L'amour aux temps du choléra
« Dieu sait combien je tai aimée »
Colombie, fin du 19ème siècle. Florentino, jeune télégraphiste issu dun milieu modeste tombe amoureux dès le premier regard de Fermina, la fille dun riche entrepreneur. Sils échangent des lettres en cachette et se jurent un amour éternel, leur rêve de mariage se brise lorsque le père de Fermina découvre la relation entre les deux jeunes gens et décide demmener sa fille vivre loin de là dans la lointaine campagne. Les années qui passent nempêchent pas les deux amoureux de continuer leur correspondance. Mais Fermina finit par céder à la cour assidue de Juvenal, brillant médecin de grande réputation depuis quil a réussi à endiguer une épidémie locale de choléra. Un beau mariage, un statut social élevé, un voyage de plusieurs années à Paris, autant dire quelle finit par oublier son amour de jeunesse. Une situation qui ne partage pas Florentino, qui ne parvient pas à oublier Fermina. Devenu riche armateur, il tente de loublier en cumulant de manière désabusée les conquêtes féminines. Jusquà ce que le destin remette Fermina sur sa route
« Fermina, jattends ce moment depuis 51 ans, 9 mois et 4 jours. Je tai aimée tout ce temps-là. Depuis que mes yeux se sont posés pour la première fois sur toi. Et je fais le vux de têtre éternellement fidèle »
Pari ô combien ambitieux et risqué que de vouloir adapté un roman de Gabriel Garcia Marquez. Monument de la littérature latino-américaine reconnu mondialement (notamment pour son chef duvre « Cent ans de solitude »), lauréat du Prix Nobel de littérature en 1982, Garcia Marquez est connu pour la complexité de son style, mélange à la fois de réalisme, de romanesque, et de poésie. Ce film est ladaptation de son roman « Lamour aux temps du choléra », publié en 1985 et qui a été un grand succès littéraire international. Il sagit du quatrième roman de lauteur colombien a être adapté sur grand écran, après « La veuve Montiel » (Littin 1980), « Erendira » (Guerra 1983), et « Chronique dune mort annoncée » de Rosi en 1986, avec Rupert Everett. Film de commande, le projet a été impulsé par le producteur Scott Steindorf, qui voue une véritable admiration à ce roman et qui a lutté plusieurs années pour en obtenir les droits. Ladaptation, jugée par tous difficile, a été confiée au scénariste Ronald Harwood. Habitué des adaptations, il a notamment signé plusieurs scénarios pour Polanski (« Oliver Twist »), et a obtenu lOscar du meilleur scénario pour « Le pianiste » en 2002. Côté réalisation, les manettes ont été confiées au réalisateur anglais Mike Newell, à qui lon doit des films aussi divers que « Quatre mariages et un enterrement » (1994), « Donnie Brasco » (1997), « Le sourire de Mona Lisa » (2004), ou encore « Harry Potter et la coupe de feu » (2005).
« Tu es trop belle pour épouser un simple télégraphiste. A ton âge, lamour nest quune illusion »
Habitué des films à succès, linconstant Mike Newell a néanmoins démontré par le passé quil était capable du meilleur (« Quatre mariages et un enterrement ») comme du pire (« Le sourire de Mona Lisa »). En sattelant à ladaptation sur grand écran dun roman du maître Garcia Marquez, pourtant réputé comme étant inadaptable, Newell sest attaqué semble-t-il a un projet bien trop grand pour lui. Résultat des courses, il accouche dun film qui restera probablement comme le plus ennuyeux de lannée 2007. Comme dans le réussi « Le voile des illusions » (Curran 2007), adaptation dun roman de Somerset Maugham dont lhistoire est assez semblable, il y avait dans cette histoire de Garcia Marquez une grande histoire damour contrariée dans une ambiance coloniale matière à faire un grand film romanesque. Hélas, il nen est rien, la faute à une mise en scène consternante de mollesse. Se contentant daligner de belles images des paysages naturels et urbains aux couleurs bariolées, le film de Newell manque cruellement de souffle, de chair, dénergie, et surtout, de passion. Un comble pour un film damour! Là où il ne fallait surtout avoir peur de faire dans le sirupeux, Newell joue au contraire la froideur, privant sont films de toute émotion. Du coup, là où il y aurait pu avoir une belle fresque romantique, Newell ne dépasse jamais le stade du simple cucul. On pourra également lui reprocher linsertion de quelques touches humoristiques déplacées par rapport à la tonalité initiale du film (le coup du « viol » du héros sur le bateau, celui de lagression par le chat en plein coït). En ajoutant à cela des ellipses assez mal foutues et une fin prévisible et mièvre, on obtient de loin le film le plus insignifiant et interminable de lannée.
« - Comment définirais-tu lamour ?
- Lamour, cest tout ce quon fait quand on est tout nu : lamour spirituel en-dessus de la ceinture, lamour physique, en-dessous »
Côté réalisation, Newell rate également totalement son coup. Si on lui reconnaît les belles images exotiques des décors naturels amazoniens et la jolie musique qui accompagne le film (encore que par moment, ça fait trop Shakira), pour le reste, linspiration de Newell est restée dans ses chaussettes. Manquant cruellement de rythme, beaucoup trop long (2h10 !), le film reste dans sa forme totalement bancal. Même chose pour les effets visuels comme les maquillages censés vieillir les comédiens, dune rare laideur (le coup de la prothèses corporelle de Giovanna Mezzogiorno pour lui faire le corps dune femme de 72 ans vaut son pesant de cacahuètes !), sont indignes dune production de ce genre. Reste la direction dacteurs, aux abonnés absents. Javier Bardem est autant agaçant en jeune puceau autiste quen improbable Casanova vieillissant et dune laideur repoussante. Giovanna Mezzogiorno pourtant si fraîche dans « Juste un baiser » est méconnaissable, manquant de charme et de passion. Quand à Benjamin Bratt, il est plus crédible en play-boy au sourire ultra-brite quen médecin chercheur dans la lutte contre le choléra.
« - Pourquoi avez-vous autant de succès avec les femmes ?
- Parce quelles voient en moi quelquun de vide, en manque damour. Quelquun qui ne leur fera aucun mal »
Au final, « Lamour aux temps du choléra » a tout du film raté et indigeste : longueur, lourdeur, esthétisme discutable, adaptation écrite à la truelle, et interprétation bas de gamme. Mais pire que tout, le manque criant de passion et de sentiments finit par couler définitivement lensemble dans des abysses de nullité. Lensemble ne dépasse pas le niveau dun téléfilm de laprès-midi pour M6. Les deux heures les plus interminables et les plus longues de lannée 2007 au cinéma !
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