Les Ardennes
Un grand merci à Diaphana ainsi qu’à l’Agence Darkstar pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le DVD du film « Les Ardennes » de Robin Pront.
« Vous étiez sages, petits, dans les Ardennes. Peut-être à cause du bon air... »
Un cambriolage tourne mal. Dave arrive à s’enfuir mais laisse son frère Kenneth derrière lui. Quatre ans plus tard, à sa sortie de prison, Kenneth, au tempérament violent, souhaite reprendre sa vie là où il l’avait laissée et est plus que jamais déterminé à reconquérir sa petite amie Sylvie. Ce qu’il ne sait pas, c’est qu’entre-temps, Dave et Sylvie sont tombés amoureux et mènent désormais une vie rangée ensemble.
« Quand je te vois je repense à toutes les décisions de merde que j’ai prise dans ma vie et qui font que j’ai cette vie là »
L’industrie naissante du cinéma belge avait été asphyxiée par les effets pervers du Plan Marshall. Au point que jusque dans les années 60, le cinéma du plat pays se résuma quasiment à sa (prestigieuse) production de documentaires. Il faut en effet attendre la fin des années 60 pour assister au renouveau du cinéma belge. Un renouveau essentiellement centré sur la Wallonie et de la Belgique francophone, sous l’impulsion de réalisateurs comme André Delvaux ou Chantal Akerman, qui durera jusqu’aux succès des années 90 (Les palmes d’or des Frères Dardenne et le « C’est arrivé près de chez vous » de Rémi Belvaux). Depuis les années 2000 la tendance s’est quelque peu inversée et la dynamique semble en faveur du jeune cinéma flamand, particulièrement actif et créatif. A l’image des récents succès de « Alabama Monroe » et « La merditude des choses » (Felix Van Groeningen), « Hasta la vista » (Geoffrey Enthoven), « Bullhead » (Michael R. Roskam) ou encore de « Loft » et « La mémoire du tueur » (Erik Van Looy). Jeune prodige de trente ans, remarqué pour son court-métrage « Injury time » (2010) consacré au hoologanisme et porté par Matthias Schoenaerts, Robin Pront signe avec « Les Ardennes » son premier long-métrage. A noter que le film est une adaptation d’une pièce de théâtre écrite par l’acteur Jeroen Perceval, qui tient le rôle principal du film.
« Je veux être comme tout le monde. Avoir une vie banale. »
« Les Ardennes », une région isolée, verdoyante et sauvage, constituée de forêts impénétrables. Pour Dave et Kenny, la région reste le symbole des jours heureux et des week-ends insouciants de l’enfance. Une sorte d’âge d’or révolu pour ces deux jeunes hommes qui ont pris le chemin de la petite délinquance. Pour son premier film, Robin Pront signe un polar social sur trois personnages en quête de rédemption : anciens délinquants et toxicomanes, Dave et Sylvie sont désormais rangés des voitures et rêvent d’une vie ordinaire tandis qu’après avoir passé quatre années en prison, Kenny ne rêve que de reconquérir Sylvie. Mais avec une noirceur infinie, le réalisateur nous rappelle qu’il n’est pas possible d’échapper à son destin. Sur fonds de rivalités entre frères, son polar prend des tournures de tragédie classique, brassant les thèmes de la trahison, de la jalousie, de la vengeance et du meurtre, sans la moindre empathie pour ses personnages. La quête du paradis perdu prendra alors des allures de voyage – sans retour - au bout de l’enfer. Avec une étonnante maitrise, Robin Print signe là un polar nerveux et désespéré, dont la saveur repose sur quelques saillies d’humour belge (forcément) absurde (un travesti tueur, une invasion d’autruches durant une fusillade) qui éclairent un petit peu ce film noir comme la nuit.
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