Comme les autres
« Je sais que je serai un bon père. Quest-ce que les hétéros ont de plus que moi ? »
Emmanuel et Philippe vivent le parfait amour. Ils sont beaux, ont de belles situations professionnelles, et vivent bien entourés de leurs familles et de leurs amis. Pourtant Emmanuel ressent de plus en plus le désir davoir un enfant. Un désir non partagé par Philippe. Il faut dire que pour un couple homosexuel laffaire nest pas simple : ils nont pas légalement pas le droit dadopter ni davoir officiellement recours à une mère porteuse. Et leurs amies ne semblent pas prêtes à les aider. Jusquau jour où le hasard fait croiser leur chemin avec celui de Fina, une jeune et belle étudiante argentine dont lautorisation de séjour est périmé
« Je voudrais quon fasse un mariage blanc et quon fasse un enfant. Joublie de vous faire part dun détail qui a son importance : je suis gay ! »
Diplômé de la FEMIS et déjà réalisateur de deux courts (« Vita Sexualis » en 1994, « Dernière séance » en 2001), le réalisateur Vincent Garenq sétait davantage orienté vers la réalisation de séries pour la télé (il a travaillé notamment sur « Sous le soleil ») et de documentaires. Dailleurs, à la base, cest sur le mode du documentaire que le réalisateur souhaitait aborder la question de lhomoparentalité. Mais le sujet, jugé un peu trop « tabou » et pas assez « vendeur », navait pas réussi à convaincre les producteurs de débloquer des financements. Cest donc sur le mode de la fiction que Garenq a décidé de traiter de ce sujet, loccasion pour lui de signer son premier long.
« Tu trouves que cest normal de me laisser tomber pour aller faire un môme à une pauvre fille que tu as rencontré deux secondes dans la rue ? Et tu crois que ton môme sera épanoui entre un pédé et une SDF péruvienne ? »
On savait le cinéma français (en particuliers les réalisateurs de « comédies ») toujours prompt à semparer des sujets de murs et de société. Tels les mariages mixtes (« Mauvaise fois »), ou lhomosexualité (en vrac « Lhomme de sa vie », « Les Témoins », « Les chansons damour », ou encore « Avant que joublie »). Le sujet encore largement tabou de lhomoparentalité nest dès lors quun prolongement logique de cette tendance. Reste que pour un premier long, Garenq noptait pas pour la facilité. Mais à la surprise générale (ou pas, dailleurs !), le réalisateur coupe court à tout début de polémique ou même de débat en tuant son sujet dans luf et en évitant de parler ouvertement des sujets qui fâchent. Car que montre-t-il au juste ? Un couple homosexuel archi caricatural (professions libérales, bourrés de fric, bobos propriétaires dun pavillon à Belleville) qui se déchire suite aux désirs de paternité non partagé de lun des deux. Après une scène de visite de linspectrice de ladoption qui montre lhypocrisie du système (un homme seul a le droit dadopter, pas un couple dhommes), le film retombe comme un soufflet dans une histoire politiquement très correcte, très lisse, et totalement balisée. Prévisible de bout en bout, le film ségare même dans le grand nimporte quoi et limprobable (le héros recueille une inconnue sans papier chez lui sans la connaître, celle-ci tombe amoureuse de lui et lui fait un enfant quelle lui abandonnera avant de définitivement disparaître de sa vie). Un traitement « léger et naïf », bourré de bons sentiments et de clichés, qui illustre parfaitement le choix du réalisateur dorienter son film plus vers la comédie aseptisée et grand public que vers un film de murs politique, ne permettant jamais à ce « Comme les autres » dêtre à la hauteur de son sujet. Une approche un poil hypocrite, qui nempêche cependant pas cette petite comédie de nous divertir et de nous réserver quelques moments assez drôles (la présentation de la jeune femme à la famille du héros, les scènes avec Anne Brochet). Dommage cependant que le film ne dépasse jamais visuellement la qualité dun téléfilm. Reste la prestation des comédiens, plutôt sympathiques et dont émerge tout de même la trop rare Anne Brochet, quon découvre dans le registre de la comédie. Sympathique et vite oublié.
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