Une petite zone de turbulences
« Si tu lavais flingué au lieu de lépouser, aujourdhui tu serais sorti de taule et tu serais libre ! »
Jean-Pierre, récemment retraité, est hypocondriaque... Anne, sa femme, le trompe avec un ancien collègue de bureau... Sa fille Cathie, divorcée et mère d'un petit garçon de cinq ans, vie avec Philippe, un " brave " garçon, que Mathieu, le frère homo de Cathie, appelle " Bac moins six "... Quand JP découvre une petite tâche sur sa peau au niveau de sa hanche droite, que Cathie lui annonce qu'elle épouse " Bac moins six ", que Mathieu se fait larguer parce qu'il hésite à inviter son amant au mariage de sa soeur et que JP apprend fortuitement que sa femme le trompe, l'équilibre familial implose.
Disputes, règlements de comptes, insultes ... JP, Anne, Cathie, Mathieu et Philippe ne s'épargnent rien!
Et traversent, ensemble, une petite zone de turbulence...
« Que des hommes couchent ensemble je peux limaginer : durant les longues missions en mer ou dans lespace, pour garder la bonne humeur, ça ne me choque pas. Cest un peu comme une activité sportive. Ce qui me dérange, cest lidée de deux hommes qui vont acheter des meubles ensemble. »
Après sêtre fait plutôt rare pendant quinze ans (pendant lesquels il sest davantage consacré à lécriture et à la mise en scène), la seconde moitié de la décennie 2000 semble marquer le retour au premier plan de Michel Blanc. Outre le spectaculaire carton au box-office du pourtant mauvais « Les bronzés 3 », le comédien sest également illustré dans des projets plus ambitieux (mais pas toujours réussis) comme « Le deuxième souffle », « Les témoins », et surtout « Je vous trouve très beau », le premier film dIsabelle Mergault pour lequel il reçut une nomination au César du meilleur acteur. Adapté par ses soins du roman « Une situation légèrement délicate » (publié en 2007) de langlais Mark Haddon, Michel Blanc a cependant refusé dassurer la mise en scène de « Une petite zone de turbulence » quil jugeait trop proche de sa dernière réalisation en date, « Embrassez qui vous voudrez ». Cest finalement Alfred Lot, réalisateur de « La chambre des morts », qui en assurera la réalisation. Loccasion de réunir Michel Blanc et Miou-Miou, quon avait pas vu à laffiche dun même film depuis « Tenue de soirée » de Bertrand Blier, il y a de cela 24 ans.
« Quest-ce que tu as dans la cervelle ? Une photocopieuse à conneries ? »
Spécialiste de la comédie de murs, Michel Blanc retrouve donc avec « Une petite zone de turbulences » son terrain de jeu favori. Sur fond de crise de la cinquantaine et de vaudeville (léternel ménage à trois dont la comédie française ne parviendra jamais à se défaire !), Michel Blanc révèle ainsi au grand jour les fissures dune famille bourgeoise en apparence trop lisse et bien rangée. En brassant beaucoup de thèmes déjà largement abordés par les nombreuses comédies de murs produites en France ces dernières années comme la difficulté de faire accepter à sa famille un mariage ou une homosexualité qui dérange « Une petite zone de turbulences » ne révolutionne pas le genre. Pour autant, le film dAlfred Lot bénéficie de tout le talent de scénariste dun Michel Blanc toujours aussi corrosif et acide dans ses dialogues, et toujours aussi habile pour jouer avec les faux semblant (les parents parfaits se révèlent finalement cruels tandis que le gendre méprisé se révèle beaucoup moins con quil nen a lair). Avec ses angoisses, ses névroses, son hypocondrie et ses grandes théories fumeuses (« Les médecins, ils te disent que tu vas crever et après ils vont jouer au golf ! »), il fait dailleurs immanquablement penser à un Woody Allen made in France. A linstar du metteur en scène new-yorkais, les dialogues de Blanc sont pour beaucoup dans la réussite du film, qui bénéficie également dun rythme soutenu (ô combien indispensable en terme de comédie !) et dune interprétation sans failles (mention spéciale à Gilles Lellouche) qui lui permettent de tirer son épingle du jeu et de se hisser bien au-dessus du niveau moyen des comédies françaises de ces derniers mois. Définitivement une bonne surprise !
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