étudiées, ou encore le coup des balles évitées presque au ralenti, un peu comme dans « Matrix », mais en nul.
Reste donc linterprétation, qui manque de bol, ne fait pas franchement détincelles. Nicolas Cage joue bien, comme toujours, mais sans jamais briller vraiment, la faute à un rôle stéréotypé au possible. A sa décharge toujours, il est affublé dun look plus que ringard et laid qui monopolise quelque peu lattention du spectateur déjà déçu du spectacle sur lécran. Le reste du casting est au diapason dans la médiocrité, Julianne Moore en tête, quon avait connu beaucoup plus inspirée par le passé (« Boogie nights », « Hannibal »), se perd totalement dans un rôle beaucoup trop caricatural, mal dessiné, auquel elle ne semble jamais croire. Jessica Biel également se perd dans un énième rôle de jolie fille sans relief, complètement terne. Sa plastique est irréprochable, mais en aucun cela ne saurait suffire à rendre le film attractif. Ni à faire delle une grande actrice. Enfin, on était tout content de voir Peter Falk crédité au générique, sa présence se limite à deux minutes décran, et à trois phrases et demies.
« Jai vu toutes les fins potentielles : pas une ne test favorable »
Scénario bâclé et gros effets ringards et mal utilisés, Philip K. Dick ne méritait pas dêtre bousillé comme cela. Malheureusement, Lee Tamahori la fait. En partant dune idée qui a défaut dêtre originale semblait du moins intéressante à exploiter, il narrive pas à nous proposer mieux que cette énième interrogation égoïste : doit-on sacrifier son bonheur personnel (en loccurrence la vie de sa bien-aimée) pour sauver la vie de millions de personnes innocentes ?
Difficile dapporter une réponse intéressante lorsque lon dispose dun scénario qui tient sur un timbre poste, et quon se sert de personnages et de situations aussi caricaturaux.
Porté par une réalisation manquant de subtilité et par une interprétation franchement moyenne, ce film ne peut que décevoir.
Alors, certes, le spectacle reste regardable, mais ce nanard de série B ne vole pas bien haut. Il reste dans lensemble aussi laid que la coupe de cheveux de lami Nicolas Cage qui enchaîne de manière inquiétante les navets (« World trade center » et « Ghost rider » coup sur coup).
Un des bides de lannée !
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