Nous étions soldats
« - Nous nen serions pas là si lArmée Française navait pas été vaincue !
- Larmée Française ? ça existe ? »
Réputé pour sa qualité danalyse, son sens minutieux de la préparation et pour son audace militaire qui le pousse à essayer toutes les nouveautés techniques et matérielles à sa disposition pour optimiser lefficacité de ses troupes, le Colonel Moore se voit confier la mission dinstruire 400 hommes au déploiement de troupes par hélicoptère, en vue dune possible intervention au Vietnam. Il ne se passera finalement que quelques mois avant que le très paternaliste Moore et ses hommes soient envoyés au front. Et ce pour la première grande bataille officielle de la guerre entre forces américaines et viet-congs. Sur le site de X-Ray, dans la vallée de la Drang, Moore et ses hommes sont déposés par hélicoptère dans un secteur que larmée pense être un repère des combattants adverses. Il nétait pas prévu que Moore et ses hommes soient encerclés et coupés du monde par plus de 2000 soldats ennemis
« - Vous êtes doù, soldat ?
- Du Texas
- Cest la première phrase censée que jentends aujourdhui ! »
Inspiré du livre « We were soldiers once and young » (1992), co-écrit par le lieutenant-colonel Moore (interprété par Gibson) et par le journaliste Joseph Galloway, le film « Nous étions soldats » retrace la véritable bataille de la Drang, survenue le 14 novembre 1965, et qui est considérée aujourdhui comme le premier affrontement militaire direct entre larmée Viet-Cong et larmée américaine au Vietnam. Sorti sur les écrans en 2002, « Nous étions soldats » est le second long métrage du réalisateur Randall Wallace, qui avait déjà signé « Lhomme au masque de fer » (1998). Plus connu pour son travail de scénariste, il a notamment signé le scénario de « Braveheart » (1995) et de « Pearl Harbor » (2001). Ce « Nous étions soldats » demeure un projet denvergure certaines scènes de batailles nécessitaient jusquà 11 caméras pour la même scène pour lequel les comédiens ont été obligés de suivre le même stage commando de préparation que les militaires de lépoque. Enfin, ce film marque les retrouvailles entre Wallace et le comédien Mel Gibson, huit ans après « Braveheart ».
« - Le hasard a voulu que je me retrouve à commander le 7ème régiment de cavalerie. Comme Custer. Je me demande dailleurs ce qui a bien pu se passé dans sa tête quand il a compris quil menait ses hommes au massacre
- Custer était une femmelette, mon Colonel. Pas vous. »
Véritable tragédie humaine (60.000 morts côté américain, 1.5 million de morts pour les combattants vietnamiens, 5 millions de civils tués) et militaire, la guerre du Vietnam aura durablement traumatisé lAmérique. Si celle-ci sest soldée par la cuisante défaite politique et militaire américaine que lon sait, elle aura été tout au long de sa durée un facteur de division au sein de lopinion et du peuple américain, une large frange de celui-ci reprochant à ladministration de mener une guerre coûteuse, barbare et meurtrière parfaitement inutile. De cette guerre si particulière verront le jour toute une série de films de guerre de grande qualité, desquels ressortira clairement ce traumatisme et une critique des autorités de lépoque. On pense notamment à des films tels que « Platoon » (Stone 1986), « Apocalypse now » (Coppola 1979), « Né un 4 juillet » (Stone 1989), « Outrages » (De Palma 1989), ou encore « Voyage au bout de lenfer » (Cimino 1979). Mais cette vision critique pour ne pas dire parfois engagée semblait forcément en totale opposition avec la présence au générique de ce film de lultra conservateur Mel Gibson. Et nos pires craintes se confirment vite ! Contrairement à Terrence Malick et son somptueux « La ligne rouge » ou encore Clint Eastwood et son excellent diptyque « Mémoires de nos pères » et « Lettres dIwo Jima », Randall Wallace ne connaît pas la notion d « humanisme ». Son film nest ainsi quun ramassis de conneries patriotiques à la gloire des Etats-Unis. Ainsi, le réalisateur ne recule devant rien et enfile les poncifs les plus effarants comme des perles : si on passera outre la promotion du modèle familial idéal américain tout droit sorti dune publicité pour les produits laitiers (papa officier paternaliste et responsable, maman courage qui joue les officiers auprès des femmes des autres soldats, et leur 5 beaux enfants blonds), on ne pourra que soffusquer du couplet sur la ségrégation raciale (si larmée est le seul facteur dégalité, le soldat noir de la bande ne se bat pour gagner une reconnaissance et pour la cause des siens dixit sa femme, mais par amour du drapeau), ainsi que sur les relents racistes du film (anti-français puisquon a pas été capables de mater linsurrection vietnamienne, mais surtout anti-vietnamiens, avec pour preuve la comparaison entre les deux officiers, laméricain courageux, qui ne quitte pas ses hommes au front et qui pleure chacun deux, tandis que son homologue vietnamien se planque dans un bunker envoyant massivement ses hommes se faire massacrer pour rien). De même, on ne pourra que brocarder lhallucinante bêtise des dialogues (comme la prière du très pieux Gibson avant le combat qui se termine par un laïus genre « Nécoute pas la prière de nos ennemis, fait les brûler en enfer, cest tout ce quils méritent »), qui ne trouve dégale que la théâtralité avec laquelle meurent les G.I. (un soldat meurt en disant « Je suis fier de mourir pour mon pays »). Autant déléments qui font de ce film un énorme nanar boursouflé, dont le message pro-patriotique demeure des plus douteux.
« Nous qui avons fait la guerre ne cesseront jamais de la voir. Dentendre les cris dans le silence de la nuit. Cette histoire est la nôtre, car nous étions soldats »
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Ceci est dautant plus dommage que dun point de vue strictement cinématographique, ce film est en soit un bon film de guerre. Basé sur le même principe qu « Assault » ou « Zoulou » - lencerclement en terrain hostile dun groupe par un adversaire plus nombreux qui lisole du reste du monde « Nous étions soldats » nous offre ainsi dhomériques scènes de combats (qui représentent une bonne moitié du film), qui pour le coup sont particulièrement réussies et spectaculaires, tant dans les corps à corps que dans les bombardements au napalm. Côté interprétation, si on est dabord bluffé par le gros casting dont jouit le film, on constate vite que la prestation des comédiens est assez inégale. A leur décharge, les personnages sont tellement mal écrits et caricaturaux quil est parfois difficile de leur donner du crédit. Dans le genre, la palme de la nullité revient à Chris Klein, acteur déjà très limité qui hérite du personnage le plus caricatural de tous. Cest guère mieux du côté de Madeleine Stowe, de Keri Russell, ou encore de Greg Kinnear (ridicule scène où il braque son arme sur un officier), qui jouent tous les faire-valoir. Seuls Mel Gibson et Barry Pepper, et à moindre niveau Sam Elliott, sen sortent à peu près correctement. Insuffisant cependant pour relever le niveau dun film au message patriotique aussi primaire, bas du front, et nauséabond. Cela est dautant plus dommage que sur la forme, Wallace réussit malgré tout à réaliser un impressionnant film de guerre. Du gâchis.
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