La dame de fer
« Nous devons inciter les gens à se débrouiller par eux-mêmes. S’il y a des difficultés, qu’ils se remontent les manches et qu’ils agissent ! »
Margaret Thatcher, première et unique femme Premier ministre du Royaume-Uni (de 1979 à 1990), autrefois capable de diriger le royaume d’une main de fer, vit désormais paisiblement sa retraite imposée à Londres. Agée de plus de 80 ans, elle est rattrapée par les souvenirs. De l’épicerie familiale à l’arrivée au 10 Downing Street, de succès en échecs politiques, de sacrifices consentis en trahisons subies, elle a exercé le pouvoir avec le soutien constant de son mari Denis aujourd’hui disparu, et a réussi à se faire respecter en abolissant toutes les barrières liées à son sexe et à son rang. Entre passé et présent, ce parcours intime est un nouveau combat pour cette femme aussi bien adulée que détestée.
« N’oublie jamais qu’en face ils sont tous incompétents. Il faut être brave pour prendre le volant »
Venue sur le tard à la réalisation de films, l’anglaise Phyllida Lloyd a connu un certain succès dès son premier film, « Mamma Mia ! » (2008), adaptation pour le grand écran d’une comédie musicale à succès inspirée des tubes du groupe ABBA. Pour son deuxième long métrage, elle opère un virage à 180 degré, en choisissant de réaliser un biopic sur Margaret Thatcher, ancienne premier ministre conservatrice du Royaume-Uni de 1979 à 1990. A cette occasion, la réalisatrice a de nouveau fait appel à la comédienne Meryl Streep pour interpréter la fameuse « Dame de fer ». Si le film a fait l’objet de nombreuses critiques depuis sa sortie – aussi bien de la part des enfants de Thatcher que des opposants de l’ancienne premier ministre qui y voient un portrait trop édulcoré – il a toutefois été largement primé (deux oscars). Il a notamment permis à Meryl Streep de remporter le grand chelem Oscar (son troisième !), Golden Globe, BAFTA.
« Si vous voulez changer le parti, dirigez-le. Pareil pour le pays ! »
Drôle d’idée que de vouloir faire de Margaret Thatcher une héroïne de cinéma ! Il faut dire que même si elle fut une pionnière (elle fut la première femme chef de gouvernement d’un pays occidental), elle laissa néanmoins d’elle une image très largement controversée qui suscita de part le monde beaucoup de haine. Le problème ici, c’est que la réalisatrice cherche à tout prix à avoir une position de neutralité vis-à-vis de son sujet, refusant inopportunément de prendre un quelconque parti. Résultat : elle survole la carrière de Thatcher de façon très scolaire, de son ascension à sa chute. Mais sans jamais mettre le doigt là où ça fait mal, prenant un soin minutieux à éviter les zones d’ombres ou les décisions les plus controversées de sa gouvernance (quid des prisonniers politiques irlandais qu’elle a laissé mourir ? quid des grèves des mineurs qui ont secoué le Royaume-Uni et dont elle est venue à bout par la force ?). Trop parcellaire, le scénario frise même la mauvaise foi intellectuelle lorsqu’il cherche à nous apitoyer sur le sort de cette petit vieille un peu sénile hantée par son défunt mari, en oubliant de nous rappeler qu’elle est avant tout responsable de la privatisation et de la précarisation du Royaume-Uni au profit des financiers. Certes, humainement, le personnage n’en sort pas spécialement grandi. Mais le film, véritablement trop consensuel, suscite tout de même un profond sentiment de malaise. Reste la performance incroyable de Meryl Streep, qui disparait littéralement derrière son personnage et qui sauve à elle seule ce film ambigu.
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