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04 Jun

Justin de Marseille

Publié par Platinoch  - Catégories :  #Films noirs-Policiers-Thrillers

Un grand merci à Pathé pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le blu-ray du film « Justin de Marseille » de Maurice Tourneur dans sa version restaurée HD.

Justin-de-Marseille-Bluray« Marseille, c’est comme une belle poule : quand on l’a vu une fois, on l’a dans la peau »

Dans les années 1930, deux bandes rivales règnent sur Marseille. Lors de l’arrivée du bateau Le Mauritanie, un incident éclate : escorté par sa bande de malfrats, le parrain napolitain Esposito dérobe une cargaison d’opium destinée à la mafia chinoise, empiétant alors sur le territoire de Justin, l’enfant du pays. Celui-ci n’apprécie pas du tout ce coup d’éclat qui désorganise le marché de la contrebande. La guerre des gangs est déclarée…

« Je tiens à te rassurer moi-même : ceux qui ont tiré sur ma voiture tout à l’heure, ce sont des maladroits ! »

Justin-de-Marseille-1Maurice Tourneur fut en son temps une sorte d’aventurier. Un insatiable touche-à-tout qui aura multiplié les expériences et vécu plusieurs vies en une. D’abord illustrateur pour la presse, il s’engage très jeune dans l’armée et découvre à cette occasion l’Afrique du Nord. De retour en France après plusieurs années d’aventures en Afrique coloniale, il devient brièvement l’assistant du grand sculpteur Auguste Rodin. Mais se découvrant soudainement une passion pour le théâtre, il abandonne son poste pour se consacrer à la scène, d’abord comme comédien puis surtout comme metteur en scène. Passionné par son métier, il mène ainsi une prolifique carrière, dirigeant pas moins de 400 pièces en près de quinze ans. Mais avec attiré par l’industrie naissante du cinéma, il abandonne petit à petit la scène pour le grand écran au détour des années 1910. Son talent et son goût de l’aventure lui valent l’opportunité de tenter sa chance à Hollywood. Il y passera près de 15 ans (de 1914 à 1928), devenant là-bas l’un des réalisateurs phare de cette période. Il revient en France au début des années 30, période de l’avènement du cinéma parlant. C’est à cette époque qu’il engage son propre fils, Jacques, comme assistant et monteur de ses films. Ce dernier partira au milieu des années 30 mener sa propre carrière de réalisateur à Hollywood, où il s’imposera comme l’un des maître du film fantastique et du film noir (on lui doit notamment le mythique « La féline » avec Simone Simon).  

 

« Qui peut dire si celui qui voit le soleil aujourd’hui le verra encore demain ? »

Justin-de-Marseille-2En ce début des années 30, le cinéma français se prend d’un étrange engouement pour la Provence et plus particulièrement pour la Cité Phocéenne. Le succès des œuvres de Pagnol - et notamment de sa fameuse trilogie « marseillaise » - n’y est sans doute pas étranger. Mais plus encore que son soleil et que l’accent chantant de ses habitants, Marseille dégage alors - dans une France où l’on ne voyage pas encore beaucoup - un certain charme exotique. Il faut dire qu’avec son légendaire port, la ville est une porte ouverte sur le vaste monde et sur les terres lointaines : l’Indochine, l’Algérie, l’Afrique, les Etats-Unis... Un point de départ pour tous les volontaires en quête d’aventures. Et un point d’arrivée pour de nombreuses marchandises plus ou moins illicites, donnant lieu à toutes sortes de trafics. Bien avant Jacques Deray et son « Borsalino », Maurice Tourneur décidait avec « Justin de Marseille » de s’intéresser au revers du décor marseillais et notamment aux mafias qui rongeait déjà la ville. Un sujet plutôt nouveau dans l’univers du cinéma français. Mais Tourneur, qui revenait d’un long intermède en Amérique au cours duquel il avait connu les grandes heures de la prohibition, allait pouvoir insuffler une modernité et une efficacité toute américaine à son film. Un film résolument ancré dans un certain réalisme social (les vieilles rues peuplées de marchands ambulants, les troquets pleins de matelots de passages, les bordels, les hôtels de passes miteux), qui surprend même par sa liberté de ton et par l’audace dont il fait preuve pour son époque (Tourneur présente des personnages asiatiques et noirs autrement qu’en serviteurs et présente même un couple mixte, chose alors extrêmement rare au cinéma). Si le récit - la lutte entre les gangs pour le contrôle de la ville - se fait plutôt prenant, on s’étonne cependant de la vision un peu manichéenne (et parfois limite comique) des maffieux : le clan des napolitains étant composés de vulgaires et brutaux gangsters, sans foi ni loi (on les voit voler, tuer, s’associer plus ou moins à un petit proxénète) tandis que Justin et sa bande sont presque présentés comme des bienfaiteurs, des redresseurs de torts, garants d’un certain ordre social. D’ailleurs, le personnage de Justin est présenté comme une sorte de gentil poète romantique, chanteur et guitariste à ses heures perdues et admirateurs des clairs de lune sur le vieux port, dont on ne saura finalement rien de ses activités (sic)... Voilà donc un film bien étrange, parfois inégal, mais fort agréable à regarder.

 

Justin-de-Marseille

 

***

Le blu-ray : Le film est présenté dans une version intégralement restaurée à partir d’un master 2K. Il est proposé en version originale française, avec un sous-titrage optionnel. Côté bonus, il est accompagné de trois modules documentaires : une rétrospective sur la carrière de Maurice Tourneur par Bertrand Tavernier (33’), une présentation du film par Bertrand Tavernier (17’), et une discussion autour du film entre Philippe Meyer et Bertrand Tavernier (14’).

Edité par Pathé, « Justin de Marseille » est disponible dans une très belle édition combo DVD + Blu-ray depuis le 1er juin 2016.

 

« La fin du jour », « Voici le temps des assassins », « La belle équipe » et « Tartarin de Tarascon » sortent simultanément dans la même collection.

 

Le site Internet de Pathé est ici. Sa page Facebook est ici.

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Le site sans prétention d'un cinéphile atteint de cinéphagie, qui rend compte autant que possible des films qu'il a vu!