Secrets et mensonges
Dans le cadre de son concours « Blogueurs, faites votre cinéma ! », Priceminister ma proposé de critiquer le dvd du film « Secrets et mensonges » de Mike Leigh.
« Tas
pas demandé à venir au monde mais je nai pas demandé à tavoir non
plus ! »
A
la mort de sa mère adoptive, Hortense, une jeune femme noire de vingt-sept ans,
décide de partir à la recherche de sa véritable mère. Elle apprend avec
stupéfaction que sa vraie mère, Cynthia, est blanche et qu'elle a une fille de
vingt ans, Roxanne, avec laquelle elle vit.
Quant à Cynthia, elle est paniquée
quand elle apprend l'arrivée de cette enfant oubliée depuis longtemps.
Palme d'or au Festival de Cannes en 1996 et Prix d'interprétation féminine.
« Vous avez légalement le droit de rechercher votre mère naturelle mais elle na peut-être pas trop envie de vous voir »
Metteur
en scène de théâtre, Mike Leigh fait ses classes audiovisuelles à la BBC durant
les années 70. Au même titre que Ken Loach et Stephen Frears, réalisateurs avec
lesquels il participe dès les années 80 au renouveau du cinéma social anglais.
S'intéressant au quotidien de classes ouvrières et populaires de l'Angleterre
post-thatcheriste, il signe des films souvent assez durs traités sur le mode de
la tragi-comédie. Son quatrième film, « Naked », est récompensé du
Prix de la mise en scène et du Prix d'interprétation masculine au Festival de
Cannes 1993, lui permettant d'accéder à la reconnaissance internationale. La
Croisette continuera à lui porter bonheur puisque son film suivant,
« Secrets et mensonges », y obtient trois ans plus tard la Palme d'or
au terme d'une compétition des plus relevée (face notamment à
« Fargo », « Breaking the waves », « Crash »,
« Le huitième jour », « Ridicule » ou encore « Un
héros très discret ») ainsi que le Prix d'interprétation féminine pour
Brenda Blethyn. Une performance que le film ne rééditera pas aux Oscars,
repartant bredouille de la cérémonie malgré ses cinq nominations.
« Ce quon na jamais eu ne peut pas nous manquer »
On
connaissait son talent de chroniqueur de la société anglaise. Avec
« Secrets et mensonges », Mike Leigh affine surtout son talent de
portraitiste. A limage de son personnage de photographe, qui parvient à
immortaliser en un instant la vérité de ses modèles, Mike Leigh suit donc en
parallèle les trajectoires de trois personnages liés par le sang mais que le
destin, les secrets et les mensonges ont séparés. Trois destinées en quête de
rédemption, donc. Trois êtres cabossés par la vie qui aspirent à voir leurs
chemins converger. Mais pour cela, il faudra accepter de faire ressurgir la
vérité, de crever les abcès. De se défaire des secrets et des mensonges. De ce
que lon a caché et falsifié au cours des années. Avec délicatesse, le cinéaste
filme les silences et les non-dits qui ont fini par miner et briser la vie des
protagonistes. Il use dune infinie finesse pour décrire les rapports entre ses
personnages et notamment cette étonnante scène de retrouvailles entre une mère
et sa fille, neuf minutes de vérité brute, durant lesquelles Brenda Blethyn
fait preuve dune étonnante et désarmante sincérité. Très peu écrit, le film de
Mike Leigh doit une grande partie de sa spontanéité aux talents
dimprovisateurs de ses comédiens, trouvant son apogée dans un final dantesque
aux accents terriblement british. Traitant avec beaucoup de subtilité des
thèmes de ladoption et de lidentité, « Secrets et mensonges »
soulève de grandes questions : labandon dun enfant ne peut-il pas être
aussi une chance qui lui est donnée de sortir de sa condition sociale ? Le
droit de connaitre ses racines est-il inaliénable ? Lune des belles
qualités du film réside dans les beaux rôles de femmes quil dessine. A ce
titre, les comédiennes sont toutes excellentes, Brenda Blethyn et Marianne
Jean-Baptiste (Toutes deux nommées à lOscar de la meilleure actrice) en tête. Une
fois de plus, Mike Leigh tient toutes ses promesses avec ce film qui mérite
amplement sa Palme dor.
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