La taupe
« Il y a une brebis galeuse et nous devons la trouver »
1973. La guerre froide empoisonne toujours les relations internationales. Les services secrets britanniques sont, comme ceux des autres pays, en alerte maximum. Suite à une mission ratée en Hongrie, le patron du MI6 se retrouve sur la touche avec son fidèle lieutenant, George Smiley. Pourtant, Smiley est bientôt secrètement réengagé sur l’injonction du gouvernement, qui craint que le service n’ait été infiltré par un agent double soviétique. Epaulé par le jeune agent Peter Guillam, Smiley tente de débusquer la taupe, mais il est bientôt rattrapé par ses anciens liens avec un redoutable espion russe, Karla. Alors que l’identité de la taupe reste une énigme, Ricki Tarr, un agent de terrain en mission d’infiltration en Turquie, tombe amoureux d’une femme mariée, Irina, qui prétend posséder des informations cruciales. Parallèlement, Smiley apprend que son ancien chef a réduit la liste des suspects à cinq noms : l’ambitieux Percy Alleline, Bill Haydon, le charmeur, Roy Bland, qui jusqu’ici, a toujours fait preuve de loyauté, le très zélé Toby Esterhase… et Smiley lui-même. Dans un climat de suspicion, de manipulation et de chasse à l’homme, tous se retrouvent à jouer un jeu dangereux qui peut leur coûter la vie et précipiter le monde dans le chaos. Les réponses se cachent au-delà des limites de chacun…
« Sachez qu’ils vous surveillent. Si vous êtes pris, vous ne me connaissez pas. »
Après une quinzaine d’années durant lesquelles il mit son talent de réalisateur au service de la télévision et du cinéma suédois, Tomas Alfredson accédait à la reconnaissance internationale grâce à son quatrième long métrage, « Morse ». Récompensé lors de plusieurs festivals (Gérardmer, TriBeCa) et couronné d’une nomination aux BAFTA, ce succès lui ouvrait les portes d’une carrière internationale. Pour ses débuts aux manettes d’une grosse production britannique, Alfredson adapte John Le Carré. Et plus précisément « La taupe » (publié en 1974), premier volet de la « Trilogie de Karla » que complètent les romans « Comme un collégien » et « Les gens de Smiley ». Déjà adapté en 1979 par et pour la BBC (avec Alec Guiness dans le rôle de Smiley), le film pourrait faire l’objet d’une suite qui serait d’ores et déjà en préparation. Présenté en compétition officielle à la Mostra de Venise, « La taupe » obtient trois nominations aux Oscars, dont une pour Gary Oldman dans la catégorie Meilleur acteur.
« Nous sommes l’ultime rempart entre Moscou et la troisième guerre mondiale »
Dès l’immédiat après-guerre, la littérature anglaise a popularisé les récits d’espionnage. Il faut dire qu’en la matière, les principaux auteurs du genre (John Le Carré, Grahame Green, Ian Fleming) étaient tous d’anciens espions du Secret Intelligence Service reconvertis en écrivains. Très vite, deux types d’espions ont ainsi émergé dans la culture populaire : celui de Ian Fleming, à la fois viril, séducteur et sophistiqué, et ceux des romans de Le Carré et de Green, souvent des bureaucrates d’apparence assez banale, mais aux capacités cérébrales remarquables. A l’image des héros de « La maison Russie » ou de « The constant gardener », autres best-sellers de Le Carré ayant déjà fait l’objet d’une adaptation au cinéma. Avec « La taupe », Alfredson ressuscite le film d’espionnage à papa. C'est-à-dire à l’ancienne, épuré de tout effet spectaculaire, privilégiant une ambiance faite de décors austères, de costumes d’époque et de dialogues parcimonieux. Le problème, c’est que le réalisateur noie son récit dans une intrigue à tiroirs inutilement complexe et dont la logique finit par échapper, faute d’intérêt, aux spectateurs. Quant aux comédiens, Alfredson a beau avoir devant sa caméra la crème du cinéma anglais (Colin Firth, John Hurt, Tom Hardy, Toby Jones), ceux-ci sont tellement réduits à de brèves apparitions qu’ils ne sont jamais en mesure de sauver – un tant soit peu – le film. Monument d’ennui, cette « Taupe » qui n’accouche que d’une (toute petite) souris déçoit au final énormément.
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