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12 Jul

Capitaine Alatriste

Publié par platinoch  - Catégories :  #Films Politiques-Historiques

« Au diable l’avenir. A l’avenir, nous serons tous morts »

"Ce n'était pas l'homme le plus honnête, ni le plus pieux, mais c'était un homme courageux. Il s'appelait Diego Alatriste." Tels sont les premiers mots du best-seller international d'Arturo Pérez-Reverte, "Le capitaine Alatriste". L'histoire se déroule dans l'Espagne impériale du XVIIe siècle, entre 1622 et 1643, sous le règne de Philippe IV, avant-dernier roi de la Maison d'Autriche. Philippe IV est un monarque faible et facilement manipulable, dominé par une Cour corrompue, agitée par les intrigues orchestrées par le très influent comte-duc Olivares. L'Empire espagnol décline lentement. La société souffre de ses nombreuses contradictions. Le luxe et l'opulence de l'aristocratie coexistent avec la misère et la vulnérabilité du peuple.
Ce monde déclinant est le théâtre des aventures de Diego Alatriste, fier soldat au service de Sa Majesté dans les Flandres, et mercenaire à Madrid et Séville en temps de paix.

« Méfie-toi : la beauté des femmes engendre toujours la tyrannie des hommes » 

Projet le plus attendu et le plus excitant du cinéma espagnol ces dernières années, ce « Capitaine Alatriste » est l’adaptation cinématographique d’une saga littéraire écrite par Arturo Perez-Reverte. Une œuvre qui a connu un énorme succès en librairie lors de sa sortie de l’autre côté des Pyrénées dans les années 90, et qui est considérée là-bas comme une référence sur l’Espagne du 17ème siècle, un statut qui lui vaut de trouver sa place dans les programmes scolaires espagnols. Dès lors, ce passage sur grand écran prenait des allures de défi à double tranchant. D’autant que le film, avec son budget de 24 millions de dollars, était le film le plus cher de l’histoire du cinéma espagnol. Et si cette super-production était depuis longtemps dans les tuyaux, elle devait être initialement confiée à Antonio Banderas qui devait la réaliser et l’interpréter lui-même, aux côtés de Gael Garcia Bernal. Il n’en sera rien, et c’est finalement Viggo Mortensen, habitué des films en costumes, qui héritera du rôle principal de cette grosse production européenne. A noter que le film a été nommé 12 fois aux Goya (équivalant des Césars en Espagne), et qu’il est reparti avec trois récompenses techniques.

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« Le Capitaine Alatriste est à la fois pauvre et hautain. Mais il est également à la fois courageux et discret. Ce serait regrettable qu’il lui arrive quelque chose »

Sortie sur les écrans espagnols il y a déjà près de deux ans, cette super-production semblait condamnée à une sortie « direct to dvd » chez nous. Pourtant, la voici donc qui sort enfin sur nos écrans, mais dans la plus grande discrétion, et sur un nombre de copies très limité. Pas forcément de bon augure. Pourtant, la saga « Elizabeth » avait relancé un peu le genre des films en costumes dit de « Capes et d’épées », revisitant au passage les époques foisonnantes et troubles de nos vieilles nations européennes. Et en la matière, la période riche et complexe de l’Espagne Impériale comptait suffisamment d’intrigues de cour pour nourrir un grand film d’aventures historiques. Pourtant, à l’image des « Fantômes de Goya » de Forman, ce « Capitaine Alatriste » peine à convaincre malgré de réelles qualités. Il y a tout d’abord ce scénario, sorte de grand fourre-tout désordonné qui tente maladroitement de condenser cinq tommes en un film d’un peu plus de deux heures. Du coup, les enchaînements sont hasardeux voire ne se font pas, les ellipses sont aberrantes (on saute sans problèmes les décennies, des personnages apparaissent puis réapparaissent dix ans plus tard sans qu’on comprenne bien pourquoi), et la confusion la plus grande règne au milieu de ces nombreuses intrigues qui s’entrecroisent sans qu’on en comprenne très bien leurs portées (pourquoi Angelica veut-elle dès son plus jeune âge mettre la main sur le jeune disciple d’Alatriste ? Pourquoi Inigo se fait-il kidnapper ? Et pourquoi est-il condamné plus tard aux galères ? Alatriste refuse d’exécuter les représentants anglais sans qu’on comprenne bien la portée de son geste et du complot qui se trame derrière). A cela, il faut ajouter le traitement du récit, toujours ambivalent, hésitant entre parti pris dynamique (très belle scène d’ouverture qui fait penser un peu à du Terrence Mallick), et passages excessivement contemplatifs et bavards (les scènes de cour notamment). Un style trop hésitant, qui pénalise le film en lui ôtant toute chance de fluidifier son intrigue.

« La mort n’est qu’une formalité »

Dommage, car visuellement, le film est plutôt beau. On reconnaîtra aisément le soin apporté aux décors et aux costumes, magnifiés par une très belle photographie. Pour autant, l’ensemble, trop inégal, n’est pas toujours satisfaisant. En effet, si quelques scènes demeurent très réussies (essentiellement toutes celles qui se passent en Flandres et celle de l’attaque du navire chargé d’or), on reprochera à Diaz Yanes de trop s’appesantir sur des scènes inutilement bavardes et mal rythmées, privant son film d’un peu de souffle épique qui lui aurait fait le plus grand bien. A l’image de cette désastreuse et ridicule scène de bataille finale, indigne d’une telle production. De même, le réalisateur alterne le bon et le moins bon en terme de scène de duel à l’épée : si celle du piège dans le cloître se révèle très élégante, d’autres, comme celle où Inigo venge son père adoptif sont beaucoup plus kitschs, notamment en raison d’égorgements à outrances, ridiculement mal faits (celle du compagnon d’armes qui se tranche la gorge pour échapper à l’Inquisition, en particulier). Finalement, le film est surtout sauvé de l’ennui par l’impeccable prestation de Viggo Mortensen qui incarne parfaitement et avec beaucoup de sobriété ce personnage de redoutable mercenaire au grand cœur. A ses côtés, si on retrouve une grande partie du gratin du cinéma espagnol (Eduardo Noriega, Javier Camara), on retiendra surtout les prestations du jeune Unax Ugalde (aperçu dans « L’amour au temps du choléra »), d’Elena Anaya, et d’Ariadna Gil. Mais dans tous les cas, ce « Capitaine Alatriste » reste quand même un peu décevant. Car s’il y avait bel et bien matière à un scénario foisonnant et romanesque ainsi qu’à un film riche, celui-ci, trop poseur et souffrant d’un manque chronique de souffle épique, se montre finalement confus et soporifique. Pas totalement raté, mais pas extraordinaire non plus…

  



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B
Ce qu'il y a dans ces époques, c'est toujours le côté sombre, obscure, lent qui est donné au cinéma, et ne donne pas trop envie d'aller les voir. Je repense aux films avec Klaus Kinski. Celui-ci n'échappe à la régle apparemment. Alors bof !
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