Queimada
Un grand merci à Rimini Éditions pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le DVD du film « Queimada » de Gillo Pontecorvo.
![Queimada](https://image.over-blog.com/1-vEYc6cpihm8awQwQKBxErH2LY=/filters:no_upscale()/image%2F1492925%2F20220404%2Fob_41b02f_queimada-2.jpg)
« Mon opinion se limite au comment des choses. Pas au pourquoi. »
Au début du XIXè siècle, Sir William Walker débarque à Queimada, une île des Antilles. Officiellement, il est là pour son plaisir. En réalité, il a été envoyé par le gouvernement britannique pour une mission secrète : fomenter une révolte des esclaves qui avantagera les anglais.
« C’est la loi du profit : on édifie pour gagner. Et pour gagner plus, il faut parfois détruire ce qu’on a édifié »
![Queimada_Marlon_Brando](https://image.over-blog.com/E_2j2qo2WffjroaxW7W50LUFlHs=/filters:no_upscale()/image%2F1492925%2F20220404%2Fob_fe3b90_queimada-4.jpg)
Issu d’une vieille famille juive italienne, Gillo Pontecorvo aurait pu choisir une profession scientifique comme ses illustres frères, respectivement ingénieur atomique et généticien. Mais la deuxième guerre mondiale en décidera autrement : profondément marqué par les lois antisémites et la traque des juifs, Pontecorvo bascule dans la clandestinité et rejoint le maquis italien, devenant au passage compagnon de route du Parti Communiste italien. Devenant journaliste après la guerre, il se consacrera ensuite au cinéma, toujours animé par la même ambition de dénoncer les injustices sociales du monde. Sa courte filmographie (cinq films au total) sera ainsi dédiée à la condition des hommes (« Un dénommé Squarcio »), à la dénonciation du fascisme (« Kapo » et « Opération Ogre ») et au rejet au colonialisme, thème auquel il consacre ses deux films les plus célèbres : « La bataille d’Alger » (1966) et « Queimada » (1969).
« La liberté, personne ne te la donne, c’est à toi seul de la saisir »
![Queimada_Evaristo_Marquez](https://image.over-blog.com/BXXZ-rkJrNPJyFEDlFXXsvXhf9M=/filters:no_upscale()/image%2F1492925%2F20220404%2Fob_67ac70_queimada-2-2.jpg)
Ile fictive perdue dans la mer des Antilles, « Queimada » est ainsi un territoire sous domination portugaise convoité par la couronne britannique, qui rêve d’y étendre son influence autant que sa mainmise sur la production et le commerce sucriers. Pour mener à bien ses visées expansionnistes, l’Angleterre envoie donc sur place un mystérieux aventurier devant agir en sous-main pour organiser une révolte visant à renverser le gouvernement local pour mieux le remplacer par un autre, plus favorable aux intérêts britanniques. Très librement inspiré de la vie de l’aventurier américain William Walker, éphémère président du Nicaragua, « Queimada » nous plonge ainsi dans les arcanes du pouvoir et des stratégies expansionnistes des grandes puissances. Et de fait, sur la base d’un scénario particulièrement malicieux et lucide, Pontecorvo nous montre comment le cynique William Walker tire de façon assez méthodique toutes les ficelles du jeu : d’abord par le choix d’un esclave suffisamment charismatique pour fédérer ses semblables, puis en l’aider à fomenter une révolte populaire pour chasser le gouvernement en place, le tout avec la complicité d’une partie de l’élite économique de l’île. Avec une grande attention portée aux détails, le cinéaste nous montre ainsi la mise en place de tout le mécanisme nécessaire à cette opération. Jusqu’à ce que celui-ci ne devienne hors contrôle et n’échappe finalement à ses instigateurs, obligés de réprimer dans le sang la véritable révolution qui se profile. A l’évidence, à travers le modèle exposé à « Queimada », Pontecorvo dénonce le principe même du colonialisme - y compris dans des formes plus dissimulées post indépendance des anciennes colonies - qui n’est qu’un moyen pour les puissances les plus fortes d’asservir les peuples les plus faibles. Si la démonstration est parfois un peu simpliste et manichéenne, le film lui demeure terriblement audacieux et ne laisse jamais indifférent. D’autant que Marlon Brando y est une nouvelle fois formidable, autant qu’Evaristo Marquez, acteur amateur colombien qui lui donne remarquablement la réplique.
![Queimada_Gillo_Pontecorvo](https://image.over-blog.com/Hkx68Wss2N5fUMRe9QgsY9L1t3U=/filters:no_upscale()/image%2F1492925%2F20220404%2Fob_762748_queimada-3.jpeg)
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Le DVD : Le film est proposé en version courte (106 min) ainsi qu’en version longue (124 min., version italienne uniquement). En version courte, il est proposé en version française (2.0), anglaise (2.0) et italienne (2.0). Des sous-titres français sont également disponibles.
Côté bonus, le film est accompagné d’une Interview du scénariste Giorgio Arlorio(39 min.), de « Gilles et moi » : interview du monteur Mario Morra, monteur (25 min.), d’une Interview de Gillo Pontecorvo (archives RTBF, 5 min.) ainsi que d’une Bande-annonce. Un livret de 24 pages vient compléter cette édition.
Édité par Rimini Éditions, « Queimada » en édition double blu-ray ou double DVD depuis le 21 septembre 2021.
La page Facebook de Rimini Éditions est ici.
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