Le géant de la steppe
Un grand merci à Artus Films pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le blu-ray du film « Le géant de la steppe » d’Alexandre Ptouchko.
« Par ce glaive, tu frapperas celui qui est debout. Jamais celui qui est à terre. »
Avant de s’endormir pour toujours, le géant Svyatogor remet son épée à des pèlerins, leur ordonnant de la donner au preux qui sera digne de défendre sa terre. Alors que les Tougars pillent la région, les pèlerins remettent l’épée à Ilya, un paysan vivant à Mourom qui a les jambes paralysées. Grâce à une potion magique, Ilya retrouve ses forces et s’en va se battre contre l’envahisseur qui a enlevé son épouse Vassilissa. Il devra affronter mille dangers pour devenir le preux qui mérite gloire et immortalité.
« S’il m’est plus cher que d’autres, je ne saurai pour autant jamais le pardonner »
Après avoir été brièvement journaliste et, surtout, décorateur de théâtre, Alexandre Ptouchko s’impose dès la fin des années 20 comme le grand pionnier du cinéma d’animation soviétique. Ce qui lui vaudra de se voir parfois affubler du surnom de « Walt Disney russe ». Ainsi, après avoir réalisé de nombreux courts-métrages, il s’illustre en 1935 avec son premier long-métrage, « Le nouveau Gulliver », grande et fastueuse fresque animée par 1500 marionnettes qui émerveillera le public jusqu’en Amérique. Un film qui marquera le début d’une carrière entièrement dédiée à des répits épiques familiaux, pour la plupart inspirés de contes et légendes traditionnels russes (« La fleur de pierre », « Le tour du monde de Sadko » qui obtient le Lion d’argent à Venise en 1953) ainsi que de classiques de la littérature russe (« La petite clef d’or » d’après Tolstoï, « Le conte du Tsar Saltan » et « Rouslan et Ludmilla » d’après Pouchkine). Tourné à l’apogée de la carrière du cinéaste, en 1956, « Le géant de la steppe » reste aussi célèbre pour avoir été le premier film soviétique tourné en cinémascope.
« Je ne me battrai pas pour le prince. Si j’accepte de combattre, c’est pour la Russie notre mère. Je mets tout mon courage à son service »
Inspiré des contes traditionnels du folklore russe, « Le géant de la steppe » est un récit d’aventure centré sur le personnage mythique d’Ilya Mouromets, héros emblématique de la Rus’ de Kiev (12-13ème siècle). Ce dernier, brave paysan handicapé de naissance, se verra confier– tel l’élu – la force et l’épée d’un vieux chevalier agonisant pour défendre le royaume et le peuple russes. Ce qui donnera lieu à une folle épopée durant laquelle il devra affronter aussi bien des créatures légendaires (le rossignol-brigand) que l’impitoyable tsar Kaline et sa Horde d’or de guerriers tatars. En cela, Alexandre Ptouchko signe ici une grande fresque épique teintée de fantastique, qui mêle habilement des éléments de comédie et de tragédie (par le biais des personnages de la femme et du fils du héros). Si le récit est mené sans temps mort, « Le géant de la steppe » brille avant tout par la beauté de ses décors, costumes et autres effets spéciaux (arbres qui plient, monstre aux joues qui gonflent) qui font de ce film une œuvre captivante. Il faut dire qu’outre sa créativité bien connue, le cinéaste put disposer pour cette superproduction fastueuse de moyens hors normes, à l’image des 100 000 soldats (et autant de chevaux) mobilisés comme figurants pour donner vie à d’impressionnantes scènes de bataille. Sur le fond, en revanche, le patriotisme exacerbé qui transpire du scénario (Grande Russie toute puissante face aux envahisseurs et aux corrupteurs, propagande soviétique oblige) laissera sans doute le spectateur actuel beaucoup plus perplexe, d’autant que celui-ci est parfois renforcé par le jeu assez outrancier des acteurs. En cela, il convient donc d’apprécier ce « Géant des steppes » pour ce qu’il est, à savoir un conte d’aventure homérique et trépident autant qu’un beau livre d’images.
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Le blu-ray : Le film est présenté en version restaurée dans un Master 2k, et proposé en version originale russe (2.0) ainsi qu’en version française (2.0). Des sous-titres français sont également disponibles.
Côté bonus, le film est accompagné d’une Présentation du film par Christian Lucas (2022, 27 min.), de « Ptouchko l’enchanteur » par Stéphane Derderian (2022, 15 min.), d’un Diaporama d’affiches et photos et d’une Bande-annonce originale.
Édité par Artus Films, « Le géant de la steppe » est disponible dans une belle édition collector digibook blu-ray + DVD + livre depuis le 1er mars 2022.
Le site Internet d’Artus Films est ici. Sa page Facebook est ici.
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