Un, deux, trois
Un grand merci à Rimini Editions pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le blu-ray du film « Un, deux, trois » de Billy Wilder.
« Votre Kremlin Cola était si infect que même l’Albanie n’en a pas voulu ! »
1961, Berlin Ouest. Directeur de la filiale d’une célèbre multinationale américaine, CR MacNamara rêve de conquérir le marché soviétique. Alors qu’il est en pleine négociation, son patron l’informe que sa fille arrive à Berlin et le charge de la chaperonner. Mais la jeune fille file à Berlin Est et tombe amoureuse d’un chauffeur de taxi communiste.
« En Russie on a un proverbe qui dit : Va toujours vers l’ouest ! »
1961. Tout juste auréolé du succès publique et critique de « La garçonnière », Billy Wilder souhaite enchainer avec l'adaptation de la pièce musicale « Irma la douce ». Mais des problèmes de production qui retardent le projet (qui se concrétisera néanmoins deux ans plus tard) le contraignent à revoir ses plans. Il se tournera donc vers la mise en chantier de « Un, Deux, Trois », comédie satirique sur fond de rivalités entre le capitalisme triomphant américain et le socialisme dur version soviétique. Pour se faire, il adapte librement le roman « Les enfants de la rue Paul » du hongrois Ferenc Molnar dont il transpose l'intrigue - des bandes rivales qui s'affrontaient dans la Budapest de l'entre deux guerres - dans le contexte de la Berlin occupée et segmentée du début des années 60. Une période de tension particulière qui aboutira cette même année à la construction du célèbre mur qui coupera physiquement et pour près de trente ans la ville en deux parties distinctes et hermétiques, matérialisant ainsi le rideau de fer qui déchire alors l'Europe.
« Je suis capitaliste depuis à peine trois heures et je vous dois déjà 10 000 dollars ? »
Mais alors que la tension politique est à son comble, Wilder préfère tourner la situation en dérision avec cette romance entre la jeune héritière de l’empire Coca Cola et un jeune est-allemand totalement acquis aux théories marxistes, qui mettra à mal les relations entre les deux empires dominants. L’occasion pour Wilder d’imaginer une comédie burlesque hilarante dans laquelle chacun en prend pour son grade, des russes corrompus qui n’hésitent pas à se dénoncer entre eux aux américains cupides, arrivistes et sans scrupules. Sans parler des allemands, travailleurs zélés qui ont gardé de bien fâcheux réflexes de leurs années de nazisme. Tout se beau monde se côtoie pour mieux se manipuler et surtout, se duper. Mais pour Wilder, pas question ici de distribuer les bons points. Même le capitalisme en prend pour son grade lors d’une cinglante diatribe à la toute fin du film (« Pour que le capitalisme fonctionne chacun doit s’endetter auprès de l’autre »). Un moyen pour Wilder de renvoyer tout le monde dos-à-dos, en rappelant que quelque soit ses convictions (si tant est que l’Homme en soit véritablement pourvu, vu comment il est facile de changer de camp), l’Homme est avant tout individualiste. Forte de situations loufoques (le ballon accroché au pot d’échappement de la moto) et de dialogues formidablement ciselés, Wilder signe là une comédie irrésistible au rythme effréné. Hautement irrévérencieux et véritablement brillant.
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Le blu-ray : Le film est présenté dans un nouveau Master Haute-Définition, en version originale américaine (2.0) ainsi qu’en version française (2.0). Des sous-titres français sont également disponibles.
Côté bonus, le film est accompagné d’une Conversation entre les journalistes Frédéric Mercier et Mathieu Macheret, de Bandes-annonces et d’un livret de 28 pages signé Marc Toullec.
Edité par Rimini Editions, « Un, deux, trois » est disponible en DVD ainsi qu’en blu-ray depuis le 4 juin 2019.
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