Le testament du Docteur Mabuse
Un grand merci à Tamasa Diffusion pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le blu-ray du film « Le testament du Docteur Mabuse » de Fritz Lang.
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« Le meurtre je connais. J’ai déjà tué deux hommes. C’est pour ça que je ne veux plus en entendre parler »
Devenu fou, Mabuse, le célèbre criminel, est interné dans un hôpital psychiatrique. Grâce à ses pouvoirs hypnotiques, il tient en son pouvoir Baum, le directeur de l’asile. Ainsi, il parvient à remettre sur pied une inquiétante bande de malfaiteurs. Le commissaire Karl Lohmann et le bandit repenti Kent parviendront-ils à démanteler le réseau ?
« Je veux du travail. C’est humiliant d’être ici. Ça pousse les hommes à devenir des criminels ! »
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Criminel aussi génial que machiavélique, doté de pouvoirs psychiques particulièrement puissants, le Docteur Mabuse reste dans la culture populaire comme l’une des plus grandes incarnations du Mal. S’il fut d’abord un personnage de fiction littéraire (né de la plume de l’auteur luxembourgeois Norbert Jacques), le Docteur Mabuse fut, surtout, popularisé par le cinéma. (Anti)héros d’une dizaine de films en l’espace d’un siècle, le personnage reste intimement associé au génial Fritz Lang, grand maitre de l’expressionnisme et cinéaste internationalement reconnu, qui lui consacra pas moins de trois films : « Docteur Mabuse le joueur » (1922), « Le testament du Docteur Mabuse » (1933) et, plus tard, lorsqu’il reviendra de son exil hollywoodien, « Le diabolique Docteur Mabuse » (1960).
« L'âme des hommes doit être effrayée jusqu'au plus profond d'elle-même par des crimes inexcusables et apparemment absurdes ; car le but ultime du crime est d'instaurer le règne absolu du crime, de créer un état total d'insécurité et d'anarchie fondé sur la destruction des idéaux d'un monde condamné au naufrage. »
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Onze ans un premier opus particulièrement marquant, on retrouve donc peu ou prou le Docteur Mabuse là où on l’avait laissé, c’est à dire à l’asile. Avec toujours cette question de savoir si sa cruauté relève de la folie ou bien si celle-ci n’est qu’un prétexte pour cacher sa férocité. Enfermé dans sa cellule, il demeure néanmoins toujours à la tête d’une organisation terroriste occulte, chargée de mettre en œuvre ses plans maléfiques en exécutant des actions criminelles. Pour l’arrêter, seuls se dresseront sur sa route un ancien de ses lieutenants, rongé par la culpabilité, et le commissaire Lohmann (toujours interprété par l’imposant Otto Wernicke), déjà en charge de la traque de « M le maudit » sorti deux ans plus tôt. Mais plus encore que son intrigue policière à tiroir, « Le testament du Docteur Mabuse » vaut surtout pour le personnage même du titre qui revêt ici une dimension fantastique et quasi mystique, incarnation d’un esprit maléfique que rien ne semble pouvoir vaincre, pas même la mort, et qui poursuit son œuvre scélérate quitte à investir d’autres corps. Surtout, comme souvent dans les films de sa période allemande, « Le testament du Docteur Mabuse » pose un formidable miroir sur la société allemande de l’époque. Ainsi, si le premier film rendait compte en creux de la fragilité de la République de Weimar, « Le testament » témoigne pour sa part de cette période incertaine et tourmentée marquée par la crise économique, l’effondrement de la République et l’avènement de l’ordre nazi. Comme dans « M le maudit » avant lui, il y a là beaucoup d’éléments et de théories prémonitoires dans le film sur le pouvoir de la violence, la violence (institutionnalisée) du pouvoir ou encore sur l’embrigadement des foules. Vu d’aujourd’hui, les écrits hypnotiques de Mabuse en prison, sa voix martelant ses théories mortifères pour abrutir et asservir son auditoire, ou encore le fonctionnement secteur de son gang (qui élimine de façon systématique les traitres ou les réfractaires) font étrangement écho - consciemment ou non - au petit tyran moustachu et à la peste brune qui gangrènent alors le pays. C’est sans doute ce qui contribue à donner toute sa puissance et sa dimension intemporelle au film. Et qui le fit interdire immédiatement par Goebbels, contribuant ainsi à hâter l’exil du cinéaste.
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Le blu-ray : Le film est présenté en version intégrale restaurée dans un Master 2k et proposé en version originale allemande (1.0). Des sous-titres français sont également disponibles.
Côté bonus, le film est accompagné de « Un regard désespéré » par Faruk Günaltay : analyse du film et de son contexte (19 min.).
Édité par Tamasa Diffusion, « Le testament du Docteur Mabuse » est disponible en combo blu-ray + DVD depuis le 16 avril 2019.
Le site Internet de Tamasa Diffusion est ici. Sa page Facebook est ici.
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