The proposition
« Australie
Dans quel nouvel enfer sommes-nous ? »
Dans l'arrière-pays australien, à la fin du XIXème siècle, deux hommes situés aux deux extrémités de la loi passent un marché secret et décisif... Le Capitaine Stanley s'est juré de "civiliser" le pays sauvage australien. Ses hommes ont capturé deux des quatre frères du gang Burns : Charlie et Mike. Les bandits ont été jugés responsables de l'attaque de la ferme Hopkins et de l'assassinat de toute une famille. Arthur, le plus âgé des frères Burns et chef du gang, s'est réfugié dans la montagne. Le Capitaine Stanley propose alors un marché à Charlie : retrouver son frère aîné en échange
de son pardon, et de la vie sauve pour le jeune Mike. Charlie n'a que neuf jours pour s'exécuter...
« Si vous devez en tuer un, assurez-vous de les tuer tous »
Près de vingt ans (« Ghosts of the civil dead » en 1990) quon était sans nouvelles de John Hillcoat. Il faut dire que le réalisateur australien sétait fait plutôt discret, réalisant à peine quatre films en 20 ans. Il aura donc fallu attendre la sortie de « La route », adaptation très attendue du roman de Cormac McCarthy (également auteur de « No country for old men ») qui lui a valu le Prix Pulitzer en 2007, pour retrouver sa trace. Un retour aux commandes dun gros film dont la médiatisation aura eu raison de la frilosité de nos distributeurs qui profitent de cette occasion pour sortir de manière quasi simultanée (sur un circuit malgré tout très restreint) son film précédent, « The proposition », réalisé en 2005. Un projet que le réalisateur porte en lui depuis de nombreuses années et quil a coécrit avec son ami, le musicien Nick Cave (avec qui il avait déjà écrit « Ghosts of the civil dead »), qui en signe également la musique. Présenté comme « un western australien », il est vrai que la formule nétait pas forcément des plus vendeuses.
« On sest voué au diable toi et moi »
Pourtant, force est de constater que « The proposition » est un film très réussi. Tout dabord, grâce aux hallucinants paysages de loutback australien, qui, contre toute-attente, se révèlent être un décor fantastique pour un western, nayant à rien à envier à la Death Valley. Ensuite, on doit reconnaitre à John Hillcoat davoir parfaitement su citer ses modèles sans jamais les copier. On pense ainsi à John Ford et à sa manière de filmer les paysages en leur donnant un rôle à part entière, mais aussi à Leone, pour ce rythme si lent et ce lyrisme dont tout le film est emprunt, qui rappellent l'inéluctabilité d'une fin quon devine violente et dramatique. Mais plus que tout, cest lombre de Sam Peckinpah qui plane telle une ombre sur le film. Et plus précisément encore, on pense à son hallucinant « Apportez-moi la tête dAlfredo Garcia », auquel il emprunte ce désenchantement total, ces personnages désabusés, cette crasse ambiante qui semble coller à la peau (avec ces nuées de mouches, les personnages aux vêtements sales et aux dentitions pourries) et cette manière si particulière de filmer la violence et la mort, sans concession avec un mélange de fascination et de dégout. Une violence dont le questionnement est dailleurs au centre du film, le réalisateur sinterrogeant sur la nature de lhomme, narrivant pas à déterminer qui des hors-la-loi coupables des crimes et des viols les plus atroces tout en se montrant raffinés (amateurs de poésie et de chants) ou des pecnots du cru obtenant le droit de lyncher un prisonnier sans procès par pure cruauté étant les plus barbares. Si le réalisateur peut sappuyer sur un casting quatre étoiles de vrais gueules expérimentés (Guy Pearce, Danny Huston, Emily Watson), la palme revient de très loin à Ray Winston, qui livre ici une prestation remarquable. Contre toute attente, Hillcoat signe donc un coup de maitre en réalisant un film sans faute, à la fois haletant, envoutant et magnétique. Assurément lun des tous meilleurs westerns de ces 20 dernières années. A ne louper sous aucun prétexte, donc.
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