10 000
« Tu vois cette lumière dans le ciel ? Elle na pas parcouru le monde comme les autres. Elle est comme toi dans mon cur : elle ne séteindra jamais. »
10 000 avant notre ère. Le jeune chasseur Dleh aime dun amour tendre la jeune et belle Evolet, une orpheline rescapée du massacre dune tribu voisine et que sa tribu a recueilli dès son plus jeune âge. Celle-ci est, selon le mage du village, porteuse dune prophétie selon laquelle lhomme qui gagnera son cur par sa bravoure deviendra le nouveau chef de la tribu. Jusquau jour où un groupe de pillards débarquent dans le village tuant une partie de ses habitants et capturant les autres dont Evolet. Nécoutant que son cur, DLeh, accompagné dune poignée de braves, décide de partir à leur poursuite. Un périple durant lequel le petit groupe va franchir les limites de son territoire, découvrant dautres régions plus hostiles encore, et dautres peuplades. Ces dernières, régulièrement attaquées et pillées, se décident à se joindre aux côtés de DLeh, sur la piste dun mystérieux empire, où Dieu vivant tyrannique et mégalo, asservit les hommes afin quils lui construisent de monumentales pyramides à sa gloire
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« Quand ils partirent, Vieille Mère savait quils nétaient plus de simples chasseurs mais des guerriers. »
Spécialiste du nanar spectaculaire à gros budget, le réalisateur allemand Roland Emmerich sest distingué par sa filmographie alternant le très mauvais (« Godzilla », « Independance day », « Universal soldier »), le simplement mauvais (« The patriot »), et le bon (« Le jour daprès »). La sortie de son nouveau film, laventure préhistorique « 10 000 », saccompagnait donc dune certaine crainte quant à son contenu. Si lunivers préhistorique avait déjà été porté avec succès sur grand écran par la saga « Jurassic Park » lancée par Steven Spielberg, ainsi que par Jean-Jacques Annaud et sa « Guerre du feu », Emmerich ambitionnait clairement de se servir de se contexte primitif pour peindre une grande fresque daventures. Un défi de taille, qui aura nécessité la participation de plusieurs historiens et de spécialistes deffets visuels, devant pour loccasion recréer un univers particulier, peuplé danimaux ayant disparus depuis des milliers dannées et dont lapparence, la texture et la démarche nous sont méconnus. De plus, devant le nombre de paysages différents présents à lécran, le tournage sest donc effectué aux quatre coins du monde, passant par la Nouvelle-Zélande, lAfrique du sud, et la Namibie. A noter que pour préserver le buzz du film (et pour éviter toute mauvaise publicité !), seules les vingt premières minutes du film ont été présentées à la presse. Enfin, pour la petite histoire, le nom du personnage principal, « DLeh », est lexact inverse du mot « Held », signifiant « héros » en allemand.
« Un homme bon trace un cercle et soccupe de ceux qui sont dedans, femmes et enfants. Dautres font des cercles plus larges, avec frères et surs. Dautres font des cercles plus larges encore. Ce sont des hommes dexception, et ton père en était un. »
A la base, lidée de faire une grande fresque daventure située en pleine préhistoire semblait plutôt bonne et prometteuse. Cet univers lointain, méconnu et hostile permettait, du moins sur le papier, de faire un film à grand spectacle ou laventure humaine se verrait particulièrement valorisée. De même, la reconstitution de ce monde, avec ses animaux gigantesques, semblait être taillé sur mesure pour limagination fertile et pour le goût de la démesure de Roland Emmerich. Malheureusement, le spectacle qui nous est proposé demeure assez affligent. Entre lincroyable mélange des époques (mais que foutent ces hommes des cavernes au beau milieu des chantiers des pyramides des pharaons égyptiens, séparés par plus de 4000 ans ?), les improbabilités absurdes (la succession des décors traversés, passant des montagnes de lère glaciaire, à la jungle tropicale avant daborder le désert de sable, avec chacun son lot de bestioles improbables, comme lautruche géante), et les anachronismes (les menottes en métal à lépoque du feu !), la grande fresque promise sombre toute seule dans le ridicule. Dun point de vue purement scénaristique, ce nest pas beaucoup mieux : cette chevauchée à travers le monde (les longs passages de marche à pied sur tous les terrains nest pas sans rappeler en moins beau ceux du « Seigneur des anneaux »), à la poursuite des hordes barbares enlevant des jeunes gens dans toutes les tribus afin de les asservir au travail de la construction des pyramides na rien ni de convaincant, ni de trépident. Les thèmes abordés, comme la lutte pour la liberté, ont déjà été traité mieux, notamment dans le genre pas si éloigné du péplum (« Spartacus », « Gladiator »). Pire, la référence biblique à Moïse, semble encore plus risible quincongrue. Le tout pour aboutir à un dénouement des plus stupides et ridicules qui soient. Reste des personnages particulièrement mal écrit, toujours stéréotypés, complètement manichéens, qui peinent à accrocher les spectateurs. La palme revenant à la vieille femme du village, faisant office de mage, qui réussit à être encore plus caricatural et drôle malgré elle que le personnage de « Gros lolos » dans le film des « Simpson » !
« - Par rapport à nous, ils sont trop nombreux, ils sont invincibles.
- Non. Ceux quils obligent à travailler pour eux sont plus nombreux encore. »
Côté réalisation, Emmerich sort une nouvelle fois lartillerie lourde en terme deffets visuels : décors, costumes, animation numérique danimaux préhistoriques aujourdhui disparus, impressionnante reconstitution visuelle du chantier des pyramides. Pourtant, rien de tout cela ne parvient à sauver le film. Si on reconnaîtra la qualité de lanimation des mamouths, qui donne lieu à une impressionnante scène de chasse (seule scène réussie du film), le reste flirte avec le grotesque. Il faut dire quil ny a quHollywood et sa phobie de ne pas présenté de choses laides, pour faire un film sur des hommes préhistoriques, présentés habillés de peau et sales, mais avec des sourires étincellent comme dans une pub pour du dentifrice. Pour le reste, le classicisme dune réalisation sans grand génie, et plus que tout, sans souffle, finit denfoncer le film. Côté interprètes, pas grand chose non plus à sauver, tant lensemble est caricatural et raté. Tout juste retiendra-t-on le joli minois de Camilla Belle, plus connue pour son face à face avec George Clooney dans une célèbre pub pour le café. Décidément, peu de choses sont à retenir de ce spectacle creux et affligent, même pas beau à voir. A éviter !
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