Eugénie Grandet
Un grand merci à Ad Vitam ainsi qu’à Arcadès pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le DVD du film « Eugénie Grandet » de Marc Dugain.
« Est-ce un péché que d’espérer un grand amour ? »
Felix Grandet règne en maître dans sa modeste maison de Saumur où sa femme et sa fille Eugénie, mènent une existence sans distraction. D’une avarice extraordinaire, il ne voit pas d’un bon œil les beaux partis qui se pressent pour demander la main de sa fille. Rien ne doit entamer la fortune colossale qu’il cache à tous. L’arrivée soudaine du neveu de Grandet, un dandy parisien orphelin et ruiné, bouleverse la vie de la jeune fille. L’amour et la générosité d’Eugénie à l’égard de son cousin va plonger le Père Grandet dans une rage sans limite. Confronté à sa fille, il sera plus que jamais prêt à tout sacrifier sur l’autel du profit, même sa propre famille…
« Qui ne respecte pas l’argent ne peut aspirer au bonheur »
Drôle de parcours que celui de Marc Dugain. Expert-comptable de formation, ce dernier a ainsi d’abord vécu une première (et fructueuse) carrière d’entrepreneur dans le domaine de la finance. Mais c’était sans compter sur son amour des lettres. Et d’un coup de pouce du destin qui allait lui permettre de rencontrer le succès dès son premier roman, « La chambre des officiers », paru en 1998. Alors qu’il n’a même pas quarante ans, Dugain décide alors de changer radicalement de vie pour se consacrer à sa véritable passion de l’écriture. Un pari payant puisque le succès ne se démentira pas avec ses romans suivants, tous marqués par une même appétence pour les sujets historiques : Hoover et la mainmise du FBI sur la société américaine (« La malédiction d’Edgar »), la Russie et le traumatisme soviétique (« Une exécution ordinaire »), la résistance en France (« Heureux comme Dieu en France »). Mais alors qu’il enchaine les romans avec boulimie, il s’intéresse de plus en plus au cinéma. Son roman « La chambre des officiers » ayant déjà été adapté avec succès par François Dupeyron en 2001 (avec à la clé deux Césars et une sélection en compétition à Cannes), il débutera derrière la caméra en 2010 en portant à l’écran son propre roman « Une exécution ordinaire », puis recommencera avec « La malédiction d’Edgar », docu-fiction qu’il réalise cette fois pour la télévision. Après avoir adapté en 2017 le roman de Chantal Thomas, « L’échange des princesses », il adapte en 2021 Balzac et son « Eugénie Grandet ».
« Ne t’attache pas à lui. Ton père se mettra en travers au prétexte qu’il est ruiné »
Comme toutes les grandes figures de la littérature, l’auteur de la Comédie humaine a vu son œuvre largement adaptée que ce soit en France ou à l’étranger. Mais il est vrai qu’après un regain d’intérêt dans les années 1990/2000 (« La belle noiseuse », « Le Colonel Chabert », « La cousine Bette », « Ne touchez pas la hache »), l’œuvre de Balzac avait un peu disparue des écrans. L’année 2021 marque donc son retour au premier plan – en France du moins – puisque sont sortis à quelques semaines d’intervalles « Illusions perdues » de Xavier Giannoli et « Eugénie Grandet » de Marc Dugain. Deux récits forts, mus par une même dénonciation des faiblesses humaines qui conduisent invariablement à la déchéance : la vanité dans le premier cas et la cupidité dans le second. C’est qu’à force de vivre par et pour l’argent, l’autoritaire Félix Grandet fera son malheur et, surtout, celui de ses proches. A commencer par sa fille, à qui il interdit jusqu’à l’amour véritable, ne voyant en son soupirant qu’un vil désargenté seulement intéressé par son argent. Mais si cette (libre) adaptation permet à Dugain (comme le fait également Gianolli) de dresser des parallèles astucieux et pertinents avec les maux de notre époque (cynisme, course effrénée et immorale à l’argent et au profit comme unique moteur du monde, mais aussi par ricochet émancipation de l’héroïne par rapport aux obligations sociales de son époque), la froideur de sa mise en scène au parti pris très épuré (les scènes semblent d’ailleurs s’enchainer comme des tableaux tant le montage est sec) rend par moment le film assez déstabilisant. Un peu dommage, car derrière le casting est très solide, à l’image d’un Olivier Gourmet toujours impeccable, ou de la gracile et touchante Joséphine Japy.
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Le DVD : Le film est présenté en version originale française (5.1 et 2.0). Des sous-titres français pour malentendants sont également disponibles.
Côté bonus, le film est accompagné d’un entretien avec le réalisateur Marc Dugain et les comédiens.
Édité par Ad Vitam, « Eugénie Grandet » est disponible en DVD ainsi qu’en blu-ray depuis le 1er février 2022.
Le site Internet d’Ad Vitam est ici. Sa page Facebook est ici.
Le site Internet d’Arcadès est ici. Sa page Facebook est ici.
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