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14 Apr

Les disparues

Publié par platinoch  - Catégories :  #Westerns

« Quand mon frère est tombé malade, j’ai prié pour que tu reviennes. Quand j’ai du le mettre moi-même en terre, j’ai prié pour que tu crèves. »

1886, Nouveau-Mexique. Maggie Gilkeson vit dans une ferme isolée avec ses deux filles, Lilly et Dot, ainsi qu’avec deux chasseurs, dont le beau Brake qui n’est autre que son amant. Fermière, soigneuse, Maggie travaille dur, sans rien demander à personne, mais peine à sortir de sa situation précaire. Un jour, un vieil homme débarque à la ferme pour des soins. Ce dernier, un blanc habillé en indien, n’est autre que le père de Maggie, qu’il l’a abandonné alors qu’elle n’était qu’une enfant pour partir vivre avec les indiens. Profondément blessée, cette dernière refuse la main tendue. Pourtant, quelques heures plus tard, lors d’une attaque d’un groupe d’indiens renégats, Brake et son collègue seront assassinés et Lilly sera enlevée, comme d’autres jeunes filles de la région, pour être revendue à des proxénètes mexicains. Le shérif refusant de partir à la poursuite des assaillants, Maggie n’a d’autres choix que de demander à son père de l’aider à libérer Lilly. Une longue course poursuite commence alors…

« L’esprit inquiet ne rend pas l’homme heureux »

S’il est certainement l’un des réalisateurs les plus prolifiques de sa génération avec pas moins d’une vingtaine de longs métrages réalisés depuis 1977 et son « Lâchez les bolides », Ron Howard se sera également distingué par la grande variété des genres qu’il aura abordé. Ainsi, de la comédie (« Splash » en 1984, « En direct sur Ed TV » en 1999) au drame (« Backdraft » en 1991), en passant par la science-fiction (« Cocoon » en 1985), l’Héroic fantasy (« Willow » en 1988), le film d’aventure (« Apollo 13 » en 1995, « Da Vinci code » en 2006) ou encore le biopic (« Un homme d’exception » en 2002, « De l’ombre à la lumière » en 2005), Howard s’est montré relativement à l’aise dans tous les domaines, et profondément inclassable. Pas étonnant dès lors de le retrouver aux commandes d’un western, en l’occurrence « Les disparues », sorti en 2004. D’autant qu’avant de devenir réalisateur, Ron Howard s’est illustré en tant que comédien dans ce genre, avec des participations aux séries « Gunsmoke » et « Bonanza », mais surtout en jouant aux côtés des stars vieillissantes du genre, comme John Wayne et James Stewart dans « Le dernier des géants » (Siegel – 1976), ou encore Lee Marvin dans « Du sang dans la poussière » (Fleischer – 1974). Un retour aux sources en quelque sorte, qui aura été très préparé par toute l’équipe, Tommy Lee Jones apprenant même les rudiments d’un dialecte apache. Ce qui n’aura pas empêché le tournage d’être particulièrement mouvementé, l’équipe ayant du subir des tempêtes de glace et de neige, ainsi que plusieurs jours de rafales de vents de sable. Des imprévus renforçant le parti pris de réalisme quant à l’hostilité du milieu et de rudesse de la vie des pionniers voulu par le réalisateur. Le film a été présenté en compétition officielle au Festival de Berlin 2004.

«  Il y a deux chiens en toi : l’un est le bien l’autre le mal. Et les deux s’entredévorent en permanence. Lequel gagne ? »

Genre phare du cinéma américain des années 30 à 60, le western semblait s’être franchement essoufflé depuis ses derniers feux des années 70, sans pour autant totalement disparaître des écrans (« Pale rider », « Impitoyable » d’Eastwood, « Young guns » de Cain, « Silverado » de Kasdan, ou encore « Danse avec les loups » et « Open Range » de Costner). Mais suffisamment en tout cas pour rendre le projet de Howard atypique et curieux. Et très vite, on sent que le bonhomme a des références en la matière, reprenant des thèmes prisés du genre. A commencer par l’enlèvement de la jeune femme par des indiens et la course poursuite qui s’en suit, tout droit inspiré de John Ford et de sa « Prisonnière du désert » (1956). De même avec ce personnage ambigu de blanc ayant adopté le mode de vie des indiens, qu’on retrouve dans de nombreux western comme « Little big man » (Penn – 1971), « Un homme nommé Cheval » (Silverstein – 1969), ou encore « Danse avec les loups » (Costner – 1991). Seule la présence d’un personnage central féminin forte, rebelle, et sachant faire parler la gâchette pouvait sembler quelque peu original, à condition de ne pas avoir vu les séries B « Mort ou vif » et autres « Belles de l’ouest ». Et c’est d’ailleurs là que se situe le principal défaut du film d’Howard, dans ce trop plein de références, faisant de son western un film terriblement balisé et sans aucune originalité. Ce qui ne veut pas dire que son film ne soit pas efficace. Au contraire, l’ensemble se suit sans réel déplaisir, et les scènes d’actions, comme les deux fusillades finales sont assez énergiques. Mais Howard se perd trop dans un scénario très manichéen (les méchants demeurent les indiens, postulat ayant disparu des scénarios depuis la moitié des années 60 et la réhabilitation de ceux-ci, tout comme la rédemption – le sacrifice du mauvais père – vient préserver une petite morale pas très audacieuse), laissant une place trop importante au surnaturel (comme le coup du shamanisme, aussi chiant et inutile que de le « Blueberry » de Kounen), qui empêche le film d’acquérir une certaine crédibilité.

« Tu as vécu comme un blanc. Tu auras droit à une mort d’indien »

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 Le côté référencé du film se ressent également dans la mise en scène de Ron Howard. En recherche permanente d’une certaine forme d’académisme propre aux westerns de l’âge d’or, Ron Howard ne peut s’empêcher de faire par moment de la surenchère (le coup de la crue subite de la rivière) quand les chef d’œuvre du genre jouaient au contraire sur l’épure. Néanmoins, à l’instar de ses modèles, il réussit parfaitement à capter l’aspect grandiose des paysages, et à en faire un personnage à part entière. De même, le soin apporté à la photographie et à l’éclairage semble particulièrement léché, donnant à l’ensemble une apparente authenticité, renforçant également tant l’hostilité du milieu qu’une sensation anxiogène. La direction d’acteurs s’avère également très satisfaisante, notamment grâce à la prestation de la toujours impeccable Cate Blanchett. Tommy Lee Jones se montre également à la hauteur de son personnage, bien que celui-ci s’avère trop stéréotypé et prévisible pour avoir une aura plus importante. Les autres seconds rôles se montrent également à la hauteur avec notamment les belles prestations d’Aaron Eckhart, d’Evan Rachel Wood, ou encore de Val Kilmer. Pour conclure, Ron Howard renoue ici avec le genre du western, en signant un film un peu trop académique, référencé, et manquant un poil d’originalité. Néanmoins, si le film ne marquera clairement pas les esprits, il n’en est pas moins un divertissement honnête, bien ficelé et efficace. Sans plus, mais c’est déjà pas si mal !

  



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B
Encore un que je n'ai pas vu mais dont il faudra que je vois pour enrichir mon panel de western.
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