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07 Feb

Into the wild

Publié par platinoch  - Catégories :  #Drames

« Le départ de Chris était inévitable. Et quand il le ferait ce serait avec sa démesure habituelle »

Etats-Unis. Christopher McCandless, à peine 22 ans, vient tout juste de sortir diplômé de l’université. Etudiant brillant, issu d’une famille aisée, un avenir radieux se dessine devant lui. Pourtant, au fond de lui, Christopher souffre d’un certain nombre de failles qu’il n’a jamais réellement surmonté, comme la relation houleuse de ses parents. Contre toute attente, renonçant au monde matérialiste et à l’amour de ses proches, il décide de partir à l’aventure sans laisser d’adresse ni prévenir personne. Rêvant de vivre en parfaite communion avec la nature quelque part dans l’immensité déserte de l’Alaska, il s’engage donc dans un long périple à travers tout le pays. Un périple qui sera peuplé de rencontres, de grands paysages, et d’épreuves…

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« Admettre que toute destinée est guidée par la raison, c’est anéantir toute la possibilité d’une vie »

 

Pour sa quatrième réalisation personnelle, Sean Penn, à qui l’on doit déjà « The indian runner » (1991), « Crossing guard » en (1995), et « The pledge » en (2001), prend pour sujet un fait divers tragique. En effet, ce film s’inspire de la vie de Christopher McClandless, jeune et brillant étudiant idéaliste, qui a tout plaqué du jour au lendemain, renonçant à sa confortable existence, pour vivre deux ans d’aventures à travers le pays. Deux années durant lesquelles il n’a plus donné signe de vie à ses proches, avec pour but d’aller vivre en harmonie avec la nature dans les étendues sauvages de l’Alaska. Malheureusement, cette ultime étape lui sera fatale, perdue au beau milieu de nulle part, il mourra, tout seul, de malnutrition et d’empoisonnement. Son corps sera retrouvé en septembre 1992 par des chasseurs, deux semaines après son décès. Entre réalité et fiction, le film nous propose de suivre le voyage initiatique et aventureux de Christopher, au grès de ses rencontres et de ses coups durs. Si cette histoire suscite depuis longtemps l’intérêt de Sean Penn, il lui aura fallu dix ans pour réaliser ce film, le temps que la famille de Christopher McClandless accepte pleinement ce projet. Du coup, Leonardo Di Caprio, premier choix du réalisateur il y a dix ans, étant de devenu trop vieux, c’est le jeune Emile Hirsch, déjà remarqué dans « The girl next door » et « Alpha dog », qui hérite du rôle. Le tournage n’aura pas été de tout repos, entièrement tourné en décor naturel, il aura fallu notamment pas moins de quatre cessions de tournage en Alaska pour obtenir des plans des paysages à toutes les saisons. Si le film a été plébiscité par l’ensemble de la presse, il fait figure de grand oublié par les différentes cérémonies de récompenses de fin de saison. Il a obtenu le Golden Globes de la meilleure chanson, mais ne comptera que deux nominations aux Oscars (meilleur second rôle masculin pour le vétéran Hal Holbrook, et meilleur montage).

 

« Si tu veux quelque chose dans la vie, il faut le saisir »

 

Difficile de critiquer ce film, très attendu et ayant reçu un très bon accueil critique, qui laisse pourtant un sentiment des plus mitigés. Clairement inspiré par les mythes libertaires et introspectifs de la Beat Génération (la référence à  « Sur la route » de Kerouac semble évidente), ce road movie permet de retrouver le goût prononcé de Sean Penn pour les personnages hors normes, jusqu’au-boutiste, en marge de la société, et en quête de solitude et de rédemption. Pour autant quelque chose ne prend pas. Ce Christopher a en lui quelque chose de pas attachant. Sa quête de solitude est assez amère, tiraillée entre une recherche de vérité sur lui-même et sur le monde, et la volonté de punir ses parents, couple embourgeoisé s’il en est qui à pris ses enfants en otage de leurs fréquentes crises de couple et qui est resté uni par et pour l’argent (pôv’ petit chéri, la vie est trop dure !!!). Du coup, devant la vacuité et l’égoïsme total de la démarche, on arrive jamais à avoir la moindre empathie pour ce héros. De ses questions existentielles (comme par exemple la culpabilité ressentie en tuant un élan pour le manger, le respect de la nature) certainement importantes mais trop scolairement traitées, en passant par les rencontres amélipoulinesques où tout le monde il est beau tout le monde il est gentil (pour le coup seul le vieil homme interprété par Hal Holbrook est vraiment émouvant), le film tourne assez vite à vide, et le parti pris contemplatif (le film dure près de 2h30 !) souligne encore plus les extraordinaires problèmes de rythme et de lenteur dont souffre ce film. Reste une réflexion anti-Sartrienne, d’autant plus intéressante qu’elle est formulée par Sean Penn l’enfant rebelle, selon laquelle l’enfer serait la solitude, le bonheur se trouvant au contact de ses semblables. La démonstration n’est pas dépourvue d’intérêt, mais étant trop maladroite, trop « facile » dans son côté moralisatrice, et (beaucoup) trop longue, elle ne parvient jamais réellement à convaincre.

