La traversée du temps
« Encore là à la dernière minute Soit en retard, au moins ce sera plus simple ! »
Voilà près dune décennie que le public français sest pris dun grand intérêt pour le cinéma danimation japonais. Il faut dire que la culture manga a bercé toute une génération qui a découvert le genre par les dessins animés nippons qui occupaient la quasi totalité des émissions télévisées pour la jeunesse depuis le milieu des années 70. Et puis il y a eu la découverte de luvre du grand Miyazaki et des prestigieux studios Ghibli à la fin des années 80, et surtout dans les années 90 avec des films comme « Porco Rosso » (1992), « Princesse Mononoké » (1997), ou encore « Le voyage de Chihiro » (2001). Depuis de nombreuses productions du genre débarquent chaque année sur nos écrans. La dernière en date, « La traversée du temps », est signée Mamoru Hosoda. Si ce dernier est moins connu chez nous que Miyazaki, il faut savoir quil signe ici son cinquième long métrage du genre, et que cette « Traversée dans le temps » est une production des studios Madhouse, à qui lon doit le récent « Paprika ». A noter également que lhistoire de ce film est ladaptation dun roman de Tsu Tsui (qui a écrit également le roman dont sinspire « Paprika »), datant dune quarantaine dannées, et grand classique de la littérature des adolescents nippons. Impressions.
« Le temps nattend personne »
LHistoire :
Japon. Makoto est une lycéenne moyenne. Un peu garçon manqué, elle brille par ses retards et son dilettantisme, et occupe tout son temps libre à jouer au base-ball avec ses deux meilleurs amis : Kosuke et Chiaki. Un jour, une chute dans une salle de chimie la sort de son insouciance. En tombant sur une sorte de noix, elle hérite dun pouvoir étrange : faire des voyages dans le temps. Si dans les premiers temps, elle profite allégrement de ce don pour des futilités agréables, elle se rend vite compte que cela comporte un lourd poids de responsabilités. En effet, revenir dans le passé pour influer sur le cours des évènements a aussi son lot de répercussions pour les autres. Si en plus les sentiments et la vie de ses proches sont en jeu, les ennuis ne font donc que commencer
« Je te connais, si tu celui que tu attends ne viens pas, tu cours le chercher »
LAnimation japonaise souffre dun défaut majeur, à savoir une certaine imperméabilité dans le traitement narratif. Et cette « Traversée du temps » néchappe pas à la règle. Si le film dans sa totalité est plaisant, le sujet original et bien mené, si lhumour est assez présent, en revanche certaines interrogations demeurent. A commencer par la présence de Chiaki, qui vient du futur, sans quon sache réellement ce quil vient faire, ni comment il part. Il en va de même avec le personnage de la tante. Elle connaît le pouvoir de sa nièce et la manière dont on peut sen servir sans quon ne sache jamais comment elle peut en savoir autant sur le sujet.
Si on est pas trop regardant sur cette petite fragilité inhérente aux films danimations japonais, le film reste quand même très plaisant. Ce gentil conte offre une jolie fable sur ladolescence, et la difficulté de devoir prendre des décisions et ses responsabilités. Et pour traiter dun sujet à la fois si commun et pourtant si délicat, lidée des retours dans le passé qui chamboule le futur offre de belles perspectives. Dans tous les cas, Hosoda a choisi dimposer une bonne touche dhumour (les moues de Makoto, et ses arrivées ridicules de ses voyages dans le temps), qui donne beaucoup de légèreté à un sujet qui ne sy prêtait pas forcément, lui évitant toute mièvrerie. Et cette légèreté apparente nempêche pas de belles émotions de prendre le dessus dans le dernier quart dheure du film.
Sur la forme, si lensemble est visuellement beau, on est quand même très loin de lesthétisme de Miyazaki. Si les décors sont très réussis, les personnages souffrent dun graphisme original mais assez moyen pour le coup. Lanimation quand à elle est très légère, aérienne, et sans esbroufe. Il sen dégage malgré tout une sensation visuelle de modernité, mais aussi de réalisme, dans le sens où ces personnages semblent symptomatiques de la jeunesse nipponne moyenne de notre époque.
« Je tattends dans le futur »
Pour son cinquième film, Hosoda nous propose ladaptation dun classique de la littérature adolescente japonaise et nous invite à une jolie réflexion sur ladolescence et le difficile passage à lâge adulte. Entre prise de décisions, de responsabilités, et des sentiments forts, quils soient amicaux, ou pour la première fois amoureux, il retranscrit avec fraîcheur et modernité la complexité de ce que lon peut ressentir à cet âge. Si le film sappuie sur un scénario attachant, et souvent drôle, il pèche par un manque important de clarté sur la fin. Visuellement parlant, cette « Traversée du temps » est de bonne facture sans être non plus une réussite totale. Elle se situe en tous les cas bien loin des sommets atteints par maître Miyazaki.
Une des forces du film est quil sadresse à tous les publics, et avec beaucoup dhumour et de finesse, en traitant dun sujet propre aux adolescents. Un petit film sympathique.
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