Zodiac
« Je ne suis pas le Zodiaque, et si je létais, je ne vous le dirais certainement pas »
Après la sortie récente de « Spider-man 3 », ce « Zodiac » est probablement lune des sorties les plus attendues de lannée, et précède de peu la déferlante estivale annoncée, forte entres autres de « Harry Potter et lordre du Phnix », « Shrek 3 », « Oceans 13 » ou encore « Die hard 4 ». Mais ce « Zodiac » se distingue des autres films cités du fait de son réalisateur, David Fincher, auteur entre autre des excellents et cultes « Seven » ou « Fight club ». Son dernier film a être sorti sur nos écrans (« Panic Room ») en 2002, ce « Zodiac » était forcément très attendu, dautant plus quil était présenté en ouverture du festival de Cannes. Par ailleurs, son sujet, traitant sur lenquête pour arrêter le tueur en série le plus célèbre des Etats-Unis de ces trente dernières années, le distingue encore des grosses productions tant attendues qui restent purement des bons films de divertissement, souvent familiaux.
Ultra documenté, ce film, mêlant habilement les genres du thriller, du film policier et du film noir, revient sur lenquête mené parallèlement par la police et les journalistes sur une série de crimes revendiqués par un seul homme, qui se faisait appeler le « Zodiaque » en référence aux messages codés (entre autre avec des symboles du zodiaque) quil envoyait à la presse. De plus, il se servait également de la presse locale pour diffuser ses revendications détaillées de ses crimes et pour faire planer une ambiance de psychose. Sévissant dans la région de San Francisco, entre 1966 et la fin des années 1970, on lui impute un nombre de crimes très élevé, allant de la grosse trentaine à près de 200. Et sil a quelques fois laissé des survivants derrière lui, aucun témoignage naura permis de le coincer. Cette affaire, qui a profondément marquée les esprits en Amérique, et qui demeure encore aujourdhui une énigme, était donc un pari risqué de réalisation pour Fincher.
« - Vous aidez souvent les gens ?
- Quand jen ai fini avec eux, ils nont plus besoin daide »
Ce qui frappe dentrée dans le film de Fincher, cest la volonté affichée de sobriété. Sobriété dans la reconstitution du San Francisco des années 70, où certes les voitures et les costumes sont bien représentatifs de lépoque, mais sans pour autant ressortir de manière outrancière. En outre, on peut constater la volonté affichée en permanence déviter lexcès, le kitch, tout ce qui pourrait distraire un peu les spectateurs de lhistoire portée à lécran, et ôter de la crédibilité à lensemble.
Fincher a choisit darticuler son récit de manière très chirurgicale, avec finalement peu de scènes gores ou ultra violentes. Au contraire, il insiste beaucoup sur lavalanche des dates, des noms, des lieux, des indices, des pistes qui se succèdent et qui ne mènent nulle part. Pour ceux qui ont lu le livre de Steve Hodel « laffaire du Dahlia noir » ou qui ont vu le film dAlan J. Pakula « Les hommes du président » (ce dernier semble dailleurs être le grand modèle référent de ce « Zodiac » dans la construction de ce film), le découpage se fait exactement de la même manière. Un tel découpage du récit à un avantage majeur, cest de nous faire ressentir exactement tous les sentiments en temps réel des enquêteurs, de la joie et de lexcitation dune nouvelle piste, au dépit et à la rage de chaque impasse. Cependant, il y a aussi un défaut dans une telle organisation scénaristique, cest que lavalanche des noms finit par brouiller totalement les esprits au point de laisser chez les spectateurs quelques zones dombre et dincompréhension.
Mais ce procédé permet à Fincher de nous plonger dans une profonde folie. Folie meurtrière et psychologique dun côté, qui ne trouve dégale que la folie obsessionnelle des journalistes et policiers mobilisés en permanence sur laffaire. En outre, ces derniers y pensent pendant des années 24 heures sur 24, négligeant même leur famille, leur vie privée et leur carrière. Dailleurs, dans tous les cas, cette affaire aura raison de leurs carrières respectives.
« - Est-ce que tu sais si les gens ici me donnent un surnom ?
- Genre « le demeuré » ?
- Ouais
- Non, je ne sais pas »
Pour ce film hors norme, Fincher a choisit de sentourer dun casting de rêve, sans réels grands noms, mais avec des grands acteurs réputés venant pour la plupart dun cinéma indépendant ou du moins assez loin des grosses productions grands publics. Ainsi, on retrouve entre autres Jake Gyllenhaal, vu dernièrement dans des films comme « Le secret de Brockeback mountain », « Donnie Darko » ou « The good girl », Robert Downey Jr. (« Shanes Black Kiss kiss bang bang »), ou encore Mark Ruffalo (We dont live here anymore, Eternal Sunshine of the spotless mind). La qualité des interprètes est dailleurs en tous points exceptionnelle.
Gyllenhaal interprète un dessinateur de presse qui se passionne pour cette histoire au point den délaisser son travail et sa famille pendant plusieurs mois. Son personnage nest pas fictif, puisque Robert Graysmith est lauteur du livre le plus abouti sur lenquête du « Zodiaque ».
Au final, lattente aura été longue mais probablement profitable puisque Fincher nous livre un très bon film de genre sinspirant de faits réels. Très documenté, porté par des comédiens fantastiques, il nous plonge dans les abîmes de la folie. Il réussit un tour de force, car si son film est très chirurgical, et que les scènes violentes ou angoissantes sont rares, il maintient pendant près de 2h40 une ambiance ultra pesante, stressante, et vraiment angoissante. Compte tenu de sa longue durée et de sa forme si particulière où laction est quasiment réduite à néant, ce film ne plaira probablement pas à tout le monde. Pour autant, ce « Zodiac » est un définitivement un grand film.
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