 

« Il y a quelque chose de plus grand : quand on pardonne, on aime. Et quand on est aime, Dieu répand sa lumière sur nous »

 

Niveau réalisation, si Sean Penn semble en difficulté dans la gestion du rythme dans sa narration, on doit lui reconnaître un grand sens du cadrage. Les images des paysages et des décors naturels, bien que trop calibrés « Greenpeace » ou « WWF » pour être honnêtes, sont assez magnifiques. Jouant un rôle à part entière, cette nature est parfaitement mise en valeur par la magnifique photographie du français Eric Gautier. Dommage qu’il y ait trop d’abus concernant les effets visuels souvent inutiles (trop de ralentis, trop d’effets d’images saccadés) Sa direction d’acteurs, bien que de niveau tout à fait correcte, est cependant moins flamboyante. La faute peut-être à l’ambivalent Emile Hirsch. Si on ne peut pas lui reprocher son implication (il a réalisé lui-même toutes les cascades, y compris la descente des rapides en Canoë, il a également perdu 20kg pour la séquence finale), on peut en revanche lui reprocher un certain manque de charisme, quelque chose d’indescriptible qui fait qu’il attire assez mal la caméra. Derrière les seconds rôles étant assez courts et souvent stéréotypés, difficile de détacher les autres comédiens qui livrent dans l’ensemble de bonnes prestations. Pour autant, Hal Holbrook se révèle particulièrement attachant et émouvant dans son rôle de vieil homme solitaire. On aime également la douceur et la justesse de Catherine Keener.

 

« Le bonheur n’est réel que s’il est partagé »

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 Au final, sans être un ratage complet ou un navet, le nouveau film de Sean Penn reste quand même une déception. Loin du film philosophico-rebelle attendu, « Into the wild », est un trip naturaliste pour urbains en mal d’aventures et de grands paysages. Fable écologiste, décors naturels magnifiques, le film défend malgré tout une jolie morale sur la liberté. Pour le reste, le film pêche définitivement par toute sa recherche introspective et métaphysique de vérité. Trop scolaire, trop « facile », trop fade, elle ne convainc jamais vraiment, et les 2h20 du film paraissent de ce fait vite indigestes. Reste la dernière image, très émouvante pour le coup, celle du sourire lumineux et figé pour l’éternité du vrai Christopher McClandless. Espérons pour lui que sa quête aura trouvé un sens, qui fait cruellement défaut à ce film trop long, trop lisse, et laborieux. Sans aucun doute, Penn fera mieux la prochaine fois.

    



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J
Ici la grammaire est ailleurs !<br /> c'est pas un quête, c'est justement une "anti quête".<br /> Il décide de confronter pour finalement livrer son être à son environnement naturel, sans conditions, sans codes, sans proches, bref sans les fondamentaux de notre société moderne.<br /> Il veut recouvrer une relation intime avec la nature telle pouvaient connaître les amérindiens, mais naïvement sans s'armer de leur connaissance. <br /> En bon occidental après 2000 ans d'évolution, on ne peut comprendre ce genre de geste rétrograde, on se sent forcement "gêné".<br /> <br /> Cela nous fait rebondir sur notre condition comme être humain sur terre.<br /> Est-on en phase avec notre environnement ? peut on parler de fusion ?<br /> Peut on faire machine arrière comme Christopher McClandless a tenté de le faire ?
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A
Je n'aurais sans doute pas été aussi dure que toi, mais tu soulèves des points importants dans ta critique. La plus marquante selon moi étant celle de l'attachement au héros et au ralliement de sa quête. il est vrai que c'est l'aspect du film qui m'a le plus gêné, moi aussi: le fait de ne pas totalement comprendre pourquoi tant d'amertume de la part de Chris, tant d'entêtement et tant de refus devant les mains tendues, tant d'acharnement dans une quête qui semble, il est vrai, parfois vide de sens. Tant d'absolutisme reste sans doute difficile à digérer et à cautionner...
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