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01 Jul

Panique à Needle Park

Publié par Platinoch  - Catégories :  #Drames

Un grand merci à Carlotta pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le blu-ray du film « Panique à Needle Park » de Jerry Schatzberg.

Panic_needle_park« C’est l’année des élections, voilà pourquoi on ne trouve plus de came ! C’est la panique, les vendeurs se font tous prendre et les prix flambent. C’est pire qu’en 68 ! »

Lorsque Helen rencontre Bobby, elle vient d’avorter. Il l’attend à la sortie de l’hôpital, passe l’après-midi avec elle : c’est le coup de foudre. Bobby lui propose de s’installer avec lui dans le Nord-Est de Manhattan, à proximité de Needle Park. Le quotidien de Bobby tourne autour de ce carrefour où traînent les toxicomanes new-yorkais – lui-même est accro à l’héroïne depuis de longues années. C’est le début d’une grande histoire d’amour qui va petit à petit entraîner Helen dans les affres de la drogue…

« Tu sais ce qui pourrais nous arriver de mieux ? Crever ! »

Panique_a_needle_ParkJerry Schatzberg débute sa carrière comme photographe de mode. Il est, à ce titre, l’un des photographes les plus réputés de ce domaine durant les années 60, décennie durant laquelle il officie pour les plus grands magazines américains tels que Vogue, Esquire ou Life. Ce n’est qu’avec le tournant des années 70 qu’il décide d’opérer un virage tant artistique que professionnel en s’essayant à la réalisation. Il signe ainsi à 43 ans, en 1970, son premier film : « Portrait d’une enfant déchue ». Prenant pour décor un univers qu’il connait bien – le milieu de la mode et son revers – il filme sans concession la descente aux enfers d’un mannequin emprisonnée dans la dépression et la dépendance à la drogue. Le sujet de la toxicomanie semble beaucoup inspirer le réalisateur qui en fera le sujet central de son deuxième film, « Panique à Needle Park », inspiré d’un roman de James Mills et qui sort dès l’année suivante. La production tente d’embaucher Jim Morrison, le mythique chanteur des Doors (qui décèdera quelques mois après seulement), pour interpréter le personnage principal. En vain. Jerry Schatzberg lutte alors pour imposer le jeune Al Pacino (31 ans), ancien élève de l’Actor’s Studio qui s’est forgé une jolie réputation à Broadway mais qui ne compte à son actif qu’un petit rôle au cinéma (« Me, Natalie » de Fred Coe en 1969). D’abord jugé trop vieux pour incarner le personnage, l’acteur finit pourtant par décrocher le rôle qui le révèlera au grand public et qui lui permettra de décrocher l’année suivante le rôle de Michael Corleone dans « Le parrain » de Francis Ford Coppola. Présenté en compétition au Festival de Cannes 1971, le film se récompensé du Prix d’interprétation féminin pour l’actrice Kitty Winn. Considéré comme choquant et scandaleux lors de sa sortie, le film est ainsi amputé de certaines scènes lui permettant de passer outre la censure. En Grande-Bretagne, le film est même interdit de sortie jusqu’en 1974. Il ressort aujourd’hui dans sa version intégrale. A noter que Pacino et Schatzberg se retrouveront en 1973 pour « L’épouvantail » qui recevra la Palme d’or à Cannes.

« Je ne pourrai pas quitter Needle Park, il n’y a que là que je me sens bien »

Panique_a_needle_park_1Les histoires d’amour finissent mal, en général. Et ce même si « Panique à Needle Park » aurait plutôt tendance à commencer comme une comédie romantique : Helen, une jeune femme un peu paumée se laisse séduire par Bobby, jeune marlou fantasque et un peu chien fou qui ne demande qu’à prendre soin d’elle. Il se dégage à l’évidence une sincérité touchante et une fraicheur dans la relation qui se noue et qui se construit entre ces deux êtres marginaux que l’on sent tout de même instables. Mais très vite, leur histoire est rattrapée par l’addiction de Bobby aux drogues dures et Helen finira elle aussi par se laisser entrainer avec lui sur cette pente infernale. Jerry Schatzberg, qui s’était déjà intéressé dans son précédent film aux dérives de la toxicomanie, retrouve avec « Panique à Needle Park » un sujet qu’il connait bien. Mais loin du strass et des paillettes du show business qui pouvaient encore donner l’illusion dans « Portrait d’une enfant déchue », « Panique à Needle Park » ressemble davantage à une plongée quasi documentaire dans le milieu des junkies new-yorkais et de leur misérable quotidien. Résolument âpre et dur, le film est ainsi une sorte de plongée ultra-réaliste dans l’univers des toxicomanes. Une sorte de descente progressive au fin fond des enfers dont Schatzberg ne nous épargnera aucun détail, aussi choquant soit-il (seringues dans les veines, incroyable scène d’overdose, femmes qui se prostituent pour payer leurs doses), qui conduira les protagonistes vers leur propre déchéance (la fraiche et douce Helen se retrouve rapidement avec le même regard vitreux et le même comportement de zombie que ses camarades) et sans aucun espoir de retour (à l’image de ce chiot qui à peine adopter préfère aller se noyer que de rester avec ses maitres). A l’opposé de l’image  des sixties des hippies pacifiques et joyeux s’adonnant aux drogues douces et à la fumettes, le réalisateur signe ici un film mélancolique et désespéré, qui marque en quelque sorte la fin d’une époque. D’ailleurs, « Panique à Needle Park » trouve un étrange écho dans d’autres films du Nouvel Hollywood qui sortiront à la même époque, tel le « French Connection » de William Friedkin qui sort la même année. Il annonce aussi, de manière plus indirecte et plus insidieuse l’hécatombe à venir des années SIDA. Cette fois c’est sûr, le rêve américain est bien mort. Autant que l’idéal libertaire, pacifique et psychédélique de la jeunesse américaine.

 

Needle Park

 

***

Le blu-ray : Le film est présenté dans une nouvelle copie tirée d’un master haute définition 2K restauré supervisé par Jerry Schatzberg lui-même. Le film est proposé en version originale américaine ainsi qu’en version française (toutes deux en 1.0). Des sous-titres optionnels français sont également proposés.

Côté bonus, Carlotta sort le grand jeu, avec pas moins de quatre excellents documentaires : « Jerry photographe » qui revient sur les débuts de Jerry Schatzberg en tant que photographe, reconnu comme l’un des plus grands de l’univers de la mode, du cinéma et de la musique (HD) ; « Jerry cinéaste » dans  lequel le réalisateur raconte la genèse et le tournage de« Panique à Needle Park » (HD) ; « Al & Jerry » dans lequel Jerry Schatzbergnous raconte sa relation avec Al Pacino(HD)  et « Jerry à Cannes » dans lequel il se remémore ses sélections au Festival de Cannes pour « Panique à Needle Park » et « L’Épouvantail » (Palme d’Or 1973) (HD). Outre ces documentaires, le réalisateur commente également cinq scènes du film.

 

Dans sa version ultra-collector, le film est accompagné d’un livre passionnant, « La vie sur grand écran » (200 pages) revenant par le biais d’entretiens sur le développement du film et son tournage. Le livre comprend également cinquante photos inédites.

 

Edité par Carlotta, « Panique à Needle Park » est disponible en DVD, blu-ray et en édition limitée ultra-collector (DVD + Blu-ray + Livre) depuis le 22 juin 2016.

 

Le site Internet de Carlotta est ici. Sa page Facebook est ici.

 

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