Mutafukaz
Un grand merci à AB Vidéo pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le blu-ray du film « Mutafukaz » de Guillaume « Run » Renard et Shojiro Nishimi.

« Ici c’est la loi de Darwin : un regard de travers et tu te retrouves du mauvais côté de l’évolution »
Angelino est un jeune loser parmi tant d’autres à Dark Meat City, une mégalopole sans pitié sous le soleil de Californie. La journée, il livre des pizzas dans tous les recoins de la ville et la nuit, il squatte une chambre d’hôtel minable avec son coloc Vinz et une armada de cafards qui font désormais un peu partie de sa famille. À la suite d’un accident de scooter lorsque son chemin a croisé par inadvertance la divine Luna, une fille aux cheveux noir de jais, notre jeune lascar commence à souffrir de maux de tête et d’étranges hallucinations. Des hallucinations, vous avez dit ? Hmm, peut-être pas… Pourchassé par des hommes en noir, Angelino n’a plus aucun doute : il est pris pour cible. Mais pourquoi lui ?
« On dit que les histoires d’amour finissent mal en général. Je ne sais pas les miennes n’ont jamais commencé ! »

Chez Ankama, éditeur français ayant principalement fait son succès dans l'univers du jeu vidéo mais qui a depuis élargi ses activités à l'édition, on connaissait déjà la saga « Dofus », qui avait d'abord été adaptée sous forme d'une série animée pour la télévision avant de donner lieu à un mémorable film d'animation pour le cinéma, hélas passé un peu inaperçu. Place donc cette fois à l'autre succès de la firme avec « Mutafukaz », saga de bande-dessinée en cinq tommes (2006-2015) de Guillaume « Run » Renard, qui a droit à son tour à son adaptation cinématographique. Pour ce faire, « Run » s'est adjoint les services de Shojirô Nishimi, spécialiste japonais de l'animation qui a notamment travaillé sur des films comme « Akira », « Mind game » ou encore « Amer béton ». « Mutafukaz » est ainsi une plongée fictive dans la banlieue américaine version ghetto west coast. A l'écart de la grande ville où atterrissent inlassablement tous les losers et les oubliés du rêve américain.
« Arrête de chercher du divin dans la moindre trace de merde ! »

C'est là aussi que par ricochet prospèrent gangs et trafics en tous genres. Un lieu de violence, où l'espoir d'une rédemption ou d'une vie meilleure n'existe pas. Et où il vaut mieux baisser les yeux si on veut avoir une chance de survivre. Prenant un peu le contrepied des films de gangsta américains (« Boyz'n the hood » notamment), Run et Nishimi signent ici une chronique foisonnante et rafraichissante du ghetto et des laissés pour compte. Adaptation fidèle de la célèbre BD, le film brille par la densité de son intrigue qui aborde de nombreux thèmes (la violence, la ségrégation, le racisme, la justice...) et qui mêle habilement des éléments de polar, de films de gangsters, de western, de comédie et de science-fiction. Mais le film brille aussi par la richesse de son univers, qui semble puiser sa source dans la littérature contemporaine. Un peu comme si la mélancolie désabusée de John Fante croisait la noirceur d'Edgar Allan Poe et la paranoïa de Kafka. Le tout servi par des dialogues formidablement mordants et accrocheurs, idéalement déclamés par Orelsan et Gringe. Il en ressort un film d'une remarquable singularité et d'une vraie profondeur qui, de par son esprit éminemment positif (ode à l'amitié et à l'abnégation), demeure extrêmement attachant. Après l'adorable « Dofus », Ankama s'offre là une seconde belle réussite formelle.

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Le blu-ray : Le film est présenté en version française ainsi qu’en version anglaise (toutes deux 5.1). Des sous-titres français et français pour malentendants sont également disponibles.
Côté bonus, le film est accompagné de deux modules : « Rencontres avec le Studio 4°C » et « Le travail avec le Studio 4°C ».
Edité par AB Vidéo, « Mutafukaz » est disponible en DVD ainsi qu’en blu-ray depuis le 20 février 2019.
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