Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
13 May

M le maudit

Publié par Platinoch  - Catégories :  #Drames, #Films noirs-Policiers-Thrillers

Un grand merci à Tamasa Diffusion pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le blu-ray du film « M le maudit » de Fritz Lang.

 

M_le_maudit

« Comment s’emparer d’un criminel qui ne laisse aucune trace ? Personne ne le connait mais il est là parmi nous. C’est peut-être votre voisin. »

 

Toute la presse ne parle que de ça : le maniaque tueur d’enfants, qui terrorise la ville depuis quelques temps, vient de faire une nouvelle victime. Chargé de l’enquête, le commissaire Lohmann multiplie les rafles dans les bas-fonds. Gênée par toute cette agitation la pègre décide de retrouver elle-même le criminel : elle charge les mendiants et les clochards de surveiller chaque coin de rue…

 

« Vous pourriez tous être autrement si vous vous en donniez la peine. Alors que moi je subis cette malédiction que je porte en moi et qui me brûle »

 

M_le_maudit_Fritz_Lang

Bien avant qu’Hollywood ne devienne La Mecque du cinéma mondial, son centre de gravité se trouvait en Allemagne. Et plus précisément à Berlin, capitale de la libérale République de Weimar et centre culturel avant-gardiste alors en pleine effervescence. Pionnier de cette jeune industrie aux côtés de ses collègues Friedrich Wilhelm Murnau ou Robert Wiene et grande figure du mouvement expressionniste, Fritz Lang accède dès les années 20 à une reconnaissance internationale grâce à une série de films à l’esthétique remarquable (« Les Nibelungen », 1924) et à la dimension visionnaire (« Metropolis », 1927). Le début des années 30 marque l’avènement du cinéma parlant auquel Fritz Lang saura parfaitement s’adapter :alors au sommet de sa gloire, il signe ainsi ses deux films les plus aboutis – « M le maudit » (1931) puis « Le testament du Docteur Mabuse » (1933) – avant finalement de prendre la route de l’exil vers Paris puis Hollywood pour fuir le péril nazi avec lequel il refuse de se compromettre.

 

« Là où il y a contrainte, il n’y a plus de libre arbitre. Et là où il n’y a pas de responsabilité, aucune peine ne peut être prononcée »

 

M_le_maudit_Gustaf_Grudgens

A Berlin, un inconnu, insaisissable, enlève et assassine les enfants. De quoi susciter la panique dans la ville : parents inquiets, citoyens révoltés, police sur le qui-vive. Même la pègre, inquiète de la multiplication des descentes de police qui menace son business, se lance dans la traque du mystérieux tueur. Librement inspiré du « Vampire de Düsseldorf » (véritable tueur en série qui défraya la chronique judiciaire allemande des années 20 et terrorisa la population), « M le maudit » est ainsi un film policier âpre qui marque sa noirceur jusqu’alors inédite au cinéma. Et pour cause, au-delà même des crimes d’enfants (présentés intelligemment en hors champs, par le biais d’un ballon qui roule seul ou d’un ballon qui s’envole dans des lignes électriques), il présente une ville en ébullition, peuplée de personnages immoraux, déviants et tous plus détestables les uns que les autres (policiers inquiétants, truands cyniques et violents, mendiants professionnels) qui lui donne une apparence de cloaque. Le pire d’entre eux étant sans doute Hans Beckert, tueur pervers et vil au profil psychologique complexe et particulièrement bien décrit qui, de chasseur, deviendra au fil du récit une bête traquée. Il y ainsi quelque chose de dérangeant à voir ce dernier agir sournoisement selon un mode opératoire immuable (repérage puis « séduction » de ses victimes) rythmé par une inquiétante mélodie sifflée. Mais au-delà de son intrigue policière, « M le maudit » vaut surtout pour le portrait sans fard qu’il esquisse de la société allemande qui vit alors une période charnière marquée par l’effondrement de la République de Weimar et l’avènement concomitant du nazisme. Le portrait qu’il en dresse (effondrement des valeurs morales, institutionnalisation de la violence et de la dénonciation par et pour le peuple, justice populaire expéditive, traque, stigmatisation et élimination des individus considérés comme parasites…) revêt ainsi une dimension prophétique qui n’en est que plus glaçante. De quoi faire de ce film un jalon essentiel de l’Histoire du cinéma.

 

M_le_maudit_Peter_Lorre

 

****

Le blu-ray : Le film est présenté en version restaurée en 2K et proposé en version originale allemande (1.0). Des sous-titres français sont également disponibles.

 

Côté bonus, le film est accompagné de « M, un chef-d’œuvre visionnaire » par Faruk Günaltay : analyse du film et de son contexte (42 min.). Un livret avec des extraits du dossier pédagogique rédigé par Mireille Kentzinger pour l’opération « Lycéens et apprentis du cinéma » (16 pages) vient compléter cette édition.

 

Édité par Tamasa Diffusion, « M le maudit » est disponible en combo blu-ray + DVD depuis le 16 avril 2019.

 

Le site Internet de Tamasa Diffusion est ici. Sa page Facebook est ici.

Commenter cet article

Archives

À propos

Le site sans prétention d'un cinéphile atteint de cinéphagie, qui rend compte autant que possible des films qu'il a vu!