Drive
« Ce que je fais dans la vie ? Je conduis »
Un jeune homme solitaire, "The Driver", conduit le jour à Hollywood pour le cinéma en tant que cascadeur et la nuit pour des truands. Ultra professionnel et peu bavard, il a son propre code de conduite. Jamais il n’a pris part aux crimes de ses employeurs autrement qu’en conduisant - et au volant, il est le meilleur ! Shannon, le manager qui lui décroche tous ses contrats, propose à Bernie Rose, un malfrat notoire, d’investir dans un véhicule pour que son poulain puisse affronter les circuits de stock-car professionnels. Celui-ci accepte mais impose son associé, Nino, dans le projet. C’est alors que la route du pilote croise celle d’Irene et de son jeune fils. Pour la première fois de sa vie, il n’est plus seul. Lorsque le mari d’Irene sort de prison et se retrouve enrôlé de force dans un braquage pour s’acquitter d’une dette, il décide pourtant de lui venir en aide. L’expédition tourne mal… Doublé par ses commanditaires, et obsédé par les risques qui pèsent sur Irene, il n’a dès lors pas d’autre alternative que de les traquer un à un…
« J’ai un truc que les grandes écuries n’ont pas : j’ai un pilote. Avec un volant entre les mains ce gamin peut tout faire »
Prodige du cinéma danois, Nicolas Winding Refn réussissait des débuts remarqués en réalisant « Pusher », immense trilogie consacrée aux bas-fonds de Copenhague et aux crapules notoires qui y prospèrent de trafics en tous genres. Fort de ce succès, le réalisateur aura depuis réussi un parcours sans faute, ponctué de grands films aussi originaux qu’exigeants (« Le guerrier silencieux », « Bronson »), se construisant au passage une filmographie d’une rare cohérence. Des qualités rares, qui ne passent pas inaperçues. Pour preuve, Ryan Gosling, l’acteur qui monte à Hollywood, a fait appel à lui pour le diriger dans ce « Driver ». Adapté du roman de James Sallis, « Driver » est ainsi son premier film américain. C’est aussi le premier film dont il ne signe pas lui-même le scénario. Présenté en compétition à Cannes, le film repartira auréolé du Prix de la mise en scène.
« C’est rare d’avoir une deuxième chance dans la vie, pas vrai ? »
Outre le fait qu’il soit un grand réalisateur, Nicolas Winding Refn est aussi un cinéphile averti, imprégné de références prestigieuses. Son « Guerrier silencieux » n’était-il pas à ce titre une forme de relecture du « Aguirre la colère de Dieu » de Werner Herzog ? Avec « Drive », il aborde son premier film de commande à sa façon habituelle. Puisant ses références dans le meilleur du film de genre d’hier (« Le samouraï », « The driver », « L.A. Confidential », « Police Fédérale Los Angeles ») et d’aujourd’hui (« La nuit nous appartient », « Collateral », « No country for old men »), il signe un polar efficace et sophistiqué. Tel un pilote chevronné, il s’amuse à passer les vitesses, alternant lenteur générale et accélérations par à-coups, lui permettant de composer une ambiance froide et éthérée qui est pour beaucoup dans la réussite du film. Passant en un éclair de moments de romance pure à la sauvagerie la plus extrême (magnifique scène du baiser dans l’ascenseur qui précède un défonçage de crâne mémorable), son film souffre cependant – et c’est là son seul défaut – d’un certain manque d’originalité dans son intrigue. Un défaut compensé par une mise en scène extrêmement léchée dans laquelle le réalisateur fait montre de toute sa maestria (impressionnante scène du face à face final, qui alterne calme et déferlement de violence). Porté par un casting impérial (Ryan Gosling en héros mutique compose un excellent alter ego du « Samouraï » Costello) et une bande musicale savamment choisie, « Drive » sort du commun de la production cinématographique actuelle et s’impose comme étant un bon film. Un zest d’originalité en plus et on frôlait le chef d’œuvre.
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