Cliente
« Je connais des tas de filles bien qui sont amoureuses de connards finis »
Judith a la cinquantaine séduisante. Femme équilibrée, elle dirige une émission de téléachat. Divorcée, elle vit seule, avec pour confidente sa soeur Irène, qui est la seule a connaître son secret : Judith s'offre régulièrement les services sexuels de jeunes gens, qu'elle choisit sur les sites d'escort d'Internet.
Elle rencontre ainsi Patrick, qu'elle apprécie pour sa gentillesse, son charme et sa simplicité. Or Patrick, en réalité Marco, est marié et profondément amoureux de sa femme Fanny, laquelle pense que son mari fait des chantiers.
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« Je paye uniquement pour prendre du plaisir. Jai assez payé pour le reste. »
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Romantique et féministe, Josiane Balasko, en marge de sa longue carrière dactrice, aura su se construire une carrière de réalisatrice intéressante, au cours de laquelle elle se sera illustrée en traitant des sujets jugés un peu « tabou » avec un humour vachard et un brin « provocateur ». Une recette qui lui aura permis de toucher un large public, son « Gazon maudit » (1995) ayant attiré près de 4 millions de spectateurs dans les salles. Pour son septième long, la réalisatrice adapte son propre roman, « Cliente », paru en 2004. Pourtant, à lorigine, Balasko ne voulait pas faire de « Cliente » un roman, mais bel et bien un film. Mais son scénario, jugé « choquant » et « risqué » par les producteurs, na pas trouvé les financements nécessaires pour le montage dun film. Finalement paru en livre, il aura fallu attendre 4 ans et un succès en librairie pour que Josiane Balasko puisse monter son film. Loccasion pour elle de retrouver sa grande amie Nathalie Baye, sept ans après « Absolument fabuleux ».
« - Tu es pathétique. Comment se sera dans 5 ans de se taper des minets ? Plus cher. Ce sera plus cher »
A laube de la soixantaine, une femme qui refuse de tomber amoureuse par peur de souffrir, soffre régulièrement la compagnie de jeunes hommes afin de la satisfaire. A priori, pas de quoi crier au scandale. Pourtant, cette histoire damour tarifé, aucun producteur nen voulait, jugeant le sujet « choquant », « déplacé » et « tabou ». Preuve accablante dun système définitivement machiste, qui refuse toute dépréciation de limage de lhomme, là où la même histoire « inversée » avec un homme payant la compagnie de femmes plus jeunes serait passée comme une lettre à la poste. Pourtant, il ny a rien dans le film de Balasko de graveleux ni de voyeur. Et cest sûrement ça sa force. Car cette dernière sapplique à esquisser un joli et sensible portrait de femme daujourdhui, à la fois forte et indépendante, mais en même temps fragile, avec ses doutes, ses certitudes, sa peur de vieillir et de la solitude. Par extrapolation, Balasko brosse même un constat social intelligent et juste, mais aussi terriblement pessimiste et sombre, où la cupidité et la matérialisme ont en grande partie déshumanisé la société. Une société où la réussite sociale se fait désormais au détriment de la réussite personnelle et sentimentale, et où largent est devenu plus indispensable que lamour, voire même pire : un vecteur permettant une forme de satisfaction sentimentale et sexuelle. On regrettera cependant quelques longueurs qui alourdissent inutilement le film, notamment avec toutes les scènes qui se focalisent sur le couple Carré/Caravaca. Un Caravaca qui demeure lun des mystères du cinéma français : laid et sans aucun charisme, on peine à croire quil puisse déclencher de telles convoitises et de telles passions. Dommage également que Balasko ait sacrifié aussi vite son personnage, pourtant le seul à même dapporter un peu de drôlerie (sacrée scène où elle se moque des gigolos) pouvant désamorcer un ensemble à la teneur finalement assez dramatique. Reste enfin une impeccable performance de Nathalie Baye, qui se révèle émouvante en femme plus fragile quil ny parait. Et qui contribue beaucoup à la réussite de ce film.
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