Le souffle de la violence
Un grand merci à Sidonis Calysta pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le blu-ray du film « Le souffle de la violence » de Rudolph Maté.
« Les hommes trouvent toujours de bonnes raison pour se tuer les uns les autres »
Vétéran de la Guerre de Sécession, John Parrish met son ranch en vente, bien décidé à retourner s’installer avec sa fiancée dans l’Est des Etats-Unis.
Si la puissante famille Wilkinson lui fait une offre, il la refuse, l’estimant ridiculement basse.
Mais les Wilkinson ne sont pas des gens auxquels on dit « non ». Pour faire plier Parrish, ils emploient les grands moyens. Ce qu’ils vont bientôt regretter…
« Vous étiez mourant en arrivant dans ce pays et vous n’estimez rien lui devoir ? »
Né au sein de l’Empire austro-hongrois au crépuscule du 19ème siècle, Rudolph Maté connait une première carrière en Europe en tant que chef opérateur. Travaillant d’abord pour les studios de Budapest, il s’impose rapidement comme l’un des meilleurs directeurs de la photographie du vieux continent, ce qui lui vaut de travailler aux quatre coins de l’Europe. Il travaille ainsi pour le danois Carl Theodore Dreyer (« La passion de Jeanne d’arc », « Vampyr ») ou encore pour l’italien Augusto Genina (« Prix de beauté » avec Louise Brooks). La montée de l’antisémitisme le pousse néanmoins à répondre aux sollicitations américaines et ainsi à quitter l’Europe. A Hollywood, il travaille durant une quinzaine d’années pour les plus grands réalisateurs de l’époque (Hawks, Wyler, Vidor, Lubitsch...), obtenant notamment cinq nominations à l’Oscar de la meilleure photographie. A partir de 1947 cependant, il s’émancipe et débute sur le tard une carrière de réalisateur au cours de laquelle il signera une grosse vingtaine de films en quinze ans. Pour l’essentiel, on retiendra ses films noirs (« Mort à l’arrivée », « Midi gare centrale »), ses films d’aventures (« Le voleur de Tanger ») et ses westerns (« Marqué au fer », « Les années sauvages », « L’attaque de la rivière rouge »). En 1955, il réalise ainsi le western « Le souffle de la violence », d’après le roman « Smokey valley » de Donald Hamilton, dont les écrits seront à nouveaux adaptés à l’écran trois ans plus tard par William Wyler pour « Les grands espaces ».
« Vous avez de bons équipiers. Mais se battront-ils pour vous ? »
De prime abord, « Le souffle de la violence » apparait comme un western des plus classiques. Son intrigue, tournée vers la notion de possession de la terre et sur la résistance des petits éleveurs face aux ambitions d’un magnat local qui veut les déposséder à tout prix, n’est pas sans rappeler certains classiques du genre (« L’homme des vallées perdues », « Terre sans pardon », « Les écumeurs », « Le cavalier de la mort »…). Sauf que le film de Mate a quelque chose en plus. A commencer par un scénario foisonnant et d’une étonnante densité. Ainsi, les personnages ont ici une réelle épaisseur, le film prenant le temps de les développer à bon escient. Ces derniers, d’ailleurs, sortent un peu des sentiers battus, qu’il s’agisse du petit rancher initialement décidé à ne pas prendre part au conflit, ou du tyran, devenu impotent à la suite de ses exactions. Ou encore de sa femme, qui joue sournoisement un double jeu. Mais ce qui intéresse surtout le cinéaste ici, c’est leur évolution psychologique, qu’il développe en refusant tout manichéisme. Et tandis que le héros qui refusait de prendre parti (s’étant toujours considéré comme un étranger de passage) finira par s’investir corps et âme en prenant la tête de la révolte, son némésis prendra conscience tardivement de sa folie et de la vacuité de ses ambitions. Surtout, le film s’intéresse à leur caractère jusqu’au-boutiste – ils préfèreront sacrifier leurs biens, leurs proches et tout perdre que de capituler – qui engendra la violence et le chaos. Magnifié par les teintes chaudes de son Technicolor, le film offre également de très belles scènes d’action et de confrontations viriles à souhait, tout au long d’un récit où la tension ne cesse de monter crescendo. Enfin, on saluera son casting quatre étoiles, composé notamment de Glenn Ford, Edward G. Robinson, Barbara Stanwyck ou encore Brian Keith. Rien de moins ! Un western très plaisant, donc, doublé d’une belle redécouverte.
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Le blu-ray : Le film est proposé dans un master restauré, en version originale américaine (2.0) ainsi qu’en version française (2.0). Des sous-titres français sont également proposés.
Côté bonus, le film est accompagné de deux présentations par Patrick Brion et par Bertrand Tavernier.
Edité par Sidonis Calysta, « Le souffle de la violence » est disponible en DVD ainsi qu’en blu-ray depuis le 9 mai 2017.
Le site Internet de Sidonis Calysta est ici. Sa page Facebook est ici.
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