Bobby Deerfield
« Ça ne doit pas être facile davoir de la délicatesse quand la mort vous guette »
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Champion de formule 1, Bobby Deerfield mène une vie discrète entre sa compagne et la préparation de ses courses.
Mais une série de graves accidents, dont celui qui causera le décès brutal de son coéquipier, vont finir par remettre en question la vie du champion. Obsédé par cet accident, il finira par faire la rencontre dune jeune leucémique dont il tombera éperdument amoureux
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« Vous passez votre vie à essayer de ne pas mourir »
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Le pilote de formule 1 fut au cinéma des années 70 ce que le cow-boy fut au cinéma des années 50 : une icône virile, un héros solitaire et intrépide, prêt à repousser ses propres limites et à risquer sa vie futilement pour le succès et la gloire. Mais modernité oblige, le moteur à injection a remplacé le six coups et le fidèle destrier, les chevaux se retrouvant désormais sous le capot. Reflet dune certaine époque où la technologie symbolisait la modernité et lopulence, les films consacrés aux sports motorisés se sont développés le temps dune décennie (« Grand Prix », « Le Mans », voire même la saga de « La coccinelle »), développant avec eux les codes bien définis dun genre éphémère, qui renaitra vingt ans plus tard avec des films comme « Jours de tonnerre » ou la saga « Fast and furious ». Librement adapté du roman de Erich Maria Remarque, « Le ciel na pas de préféré » (publié en 1961), le film est donc réalisé en 1977 par Sidney Pollack, tout juste auréolé du succès des « Trois jours du condor » sorti moins de deux ans plus tôt. Plus volontiers spécialiste des drames sentimentaux intimistes, des fresques sociales et des thrillers politiques, il était donc plutôt surprenant de retrouver le réalisateur aux commandes dun tel film. Plus surprenant encore, le casting pour le moins hétéroclite où se côtoient Al Pacino, Marthe Keller (préférée à Catherine Deneuve qui voulait le rôle), Anny Duperey ou encore Gérard Hernandez (!).
« Cette femme est condamnée. Elle a peut-être juste envie davoir un amant à ses côtés à lheure de sa mort »
Pour autant, lillusion ne durera quune petite dizaine de minutes, le naturel sentimental de Pollack revenant au galop. Ou plutôt à fond les ballons. Car quon se le dise, en dépit des furtives apparitions des authentiques champions de F1 de lépoque, lunivers des courses automobiles ne servira ici que de décor au récit, le réalisateur préférant se focaliser sur le portrait de Bobby Deerfield, héros mystérieusement taciturne et désabusé, ainsi que sur sa rencontre avec Liliane, jeune et fantasque héritière italienne atteinte dune leucémie. Malheureusement pour nous et pour son film, Pollack semble avoir quelque peu perdu ses notions déquilibre. Tout dabord, dun point de vue narratif, la rencontre (improbable) et le jeu dapprivoisement auquel se livrent les deux protagonistes principaux apparaissent clairement disproportionnés et longs par rapport au reste du film. Un déséquilibre que lon retrouve aussi dans le jeu de contrastes et doppositions un peu trop basique et simpliste sur lequel sappuie le réalisateur pour nous faire croire à la romance des deux personnages. Il est sinistre et névrosé autant quelle est lumineuse et épicurienne. Mais Bobby réapprendra auprès delle à se laisser aller aux plaisirs simples de la vie (pique-niques et autres parties de campagne) et à la fantaisie (apprendre à sinventer un passé et une vie de toute pièce). Une renaissance en quelque sorte. Un retour à la vie tandis quelle se meurt de sa maladie et que léchéance fatale semble inéluctable. Clairement, on aura connu Pollack plus inspiré et plus émouvant. Dautant que sa direction dacteurs, volontairement atone, ne permet jamais de donner un peu de dynamisme à ce film plutôt soporifique. On pourra toujours se consoler en admirant les magnifiques paysages italiens de la région des lacs et de Toscane. Mais dans lensemble, ce « Bobby Deerfield » demeure un Pollack en mode mineur.
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