Tatsumi
Un grand merci à CTV et à Cinetrafic, qui dans le cadre de l’opération « Un dvd contre une critique », m’a permis de voir le film « Tatsumi » d’Eric Khoo.
« J’ai vu l’enfer enfermé dans mon propre cœur. Et pendant vingt ans, j’ai vécu comme si je parcourais inlassablement l’enfer. »
Tatsumi célèbre l’œuvre et la vie du mangaka japonais Yoshihiro Tatsumi. Dans le Japon occupé de l’immédiat après-guerre, la passion du jeune Tatsumi pour la bande dessinée deviendra finalement le moyen d’aider sa famille dans le besoin. Publié dès l’adolescence, sa rencontre avec son idole Osamu Tezuka, le célèbre mangaka comparé à Disney, lui offrira une source d’inspiration supplémentaire. Malgré un succès constant, Tatsumi va remettre en question le manga qui n’offre aux enfants que des scénarios et des dessins au contenu mièvre et sot. En 1957, il va inventer le terme gekiga (littéralement "images dramatiques"), développant ainsi une nouvelle forme de manga destinée à un public adulte. Fortement influencé par les thématiques du cinéma néo-réaliste, Tatsumi nous offre une vision du Japon de l’après-guerre.
« Plus les hommes sont nombreux plus les liens entre eux s’amenuisent et plus leur solitude est profonde »
Fer de lance du cinéma singapourien, le réalisateur Eric Khoo (« Be with me », « My magic ») nous revient aux commandes de son premier film d’animation, consacré à la vie et à l’œuvre du célèbre mangaka japonais Yoshihiro Tatsumi. Une forme d’hommage à celui qui est communément considéré comme l’inventeur du « Gekiga » - mangas traitant de thèmes plus sombres et réalistes, spécifiquement destinés aux lecteurs adultes. Oscillant entre biopic et documentaire, le film mêle habilement récit de la vie du dessinateur (inspiré de son autobiographie, « Une vie dans les marges ») et plusieurs de ses histoires courtes (« L’enfer », « Monkey mon amour », « Juste un homme », « Occupé » et « Good bye »). Le résultat, très original et très intéressant, offre une double perspective : tout d’abord une réflexion sur le processus de création et la condition de l’artiste mais également une évocation mélancolique de la société japonaise durant les trente glorieuses, période durant laquelle la société japonaise connut de nombreuses mutations. On regrettera toutefois que la narration – qui mêle biographie et fictions – ne soit pas toujours extrêmement fluide. De même que certaines histoires se perdent un peu dans une métaphore un peu lourde (l’histoire du singe et du mutilé notamment). Reste que sa beauté visuelle et son aspect techniquement novateur font de « Tatsumi » une œuvre riche et intéressante.
Commenter cet article