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08 Apr

Deux soeurs pour un roi

Publié par platinoch  - Catégories :  #Drames

« Toute famille acquiert de l’avancement grâce à ses filles. Et notre fille mérite mieux qu’un fils de marchand »

Angleterre, 16ème siècle. La rumeur court selon laquelle le Roi Henri VIII ne partage plus la couche de sa femme, celle-ci n’arrivant pas à lui donner un héritier mâle. Voyant là l’occasion inespérée de se rapprocher du Roi et d’obtenir ses faveurs, Sir Boleyn et son beau-frère, le Duc de Norfolk, veulent à tout prix faire la fille du premier, Anne, la favorite du Roi. Mais la rencontre organisée tourne mal suite à quelques maladresses de cette dernière, et le Roi jette contre toute attente son dévolue sur leur fille cadette, Mary. Celle-ci, fraîchement mariée à un fils de commerçant, est cependant poussée par sa famille dans le lit royal. Si les choses semblent se passer pour le mieux, la grossesse de Mary risque cependant de compromettre les espoirs de sir Boleyn. En effet, désormais alitée et ne pouvant plus satisfaire les besoins du Roi, ce dernier risque d’aller voir ailleurs et de se désintéresser de Mary. Sir Boleyn décide alors de faire revenir son aînée, Anne, d’exil, afin d’occuper du Roi, le temps que Mary lui donne un héritier mâle. Mais Anne, ambitieuse, manipulatrice, et forte d’un esprit de revanche sur sa sœur, n’entend pas jouer les doublures temporaires…

« Durant votre exil en France, apprenez des femmes de la cour la façon dont elle contrôlent les hommes non pas en frappant du pied, mais en leur faisant croire que ce sont eux qui dirigent. Tel est le pouvoir des femmes. »

Décidément, la famille royale britannique, peu importe l’époque, aura toujours inspiré les cinéastes. Que ce soit la Reine actuelle, avec le multiprimé « The queen » de Frears (2006), ou la saga « Elizabeth » de Kapur (1998 et 2007). Au tour cette fois-ci des sœurs Boleyn, dont l’Histoire n’a pas encore révélé tous les secrets, d’être transposée sur grand écran. Plus exactement, ce film est l’adaptation du roman « The other Boleyn girl » de l’écrivain Philippa Gregory, publié en 2001. Un roman qui avait déjà fait l’objet d’une première adaptation pour la télévision en 2003. Produit par la BBC, le téléfilm était notamment porté par Natascha McElhone. Ce coup-ci, c’est Justin Chadwick qui s’y colle. Scénariste et comédien, il n’avait jusqu’ici réalisé que des séries et des téléfilms pour la télévision britannique. Ce « Deux sœurs pour un roi » est donc son premier long métrage pour le cinéma. Il bénéficie notamment d’un scénario écrit par Peter Morgan, spécialiste du genre qui avait notamment signé ceux de « The queen », ainsi que d’un téléfilm sur Henri VIII. « Deux sœurs pour un roi » a été présenté en Sélection Officielle, hors compétition, lors du Festival de Berlin 2008.

« Ne te réjouis pas trop vite. Il te fera ce qu’il m’a fait. »

Bien que retraçant l’histoire des sœurs Boleyn de manière romancée et hypothétique, « Deux sœurs pour un roi » s’annonçait intéressant sur bien des points. Tout d’abord, le film devait nous plonger dans l’époque trouble de l’Angleterre du 16ème siècle, période du terrible règne du Roi Henri VIII, connu pour avoir été particulièrement cruel envers ses épouses et sa progéniture, et qui aura surtout été à l’origine de la rupture anglaise d’avec le Vatican. D’autre part, après le succès de la très réussie saga « Elizabeth », le film allait mettre en lumière le règne précédent celui de cette grande Reine. Malheureusement, faisant fi de la réalité historique, le novice Gregory a opté pour un récit principalement centré sur la superficielle et tumultueuse relation de rivalité entre les deux sœurs Boleyn, plutôt que sur les troubles politiques de l’époque et du règne de Henri VIII à proprement parlé. Dès lors, les belles ambitions s’évaporent, le souffle de l’œuvre également, et l’intérêt historique est relayé au second plan. Reste deux portraits de femmes au cœur d’une tragédie, plutôt bien écrits avec à la clé une critique de la vénalité et de l’ambition démesurée, mais trop mélodramatique pour réussir à emporter pleinement notre adhésion. On ne pourra que regretter que Gregory n’ait pas su prendre exemple sur le flamboyant « Elizabeth », un film bénéficiant d’un incroyable souffle et qui arrivait à dresser un portrait fort de la Reine, tout en donnant une place centrale au contexte politique de l’époque et aux intrigues de cour.

