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15 Apr

Le train sifflera trois fois

Publié par platinoch  - Catégories :  #Westerns

«- Nous avons toute la vie pour être heureux, partons.

- Non, je n’ai qu’une heure, et j’ai tant à faire… » 

Sorti sur les écrans en 1952, « Le train sifflera trois fois », western mythique de Fred Zinnemann, met en scène le shérif Bill Kane, le jour de son mariage (qui est aussi son dernier jour d’exercice de ses fonctions), qui est confronté à l’annonce du retour une heure plus tard par le train d’un hors-la-loi qu’il avait fait arrêté et condamné à la pendaison cinq ans plus tôt. Ce dernier est d’ailleurs attendu sur le quai par trois de ses complices. Alors qu’il avait promis à sa femme de ne plus faire usage de la violence et qu’elle le supplie de partir avec elle pendant qu’il en est encore temps, Kane est obligé de chercher des volontaires dans la ville pour faire face à l’arrivée de l’affreux de Franck Miller. Or, par lâcheté, par rancœur, ou par amitié envers Miller, tous les habitants de la ville tourne progressivement le dos à Kane, le laissant seul pour affronter la bande des quatre.

 

En réalisant « Le train sifflera trois fois » (le titre original étant « High noon », expression signifiant « l’heure de vérité »), Zinnemann réalise un film qui dépoussière le genre - pourtant alors très prospère - du western. En effet, dans ce film, il y a finalement très peu de scènes de fusillades (il n’y en a qu’une, à la fin, et elle n’est pas spécialement spectaculaire), et les héros paraissent vulnérables et imparfaits. Le personnage de Kane, interprété par Gary Cooper, légende du western par excellence, avoue d’ailleurs éprouvé de la peur avant son face à face avec les quatre bandits, tandis que les habitants respectables de la ville ne se cachent pas de leur lâcheté. Par ailleurs, les hostilités finales sont lancées par Cooper qui n’hésite pas à abattre le premier membre de la bande en surgissant dans son dos (sa femme en fait d’ailleurs de même). Ces éléments sont tout à fait nouveaux pour le genre du western en 1952. De même la présence dans les rôles principaux d’une femme mexicaine (formidablement interprétée par Katy Jurado), indépendante, forte, ex-compagne de Cooper et femme d’affaires, est aussi un élément assez novateur pour l’époque.

 

« Je vais te dire ce que je pense de toi et de Kane. Tu es un charmant garçon avec de belles épaules. Mais les belles épaules ne font pas les hommes. Kane, lui, est un homme. Toi tu resteras toujours un charmant garçon. »

 

Zinnemann a fait le choix de favoriser la tension et l’aspect psychologique dans son film plutôt que de faire la part belle à l’action. Il a ainsi choisit de tourner son film en « temps réel », c’est à dire de conserver une unité de temps dans son récit, qui retrace en gros l’heure et demie avant l’arrivée du train et la fusillade finale. Ainsi, sur les nombreuses horloges qui apparaissent à l’écran, avec des plans d’ailleurs de plus en plus fréquents et saccadés au fil du récit, montrent bien que le film débute à environ 10h30 pour se finir peu après l’arrivée du train de midi. Par ailleurs, les nombreux plans sur l’horizon de la voie ferrée renforce le sentiment de menace imminente. La tension monte ainsi crescendo, de plus en plus palpable au gré des réactions lâches des uns et des provocations des autres.

 

Le casting a été judicieusement élaboré. Le personnage du sheriff Kane est formidablement interprété par le grand « Coop ‘», Gary Cooper, légende du genre par excellence. Quelque peu marqué par les ans, son visage sage et rude, et sa démarche longue et sûre planent héroïquement tout au long du film. A ses côtés, les deux femmes qu’il a aimé, Katy Jurado et surtout la sublime Grace Kelly, tout à la fois épouse fragile et bercée de beaux principes, et finalement amoureuse et courageuse, car c’est la seule qui ne peut se résoudre finalement à l’abandonner. Dans la bande des méchants, à noter les débuts devant la caméra du jeune Lee Van Cleef, qui sera probablement le plus grand méchant du genre du western. Notons également enfin la présence du jeune et fougueux Lloyd Bridges, excellent en adjoint immature.

« Si toi aussi tu m’abandonnes, ô mon unique amour, alors je n’aurais plus personne, si toi aussi tu m’abandonnes »

 

La musique du film, le fameux « si toi aussi tu m’abandonnes » signé Tiomkin et devenu mythique, est très prenante, puisqu’elle ouvre le film dès les premières images, et revient en fond tout au long du film.

 

Mais la vraie force de « Le train sifflera trois fois », c’est avant tout son message. En effet, par cette lutte d’un seul homme contre la menace violente qui approche et contre le mutisme et la lâcheté de ses pairs qui finalement acceptent ce destin, le scénariste Carl Forman et le metteur en scène Fred Zinnemann dénoncent le principe du maccarthysme qui ronge alors la société américaine et plus particulièrement encore le milieu du cinéma. Et en 1952, en pleine apogée de ce système de suspicion et de dénonciation, cela donne au film une valeur encore plus forte.

Pour finir, on pourra noter la petite incohérence puisque ce film allégorique contre le maccarthysme est porté par Gary Cooper qui a été l’un des grands dénonciateurs pour le petit monde du cinéma. Notons également que ce rôle lui a valu l’oscar du meilleur acteur. Et compte tenu de sa prestance impressionnante tout au long du film, il est plus que mérité.



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B
bonjour !!!<br /> je vois qu'il existe encore des fans de ce film... Je suis à la recherche da le BO, qqn l'aurait-il, ou sait-il où je pourrais me la procurer ?<br /> merci !!!
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B
Très belle critique pour un non moins film magnifique. On a tous encore en tête la mélodie et les paroles qui nous remémore ce moment inoubliable que nous a donné ce chef d'œuvre. Sans oublier cette tenance angoisse du danger qui approche, et la lâcheté des amis et des habitants. Seul face à la mort. Et surtout, ce regard anxieux, mais jamais désespéré de Gary Cooper et celui débordant d'amour de Grace Kelly.
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