« C’est ma sœur. Elle est une partie de moi-même. »

Car sur le plan de la réalisation, « Deux sœurs pour un roi » manque clairement d’envergure. Pas assez rythmé (on sent vraiment passer les deux interminables heures), tourné dans des décors en carton-pâte assez kitsch (les châteaux en intérieurs font faux, tout comme ce parti pris de propreté absolu, en inadéquation avec l’époque), la réalisation mollassonne et sans grand génie de Gregory ne permet jamais au film de prendre une dimension supplémentaire, ni de gagner ce souffle qui lui fait tant défaut. Finalement, le seul atout du réalisateur réside encore dans sa direction d’acteurs. Si le monoexpressif Eric Bana est d’entrée out par son absence criante de charisme pour interpréter un tel personnage et par son manque de subtilité dans son jeu, Scarlett Johansson et Natalie Portman sont bel et bien au rendez-vous et assurent l’essentiel. Toute en séduction, chacune dans son registre va laisser finalement apparaître des émotions et une fragilité à fleur de peau. Le choix d’avoir inversé les rôles habituels en donnant le rôle de la « gentille et fragile » à Johansson et de la « méchante et calculatrice » à Portman s’avère judicieux, et les deux actrices font étalage de toute leur classe ainsi que d’une belle complicité et complémentarité. En cela, elles sont certainement les deux plus prometteuses (pour ne pas dire les meilleures) de leur génération. Dommage cependant pour elles (et pour nous) que le projet ne soit pas tout à fait à la hauteur de ce qu’il aurait du être et qu’il se cantonne à étudier la relation mi-amour mi-haine des deux frangines. Un tel sujet aurait mérité un bien meilleur traitement, ainsi qu’un peu plus de chair, de souffle, et d’intrigue, afin de dépasser le stade du simple mélo dramatique pour atteindre celui de fresque historique digne de ce nom. Dès lors, le film reste sympathique et distrayant. Sans plus.  

  



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P
not at allbon, je vais sans doute me faire lyncher ou traiter de ringarde, mais tous les avis étant dans la nature, je suis donc totalement à contre-courant mais bon mon grand âge (43 ans!!!!) m'ayant fait baigner dans les somptueuses reconstitutions de la BBC , je ne découvre pas l'Histoire anglaise et loin de trouver mono expressif Eric Bana, j'ai au contraire trouvé que pour une fois on montrait ce roi si puissant miné par les doutes, et mené....à sa perte par ses propres démons. De plus, si les deux belles sont à la hauteur des rôles, c'est le cas de tout le casting, désolée pour les "chagrins"... Je ne suis pas ennuyée une seconde, et ai joué le parti de l'intrigue romanesque;" the tudors" reprend lui, les faits très différemment; l'image est superbe, les ombres aussi.........Bref, une fan, qui paie rarement deux fois son billet et qui là n'a pas hésité à le faire. Peut-être que certains devraient penser aussi à une approche féminine du pouvoir, du sacrifice ou de l'ambition....
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B
J'avoue que je ne sais trop quoi penser, tant je ne me suis pas vraiment ennuyé sans être totalement convaincu. Je vous trouve sévère sans vous donner tort. C'est sûrement un signe. pourtant, j'ai trouvé que les actrice étaient à la hauteur de la tâche. Par contre, Eric Bana n'a pas assez envergure pour Henry VIII. C'est tiré d'un roman. Qu'elle est la part de la vérité historique alors ?
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S
Je suis dans l'ensemble d'accord avec toi sauf que je ne l'ai pas du tout trouvé distrayant, et je n'ai pas trouvé les acteurs à la hauteur, au contraire. Et puis effectivement la mise en scène est d'une platitude qui frise le ridicule. Une film totalement raté.
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